Chapitre 34

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La pleine lune allait arriver, et Elwina sentait déjà son animal intérieur s'agiter. Cela ne disait rien qui vaille, et l'angoisse de perdre le contrôle avait déjà commencé à lui nouer les entrailles.

Roméo avait dû le remarquer, en ce lundi, alors qu'il revenait tout juste du campus. Il n'y avait pas de places de parking disponibles, à côté de la bibliothèque-café, et le conducteur avait donc dû se garer un peu plus loin dans le centre-ville.

— Tu as un examen qui arrive ?

La brunette avait observé son interlocuteur en plissant les yeux, ne comprenant pas bien pourquoi il lui posait cette question. Le jeune homme avait immédiatement développé :

— Tu as l'air stressé comme jamais. Tu vas bien ?

— C'est la fatigue.

Le jeune professeur allait renchérir, mais c'est à ce moment-là que Wi fit son apparition. Elwina ne l'avait même pas senti venir. Roméo sourit doucement, et s'accroupit à la hauteur de l'animal.

— Salut, toi.

Puis, relevant la tête vers la brunette, il avait continué :

— Ton chat te suit vraiment partout, dis-moi.

Il avait tendu la main vers la féline, essayant de la caresser pour la première fois. Cependant, n'appréciant pas l'idée, cette dernière avait violemment craché, tout en donnant un coup de griffe en direction du garçon. Elwina s'était rendue compte avec horreur que si Roméo n'avait pas eu le prompt réflexe de retirer sa main, il saignerait probablement à l'heure actuelle. Jusqu'ici, Wi n'était jamais entrée en contact avec quelqu'un d'autre qu'elle ou sa grand-mère, que ce soit autant par une caresse que par une altercation.

« Ne laisse jamais personne découvrir ce qu'elle cache. » Lui avait dit son aïeule.

Elle venait, littéralement, de frôler la catastrophe.

— Elle n'aime vraiment pas les gens. Avait grommelé Roméo, qui ne s'était pas rendu compte de l'état de son interlocutrice.

— Elle est toujours aussi agressive ?

— Non.

Sa réponse était sortie toute seule, et peu à peu Elwina avait froncé les sourcils, tout en prenant conscience de la situation.

Non, ceci n'était pas le comportement normal de Wi. Depuis sa plus tendre enfance, la féline fuyait tout individu. Elle pouvait rouler du dos et cracher, à la limite, pour faire peur aux plus téméraires. Mais elle n'était jamais allée jusqu'à vouloir mordre ou griffer quelqu'un.

Un frisson lui parcourut l'échine.

Ça n'était pas Wi, qui se reflétait à travers ce comportement. C'était elle.

D'un seul coup, Elwina se souvenait des dernières semaines. De sa féline qui avait peu à peu montré des signes d'agressivité, d'une manière si progressive que ça lui avait paru tout à fait normal. Avant, la chatte se défoulait lors des nuits de pleine lune, seulement.

Ces derniers temps, c'était tous les jours qu'Elwina voyait sa peau entaillée par quelques griffures ou morsures.

— On dit que les animaux ressentent l'état affectif de leurs maîtres. Ton chat est peut-être affecté par le tien. Tu as l'air à fleur de peau, ces temps-ci.

La tête d'Elwina tournait. Non, en réalité, c'était le monde entier qui semblait tourner autour d'elle. La rue se distordait, les voitures se recroquevillaient, le sol s'éloignait soudainement de ses pieds. Elwina dut s'appuyer sur le mur le plus proche pour retrouver son équilibre, et ses esprits.

La malédiction des chats noirsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant