Chapitre quatorze : Joanne

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Je l'ai vue arriver dans cette robe noire. Au début, j'ai voulu sourire comme un con qui voit la femme qu'il va épouser remonter l'allée. Je n'avais pas autant envie de sourire quand j'ai vu June remonter l'allée. Puis je me suis rappelé que c'était Maya en face. Si je souris, elle pourrait me faire exploser la cervelle. Puis je me suis rappelé qu'il y avait le FBI qui nous colle au cul et nous observe. Puis je me aussi rappelé que ces réactions, c'est pour les amoureux transis comme des fleurs sur le point de sombrer sous le poids de l'amour. Eryne a tort.

Je la regarde avancer vers moi. Je me retiens vraiment de sourire. Je reste adossé à la carrosserie de ma voiture, les mains dans les poches. Elle ne sourit pas, ne me regarde pas. Non. Elle regarde la voiture et je suis sûr qu'elle se demande comment la rendre inutile.

- Tu as encore pris ta poubelle ? Tu ne peux pas t'empêcher de polluer.


Si seulement elle savait que Timothy se sent plus en sécurité dans cette soi-disant poubelle à plusieurs centaines de milliers de dollars, elle ne tiendrait sûrement pas ces propos.

Comme un parfait gentleman, je ne lui ouvre pas la portière. Je la laisse se démerder avec sa robe de princesse, ses escarpins qui ressemblent à des échasses et ses manières de dragon. Elle sait que Matt la compare à un dragon ? Je ne pense pas, sinon Matt n'existerait plus.

Elle baisse le pare soleil, vérifie son maquillage et me regarde à travers le miroir.

Je démarre. Elle regarde autour de nous sans arrêt, elle scrute chaque recoin de rue où l'on passe. Je serai prêt à parier quelques millions qu'elle m'a même regardé pour savoir si je ne cachais un micro ou une autre connerie du genre.

- Je n'ai pas de micro mais ils ne vont pas nous lâcher.

- Pourquoi tu as choisi le FBI ?


Elle tourne la tête vers la fenêtre. Elle refuse de me regarder, de me parler. Elle veut s'en tenir au minimum et je n'aime pas ça. Ce n'est pas ce que j'avais projeté pour cette soirée.

On fait la queue en attendant le voiturier. Elle regarde toujours par la fenêtre pendant que ma mère et Abby m'envoie des messages pour m'informer des nouvelles informations qu'elles apprennent sur les baleines. Elles ont même créé une conversation dans laquelle elles s'amusent à balancer des messages tous plus inutiles les uns que les autres. Qu'est-ce que j'en ai à faire que le rorqual à bosse prend trois respirations à trois minutes d'intervalle avant de plonger pour une durée de dix à quinze minutes ?

- Tu sais, quand tu choisis entre un vin rouge ou un vin blanc et bien j'ai fait celui du vin blanc mais on va me servir le vin rouge.


Je ne comprends rien à sa putain de métaphore. J'aimerai qu'elle m'explique, je veux comprendre, saisir la nuance mais elle regarde toujours par la fenêtre.

On arrive. Je descends, laisse les clés au voiturier avant d'ouvrir la porte de Maya. Je joue le mec galant. Elle prend mon bras, elle joue parfaitement son rôle dans une société hypocrite. S'il n'y avait pas Macbeth, l'envie d'y mettre le feu ne serait plus une envie mais un acte.

On arrive devant l'entrée, je n'ai pas le temps de présenter nos invitations que Maya se place devant moi. Beaucoup trop proche de moi. Je ne comprends pas. Elle fait le choix de bien coller son cul à ma queue et bordel, j'ai sacrément envie de la sauter, l'entendre gémir, hurler mon prénom.

Le vigile la regarde bizarrement mais elle se retourne, se colle à moi. Putain ! A quoi elle joue ? Elle est clairement en train de m'allumer et moi, je vais prendre feu et la défoncer comme un lance-roquette.

[L.4] LOVE & THEATEROù les histoires vivent. Découvrez maintenant