Chapitre 13

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— Elwina-c'est-tout.

La brunette n'aurait su dire si Poséidon avait chantonné son prénom, ou si elle l'avait imaginé le faire. Cependant, elle pouvait affirmer sans hésiter son envie d'enfoncer son poing dans son visage trop parfait.

Elle ne s'était pas retournée pour lui répondre, et marchait d'un pas décidé vers son arrêt de bus. Voir le jeune homme ce matin avait été largement suffisant à son goût, et elle n'avait aucune envie de parler avec cet étrange personnage pour la deuxième fois de la journée.

Mais avant qu'elle n'ait pu le fuir, le jeune homme l'avait attrapé par l'épaule, pour la forcer à se retourner vers lui. Le pseudo-dieu grec n'appréciait visiblement pas qu'on l'ignore : son irritation se sentait à plein nez. Elwina s'apprêtait à lui lancer une remarque sanglante, mais fut coupée en plein fouet dans sa tirade en voyant que le brun n'était pas seul.

Si Poséidon était grand, brun, remplis de testostérone et de muscles jusqu'au bout des ongles, son compagnon était tout le contraire.

Visiblement ravis que la jeune femme ne parle pas, le brun avait repris :

— Roméo, je te présente notre nouvelle petite incruste du quartier Bleiz.

— Enchanté, Elwina.

Il lui tendait une main tatouée, dans un adorable demi-sourire. La jeune femme avait presque envie de lui sourire en retour, mais se retint.

Un étrange élan de bien-être la saisit alors que leurs doigts entraient en contact. La brunette frissonna, perturbée, et remit rapidement ses mains dans ses poches.

— Tu rentres en bus ? Nous pouvons te ramener en voiture. Avait alors proposé Poséidon. La jeune femme faillit dire non, mais se souvint des transports en communs bondés à cette heure-ci, si bien qu'on avait à peine la place d'ouvrir et de fermer les portes. Elle grimaça à cette idée et accepta l'offre, à contre-cœur.

Le trajet se fit dans un silence gênant, qui convint parfaitement à Elwina. Elle n'avait aucune envie d'entretenir une conversation, qui s'annonçait d'avance ennuyeuse. La jeune femme était bien trop occupée à contempler curieusement le conducteur.

Roméo était... l'anti-héros par excellence. Ou le gentil garçon qui se cachait derrière une couverture de mauvais garçon. Roméo était celui dont on tombait amoureux au premier regard seulement.

Il avait les cheveux blancs. D'un blanc qui reflétait le soleil, mal coiffés, raides, et dont les mèches les plus longues tombaient jusqu'au bas de sa nuque. C'était sûrement une teinture, qui lui allait à merveille, et ne laissait aucune trace de sa vraie couleur.

Et ses yeux... ses yeux aussi, étaient blancs. Enfin, presque : en réalité, ils étaient bleus. Du bleu le plus clair qui lui avait été donné de voir auparavant, dépourvu de la moindre trace de pigmentation.

Sa peau était blanche, d'un blanc crémeux et sans imperfection, qu'elle mourrait d'envie de toucher pour en palper la douceur. Sur son cou et ses mains, les seules parcelles de son corps que ses habits laissaient à découvert, apparaissaient de nombreux tatouages noirs, qui semblaient plutôt tendre au style patchwork.

— Je te dépose où, Elwina ?

Roméo avait une voix grave. Une voix d'homme. Une voix rauque, la voix de celui qui avait déjà trop vécu.

— Chez Berhed.

Pas un mot de plus. Le silence du conducteur avait le don de la mettre à l'aise, si l'on oubliait les regards incessants que lui jetait Poséidon par le rétroviseur intérieur de la voiture.

La malédiction des chats noirsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant