Chapitre 11

285 50 17
                                    

Personne n'avait accepté de loger Elwina. Berhed et Lou lui avaient répondu qu'ils n'avaient pas envie que le quartier Bleiz leur en veuille de la cacher, et le pire c'est qu'ils avaient l'air sincèrement désolés. Elle était donc rentrée chez elle, le moral dans les baskets.

Elwina ne s'était pas attendue à ce qu'Ascelin vienne lui-même à sa rencontre, devant la maison. La jeune femme se renfrogna à sa vue, morte de honte. Elle rêvait en secret qu'il oublie ce qu'il s'était passé cette nuit. Elle l'avait touché. Pire encore, elle avait pleuré contre lui, et l'avait laissé la consoler.

Et elle avait aimé ça : la manière dont il l'avait serré dans ses bras, comme si elle était la chose la plus précieuse du monde. Une boule se forma dans sa gorge à cette idée, et la voix masculine parvenant à ses oreilles n'arrangea pas les choses :

— Prend tes affaires, je t'emmène dormir autre part.

Une colère soudaine s'empara d'elle, alors qu'elle plongeait ses yeux noirs dans les siens :

— Ah oui ?

Elle aurait voulu lui hurler dessus qu'elle le détestait, qu'elle refusait d'être traitée comme une petite chose sans défense, que c'était à cause de lui et ses foutus proches si personne n'avait voulu l'accueillir pour la nuit. Mais la brunette n'en fit rien, laissant à son interlocuteur le loisir de s'expliquer :

— Je ne supporte pas le bruit incessant de ces sales gosses. J'ai un appartement, dans le manoir. Il y a assez de place pour deux.

Il avait terminé sa phrase en haussant les épaules, et tournait déjà les talons, n'attendant même pas une réponse de sa part.

Il était hors de question qu'elle accepte. Déjà, parce que le garçon la faisait toujours autant flipper que ses cousins prépubères. Ensuite, parce que céder à cet air arrogant dont il s'était vêtu n'allait que le conforter dans son comportement de connard. La jeune femme se faufila donc jusqu'à sa chambre, prenant soin d'éviter tout le monde.

Hélas, quinze minutes plus tard, elle entendit quelqu'un toquer à sa porte. Ce n'était pourtant pas l'heure du dîner. La brunette vint ouvrir et se trouva nez à nez, à son grand désespoir, avec Ascelin :

— Tu viens ?

Il avait parlé d'une voix froide et impatiente. Et elle allait lui refermer la porte au nez sans plus d'efforts, quand les gloussements mesquins des deux adolescents de malheurs lui parvinrent du rez-de-chaussée. Les parents de ces derniers s'étaient platement excusés, le matin même, mais ça n'avait pas suffi à faire disparaître le sentiment d'insécurité de la jeune femme. Elle perdit toute son assurance, tandis que le visage de son interlocuteur se crispait.

— J'arrive. Grommela-t-elle tout en saisissant son sac de cours, dans lequel elle fourra une tenue de rechange, son pyjama, et sa trousse de toilette. Quelques minutes plus tard, ils se dirigeaient sans un mot vers le manoir. La boule qui était déjà présente dans le creux de son ventre semblait doubler de volume à chaque pas. La dernière fois qu'Elwina avait posé les pieds là-bas, elle avait bien failli se faire agresser par une bande de jeunes.

Décidément, elle n'avait pas de chance avec les adolescents.

Sentant sa tension, le blond avait tenté de poser ses mains sur ses épaules d'un geste rassurant, mais elle l'avait brutalement dégagé. Son contact ne faisait qu'empirer la situation. Elle avait le sentiment de se jeter tout droit dans la gueule du loup, et commençait presque à regretter son choix.

Heureusement, ils ne croisèrent personne dans le manoir. Elle avait même l'impression qu'on la fuyait, car les gens changeaient tous de direction quand ils les apercevaient. Soit c'était un enchaînement de circonstances, soit c'était que le statut d'Ascelin comme poulain d'Armel en intimidait plus d'un.

La malédiction des chats noirsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant