Chapitre dix : Maya

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Ça y est c'est arrivé. C'est arrivé il y a trois semaines. Joanne a découvert l'identité de Hannah et de Matt. Il ne sait pas grand chose. Je m'assure de l'éviter du mieux que j'ai pu et pour le moment, c'est un franc succès. J'ai demandé à Peter si je pouvais travailler depuis chez moi et avec le soutien de Kate, ça passe comme une lettre à la poste. Quand je sors des bureaux du FBI, je fais en sorte de regarder les caméras de la ville avant. Je suis devenue parano avec pour objectif d'éviter Joanne Jones à tout prix.

Lorsque j'arrive à l'entrepôt dans le Queens, je continue de regarder partout autour de moi. Il n'est pas là. Comment il découvrirait cet endroit ? Même Kate n'est pas au courant.

- Combien Petrova ?

- Un combat mais un bon.

- Besoin de fric comme d'hab'


Comme d'hab'. L'école de Hannah me coûte un bras surtout après l'esclandre que j'ai fait. Les trois cents milles dollars de Joanne sont passés dedans. L'uniforme est sur le point d'être aboli, j'ai réussi à convaincre un bon nombre de parents, notamment les parents des filles. Je fuis l'école aussi. Peter a essayé d'approcher Hannah mais Matt était là.

Matt est assistant du procureur, il ne laissera jamais un Jones approcher notre fille. Il sait ce qu'il encourt. Il sait dans quelle situation ça peut la placer. Il sait aussi que je travaille pour eux. J'étais obligée de lui avouer. Il ne veut rien savoir. Il dit que moins il en sait, mieux il se porte mais je vois qu'il se pose des questions sur ma mission. Il sait aussi que je travaille au FBI la semaine. S'il savait tout, il prendrait Hannah et ferait surveiller nos rencontres mais il me fait confiance et je ne le remercierai jamais assez pour ça. Il dit qu'il comprend mais qu'il préfère ignorer. Il sait que tout basculer rapidement.

Je regarde la salle. Ce soir, il y a plus d'ambiance. Ça change des soirs de semaines où c'est plutôt glauque. L'électro retentit dans les baffles, le ring à été nettoyé et les matchs se passent sur plusieurs étages et plusieurs salles, soit un moyen pour l'organisation de parieurs de se faire un max de fric en une soirée.

Je finis de me préparer, à vrai dire j'ai juste ma veste à déposer. Je regarde la salle depuis le balcon. Il y a pas mal de monde, les gens vont vouloir parier. Si je gagne, je peux me faire assez d'argent pour continuer de cacher quelques secrets.

Puis vient le moment de monter. En fasse de moi, c'est une femme. Elle est nouvelle, hargneuse, haineuse, énervée. Elle a été aveuglée par la colère. Je l'étais, à mes débuts, mais maintenant j'ai une autre motivation.

Mes pensées noires continuent de circuler dans ma tête. Elles ont été là, à chaque instant où je suis seule. Elles continuent de me dire à quel point je ne mérite pas de vivre, à quel point je suis grosse, à quel point j'ai trop de formes.

Alors elles sont là, encore dans un coin de ma tête. Puis il y a les autres pensées, celles qui concernent les repas. Je ressasse sans cesse le nombre de repas que j'ai mangé, ce que j'ai mangé, en quelle quantité, quand je l'ai fait. Même maintenant, sur le ring elles sont là. Ce matin j'ai bu une tasse de thé. A midi j'ai mangé cent grammes de poulet et des légumes vapeur. Ce soir, je n'ai pas mangé. Je ne sais pas si je mangerai. Ça dépendra de mon état, de ma motivation, de mon envie, de mes pensées, de mes angoisses.

Je prends un premier coup. Les habitués savent que je laisse toujours l'adversaire donner le premier. Ça me permet de juger la force, la détermination, la qualité gestuelle. Ce soir, mon adversaire a seulement la force. Elle a la rage de vaincre mais la détermination n'est pas assez solide.

J'enchaîne les esquives, crochets, uppercut, coup franc.

Elle les prend de plein fouet.

L'ambiance est toujours à son comble mais tout ce que j'entends sont mes pensées, encore et encore. Je veux qu'elles se taisent. Je veux qu'elles partent.

[L.4] LOVE & THEATEROnde histórias criam vida. Descubra agora