Chapitre 41

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Jeudi. Se lever. Aller en cours. Prendre le bus. Travailler à la bibliothèque. Faire semblant.

Faire semblant de ne pas entendre, sentir, voir, davantage que tous les autres humains. Faire semblant de ne pas s'intéresser aux auras multicolores qui se fondaient dans l'air. Faire semblant d'être quelqu'un d'autre. Elwina n'aurait jamais imaginé devoir faire ça un jour.

La jeune femme avait posé assez de questions à Poséidon et Roméo sur l'Autre Monde, pour savoir quelles capacités elle devait dissimuler, afin que personne ne devine qu'elle était une métamorphe.

Ascelin, quant à lui, n'avait pas donné signe de vie, et la brunette n'avait aucune idée des raisons de sa disparition.

Alors qu'elle était en train d'ordonner la caisse, l'étudiante avait entendu la cloche sonner, sans s'en préoccuper davantage. Foutue cloche. Elle l'entendait tant que parfois son bruit strident tournait en boucle dans sa tête, la nuit. L'étudiante se demandait si quiconque regretterait sa présence, si elle décidait de la déloger un beau jour.

Le blond s'était posté face à elle, sans un bruit, et Elwina sur que c'était lui a l'odeur. Calmement, la jeune femme avait relevé la tête d'un air sévère, appréciant peu la manière dont elle s'était sentie abandonnée durant cette semaine. Alors qu'elle n'avait jamais autant eu besoin de quelqu'un. 

Ascelin ne s'était pas excusé. Au lieu de ça, le loup-garou avait sondé la pièce du regard, tout en humant l'air. Il cherchait quelqu'un, visiblement, et parut satisfait. En effet, Berhed était absente, et il n'avait plus qu'à attendre la fermeture de la bibliothèque pour se retrouver seule avec Elwina.

Sans s'expliquer, le garçon avait sorti un livre de son sac, et était parti s'asseoir dans un canapé, faisant fuir les deux enfants qui s'y trouvaient déjà.

Il était resté là toute l'après-midi, jusqu'à être le dernier client. La dernière personne à partir avant lui était une femme, qui venait ici tous les jeudis. Elwina s'était toujours sentie envoûtée par elle, et devinait à présent que c'était un vampire.

La brunette s'était dirigée vers Ascelin, prête à le mettre dehors, mais ce dernier s'était levé avant même qu'elle n'ait eu le temps de lui adresser la parole.

— Tu leur as dit ?

Elwina avait compris qu'il parlait de Poséidon et Roméo, et avait acquiescé. Puis, changeant de sujet, la brunette avait lancé :

— Tu as mal, quand tu te transformes ?

Elle mourrait d'envie de savoir si les conditions de sa métamorphose étaient similaires aux siennes.

— Plus maintenant, le corps s'habitue.

— Tu changes quand tu veux ?

— Oui.

Elle avait insisté du regard.

Il lui fallait des preuves, toujours plus de preuves.

Face à elle, Ascelin avait haussé le sourcil gauche, avant de se diriger vers la porte d'entrée et la verrouiller. Puis, sans crier gare, il avait enlevé son sweat. Ses chaussures. Son tee-shirt. Tous ses vêtements jusqu'à se retrouver en boxer.

— Ils peuvent se déchirer. Avait-il expliqué tout en pliant ses habits sur une chaise. Fascinée, Elwina n'avait même pas détourné du regard. Elle le fixait toujours autant lorsque, plongeant ses yeux bleus dans les siens, il avait commencé sa transformation. Cela dura quelques instants, quelques secondes suspendues dans le temps, et un loup beige était apparu devant elle. Les tons de sa robe reprenaient ceux des cheveux humains du jeune homme.

La malédiction des chats noirsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant