Chapitre 21

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— Merci, pour le lait.

Ascelin avait levé les yeux vers son interlocutrice, étonné. Depuis le déjeuner de la veille, Elwina n'était pas redescendue de sa chambre. Il le savait, parce qu'il était resté à la maison tout le restant de la journée.

— De rien.

Quelque chose de doux enveloppait son cœur, là, à l'intérieur de lui. Alors, il ne s'était pas trompé : le lait tiède, à la chantilly, avec une seule cuillère à café de sucre, était bien la boisson préférée de l'étudiante.

— Pourquoi tu as fait ça ? On ne s'apprécie même pas.

Le blond avait haussé les épaules, peu déstabilisé par cette remarque débordante de franchise, avant de répondre :

— Je ne suis pas sûr de ne pas t'apprécier, Elwina.

Et sur ces mots, il avait quitté la pièce, laissant la jeune femme déstabilisée. Comment ça, il l'appréciait peut-être ? Ni lui, ni elle, n'avaient œuvrés pour que ce soit le cas ! Au contraire, d'ailleurs. Et surtout, elle ne voulait pas qu'il l'apprécie.

C'est vrai qu'elle avait été un peu touchée par sa petite attention de la veille. Enfin, intriguée serait un mot plus adapté, car en réalité jamais personne ne lui avait fait un tel acte de gentillesse, aussi infime soit-il.

Ascelin, de son côté, disait vrai : jusqu'ici, il ne la détestait pas. Il n'avait juste aucune envie de lui faire du mal, et c'était davantage son expérience que ses affects qui avaient guidé ses actes. Mais en découvrant que la brunette n'avait eu aucun problème avec le contact de son aura, les choses avaient changé du tout au tout. Il ne savait plus quoi penser, et espérait fortement que l'entrevue avec Berhed de ce matin allait l'aider à remettre ses idées au clair.

Leur rendez-vous chez la bibliothécaire était fixé à dix heures trente, et le garçon y arriva sans une minute de retard. Comme d'habitude, la petite clochette avait tinté, annonçant son entrée dans le bâtiment. Brehed était arrivée presque immédiatement :

— Tu es le dernier, allez, viens, viens.

Le blond avait froncé les sourcils. Le dernier ? Il ne devait y avoir qu'Armel et lui, pourtant...

La bibliothèque était vide, et la vieille femme l'avait entraîné dans un coin du rez-de-chaussée, probablement là où se trouvaient les archives généalogiques d'Elwina. Et c'est avec surprise qu'il découvrit, assis autour d'une table, non seulement Armel mais aussi Maël et Lou. Le blond s'était immédiatement arrêté, analysant la situation non sans cacher sa surprise.

— Ascelin, assieds-toi je t'en prie.

Le jeune homme s'était exécuté docilement, pour s'installer face à Lou. Le rouquin semblait tout particulièrement nerveux, et lui avait jeté plusieurs regards craintifs depuis le début. Berhed prit place à son tour, lissa son tablier, et lança :

— Bien. Permettez-moi de replacer le contexte. Vous deux, avait-elle dit en pointant Armel et son poulain, vous êtes venus me voir afin d'en connaître plus au sujet de la famille d'Elwina, après ce qui s'est passé à l'équinoxe. Et vous deux —cette fois-ci, elle s'était tournée vers le rouquin et son supérieur— vous êtes venus parce que mon petit Louarn a quelque chose de troublant à nous dire concernant ma nouvelle employée. Alors nous allons tout mettre en commun, afin de jouer cartes sur table, parce que cette affaire concerne l'ensemble du village.

Ascelin avait les yeux fixés sur le gringalet, assis face à lui. La curiosité le piquait : qu'est-ce qu'il allait bien pouvoir leur révéler ? C'est Maël, qui avait alors pris la parole :

La malédiction des chats noirsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant