9/ Savoir rebondir

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La rencontre avec l'une des cibles potentielles a été totalement fortuite. Comme Dieter aurait-il pu savoir que la fille colorée était en fait une des personnes qui détenait désormais ce qu'il convoitait ? L'entrée en matière n'avait pas été en sa faveur, mais il avait su rééquilibrer le jeu. Il aurait voulu provoquer une rencontre qu'il n'aurait pas fait mieux. Il était très content de lui.

C'est la première fois qu'il avait à séduire une fille aussi mal habillée. Il avait déjà eu droit à des timides, à des vulgaires, à des sottes, à des cerveaux, à des bimbos... mais une avec un tel mauvais gout, c'était une première.

Il ne risquait pas de l'oublier ! Bon dieu ! Il avait failli perdre son sang-froid en apercevant ses vêtements ce matin ! Mais il avait su garder le contrôle. Il est resté stoïque face à elle, en essayant de ne pas devenir aveugle. Et pourtant, cette jupe ?! ... Il s'était concentré sur les informations qu'elle lui donnait, même si elles n'avaient que peu d'importance. Il voulait juste s'assurer que la cible était au travail pour visiter son appart en toute tranquillité.


— Alors ?

— La direction France m'a rassurée. Ils ont écouté l'histoire et ont compris. Manifestement, ça n'est pas la première fois que Fushukima saque quelqu'un. Mais bon...dit Allegra en sirotant son verre.

Elle est assise dans un café et observe la foule extérieure dans la lumière éclatante de cette fin de matinée qui n'avait pas si mal commencé au demeurant...

— Et tu fais quoi, maintenant ? demande Sally à l'autre bout du fil et du monde quasiment puisqu'elle est à New-York, et que c'est la fin d'après-midi pour elle.

— Durandet m'a dit de me concentrer sur mes autres missions jusqu'à la fin du mois. J'ai aussi postulé pour un poste à l'Alliance française de Nouvelle Zélande. Durandet m'a dit que ce qui venait de se passer ne devrait pas poser problème.

— Je ne parlais pas boulot.

— Hein ?

— Le mec que tu as embrassé ? Tu vas le revoir ?

— J'espère bien que non ! s'exclame Allegra. T'es une grande malade, toi ! Ce type vient de me faire virer.

— Pas de son plein gré ! Et puis, hier, tu as écrit, je cite « un baiser mémorable, même si non consenti par les deux parties », point, fermez les guillemets !

— J'ai aussi écrit qu'il était poursuivi par des types louches dans la rue. C'est sans doute un dealer, un gangster ou un truc de ce genre.

— Un dealer en costard de luxe et qui demande son chemin ? Tu ne t'es pas dit qu'il avait pu se mettre dans les ennuis sans le vouloir ?!

— M'en fous ! C'est pas mon problème. Et puis Sally ! Dois-je te rappeler que je suis à peine sortie d'une histoire suffisamment compliquée pour vouloir la paix, et que tu m'as fait prendre des résolutions qui font de ma vie une désert affectif et sensuel digne d'une nonne en repentance...

— Hé ! Ça fait bientôt sept mois ! Tu peux bien tenter le coup avec ce type, si il te plait... Un truc léger... Pas de prise de tête !

— Ne rêve pas ! Un type comme lui, c'est forcément prise de tête, et ça ne vit pas seul, si tu vois ce que je veux dire.

— Je ne sais pas si votre amie voit ce que vous voulez dire, mais moi non. Vous m'expliquez ?

La situation est surréaliste. Allegra tient son smartphone et entend Sally hurler des « quoi ? Qu'est-ce qui se passe ? Qui te parle ? C'est qui ? Allegra !!! », alors qu'elle fixe bouche bée Matthew Fox qui se tient près de sa table.

— Je dois te quitter, Sally. Je te rappelle, dit-elle en raccrochant brusquement.

À l'autre bout de la ligne, Sally fixe son téléphone avec une certaine surprise. Est-ce qu'il est en train de se passer ce qu'elle croit ?


Les tribulations d'Allegra MullerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant