Chapitre 4

410 60 24
                                    

Ascelin avait attendu patiemment et sans un mot que la brunette reprenne son calme avant d'entrer dans le bureau d'Armel.

Ce dernier avait haussé les sourcils en voyant le jeune homme entrer avec l'étudiante, mais sembla comprendre la situation en voyant le regard que lui avait lancé le blond. Il s'arma d'un chaleureux sourire :

— Bonjour Elwina.

Il observait devant lui une jeune adulte qui paraissait tout juste sortir de l'adolescence, plutôt jolie. La tignasse noire ondulée qui lui servait de cheveux était tenue en une épaisse queue de cheval qui tombait sur ses épaules.

Elle semblait redoubler d'effort pour lever le menton et l'observer à son tour, lui, un cinquantenaire d'apparence tout à fait lambda, à la peau noire et aux cheveux poivre-sel.

Armel sentit, sans aucune difficulté, la peur et l'angoisse flotter autours de la nouvelle venue. Et d'où elles venaient : d'eux. Des ados qu'elle avait probablement croisés dans le couloir. De lui, qui devait lui paraître étouffant. Et d'Ascelin qui, planté derrière elle, avait les deux mains posées sur ses épaules.

Elwina forçait son corps à rester sans bouger. Surtout, ne pas sursauter. Ne pas frissonner. Se montrer forte. Malgré tout, elle ne put s'empêcher de rouler des yeux en sentant le contact de son colocataire. Car il était actuellement son point d'ancrage, immense paradoxe avec la dangerosité qu'elle sentait en lui sans savoir ni comprendre pourquoi.

— Tu peux t'asseoir.

Elle s'exécuta.

— Je m'appelle Armel, comme on a déjà dû te le dire, tu peux interpréter mon rôle comme responsable du quartier Bleiz. Un sous-maire, en quelque sorte. Chaque quartier de Kerdoueziou possède un délégué comme moi. Nous gérons notre territoire, si je puis dire ainsi, et mettons tout en œuvre pour le bien-être de chacun et l'harmonie dans toute la ville. C'est pour ça que j'ai demandé à te voir. Je tiens à connaître tous ceux qui se trouvent sous ma direction.

Il avait parlé doucement, retenant en lui la moindre miette de charisme ou autre concept qui aurait pu heurter la sensibilité de la jeune fille et d'avantage l'effrayer.

— Où étais-tu avant de venir ici ?

— Je suis en appartement depuis ma majorité. Seule. J'ai vécu en famille d'accueil avant, de mes quinze à mes dix-huit ans.

Elle avait bien appuyé sur le mot « seule », qui lui tenait visiblement à cœur.

— Quelle fac ?

— Art. Je recommence les cours le cinq septembre.

— Pourquoi avoir quitté ton appartement ?

Elwina gigotait sur sa chaise, comprenant que cet entretien allait continuer sur ce format question-réponse. Pour quelqu'un qui n'aimait pas parler d'elle, la jeune femme allait être servie.

— Berhed m'a employée. J'ai besoin d'un salaire pour payer mes études.

Armel acquiesça, et continua :

— Tu l'as rencontrée ?

— Oui.

— Une femme super, n'est-ce-pas ?

— En effet. Avait-elle répondu en souriant sincèrement, se rappelant à quel point elle s'était sentie bien dans la bibliothèque. Contrairement à ici.

— Tu te plais chez nous pour l'instant ?

— Oui, ça va. Elle lâcha un nouveau sourire pour se montrer convaincante. J'ai grandi dans la campagne aux alentours, enfant.

La malédiction des chats noirsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant