La malédiction des chats noirs

Chapitre 27

Elwina s'était réveillée en sursaut. Son corps s'était subitement redressé, alors qu'elle prenait une grande inspiration, comme si elle avait tenu cette dernière trop longtemps. Tous ses sens furent subitement agressés, la faisant grimacer. Le bruit ronronnant de l'ordinateur. L'agressivité de la lumière blanche qui trônait au plafond. L'odeur étrange de cheval. Le toucher de siège stérile sur lequel elle se trouvait.

— Oh, doucement, doucement.

Elle n'avait aucune idée de qui était cet homme, face à elle, qui tentait tant bien que mal de la garder allongée. Une migraine atroce l'avait alors saisit, avant même qu'elle puisse se dégager du contact de l'inconnu, et elle avait plaqué les mains contre ses tempes. Les souvenirs lui revinrent simultanément :

La musique.

La mer qui lui parlait.

Les voix.

L'envie de se jeter du haut de ce pont.

Roméo.

Poséidon.

Ascelin.

Il n'y avait plus aucune trace dans l'air de ces chants inhumains. En leurs absences, le silence paraissait si assourdissant que la brunette avait lourdement laissé tomber sa tête sur l'oreiller.

— Elwina, je suis Docteur Robin, le médecin traitant des de Fleuri. Ascelin t'a emmené ici il y a une heure environ, après ton malaise. J'ai besoin de prendre ton pouls, tu permets ?

Non, elle ne permettait pas, mais l'homme n'avait pas attendu sa réponse pour enrouler son matériel autour de son bras, et noter le résultat.

— Il semblerait que tu aies perdu connaissance après un léger épisode hallucinatoire, selon les témoins. Tu confirmes avoir... entendu des voix ? Ne t'inquiète pas, c'est un phénomène totalement explicable, notamment dû au stress...

Le médecin avait continué de parler, mais Elwina ne l'écoutait plus. Elle n'avait qu'une envie : partir d'ici au plus vite.

Un épisode hallucinatoire ? Avait-elle vraiment fait un épisode hallucinatoire ?

Sa tête tournait, et la remémoration de ce qui venait de se passer lui donnait envie de vomir. Elle n'avait qu'un seul désir : partir d'ici au plus vite, se recroqueviller dans son lit, et tout oublier.

— Je veux sortir.

— C'est évident, je ne vais pas vous retenir plus longtemps, vous savez...

Ce médecin parlait beaucoup trop. Et Elwina ne voulait plus entendre quelqu'un parler. Plus personne. Sans même prendre le temps de savoir s'il avait terminé, la brunette s'était fébrilement levée, pour se diriger vers la porte.

Elle voulait partir.

Elle voulait ne jamais être arrivée ici.

Elle voulait ne jamais être venue à Kerdoueziou.

La jeune femme se retrouva dans la salle d'attente du cabinet, où trois silhouettes s'étaient immédiatement jetées sur elle. Ces trois même garçons qui l'avaient sortis en courant du pont, alors qu'elle perdait connaissance. Roméo fut le premier à l'aborder ; d'un air prudent, il avait baissé son visage à sa hauteur pour plonger ses yeux translucides dans les siens :

— Et si tu me racontais ce qu'il s'est passé ?

Il n'y avait rien à raconter. Rien du tout.

Épisode hallucinatoire.

Ce n'était pas d'un médecin, dont elle avait besoin, mais d'un psychiatre.

Au même instant, le docteur Robin arrivait derrière eux :