Chapitre vingt-deux : Maya

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Notre première fois, notre deuxième fois dans sa maison sur pilotis, notre troisième fois sur le sol de la salle de bain ou notre dernière fois à Chicago tourne en rond dans ma tête. Il y a aussi les moments comme la soirée de ses parents, sa promesse sur le toit de l'entrepôt ou ses yeux quand il me regarde dans une robe.

    Ça va faire un mois que je suis là. Un mois chez mon père. Un mois à errer dans sa maison sans pouvoir en sortir. Un mois sans communication vers l'extérieur. Un mois où j'assiste en silence aux repas. Un mois où je ne parle pas et me terre dans mon coin.

    Je continue de cacher le collier que je cache sous mon tee-shirt trop grand. Je récupère les anciens habits de ma sœur. On n'a pas la même carrure et même si on l'avait, on est loin d'avoir le même corps. Je nage dans ses habits, ses pantalons se transforment en pantalons trois-quart et ses tee-shirts en... tee-shirt trop petits. Heureusement que je nage dedans.

    Je me terre dans ma chambre. Au final, j'apprends à vivre avec ce milieu. Mon père n'est pas venu me parler. Il m'ignore comme si je l'avais trahi. Il pense que je l'ai trahi mais c'est faux. A aucun moment, je n'avais pensé à Joanne autrement que comme un pion sur lequel m'appuyer pour arriver à mes fins.

    Je regarde la bouteille de javel entre mes jambes. Si quelqu'un rentre, il croira que je suis en train de laver un crime. Je lui dirai que j'ai vomi, ça passe toujours comme une lettre à la poste.

    Si j'ai bien acquis quelques automates à force de travailler pour le FBI et la famille Jones, c'est de toujours se méfier de son prochain, même le plus proche. La preuve, je suis là. J'avais dispersé une ou deux bombes dans le château de William Jones, juste un effet de surprise et une panique générale. Heureusement, la nuit, Joanne dort comme un mort. Alors dans la salle de bain, j'ai pu récupérer des produits de nettoyage, puis les balles de son arme. J'ai enlevé la poudre, fait un petit cocktail que j'ai simplement programmé pour exploser à distance. Le plus dur, ça a été de récupérer des téléphones mais les employés sont aveugles et personne n'oserait avouer s'être fait volé son téléphone devant William Jones.

    Joanne se lève aux aurores, les employés étaient encore en train de mettre la table ou de nettoyer certaines parties communes. Sans compter, le bureau dans lequel j'ai eu le droit à quelques coups de bâton. Celui-là regorgeait de téléphones dans un tiroir. Heureusement, je portais des vêtements amples et je pouvais facilement les cacher. Entre mes balades nocturnes et mes confections de bombes artisanales, ma sortie s'est faite de façon magistrale. Personne ne pouvait me suivre. Ils ont été contraints de me laisser partir. Si j'arrive à contraindre la famille Jones, j'arriverai à me protéger dans cette maison.

    Joanne avait raison. Je n'ai plus envie de mourir. Je veux me battre. Pour Kate, pour Hannah et pour Matt. Je crois que j'ai envie de vivre, de lutter. Je crois que j'ai envie d'espérer à un avenir meilleur.

    Quelqu'un frappe à la porte. Je referme soigneusement la bouteille de javel, je la replace dans le placard de la salle de bain avant de me lever.

    La porte s'ouvre. Dimitri apparaît, son arme dans le dos, un costume parfaitement entretenu. Il me regarde comme si j'étais une tache sur sa chemise trop blanche, avec dénigrement.

- Tu es attendue dans le salon.


    Je souris. Mon père veut me voir. Mon père a des projets. Si tel est le cas, alors soit je sors, soit je meurs. La liberté a un goût d'eau de mer. Il faut toujours faire un sacrifice pour l'obtenir et mon père en est parfaitement conscient.

    Je le suis. On traverse ma chambre, le couloir, les escaliers pour arriver dans un salon parfaitement entretenu. Des hommes sont postés dans chaque coin. Il n'y a pas d'armes qui traînent. Je pourrais me servir du pic et de la pince en acier normalement utilisés pour la cheminée.

[L.4] LOVE & THEATEROnde histórias criam vida. Descubra agora