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Deux mois s'étaient déjà écoulés depuis cette horrible soirée. Si j'ai bonne mémoire, nous étions le 23 décembre. Et comme par hasard, Charly avait une petite surprise pour toutes les filles de La Casa. Raison pour laquelle il nous avait toutes réunies de bon matin.
- Du calme mesdemoiselles. Comme vous le savez toutes, cette semaine vous êtes libres. Et c'est pourquoi j'ai décidé d'organiser une petite virée à Arteaga. Pour celles qui n'ont jamais eu l'occasion de voir la neige, vous serez émerveillées de découvrir les dunes de glaces, les pistes de ski, les géants sapins et bien sûr de magnifiques et chaleureux chalets.  Apprêtez-vous toutes et on se retrouve ici dans deux heures de temps. Équipez vous parce que le voyage risque de durer une demi journée au moins. Vous pouvez vous retirer.
        Les filles semblaient super contentes. Ça nous ferait des vacances. L'atmosphère de la villa commençait déjà à m'étouffer. Nous nous dispersions chacune pour rejoindre nos colocations lorsque Charly m'interpella.
- Ah te voilà enfin Kara. Je tenais à te dire que tu ne nous accompagneras pas.
- Non mais tu délires ou quoi Charly ?
- Non, jeune fille. Tu vas passer ta semaine avec le patron. Il enverra un de ses chauffeurs te chercher plus tard.
- Rassure moi que c'est un prank que tu m'fais là. Je te jure, j'ai failli y croire une seconde. Bien joué!
- Je suis sérieux Kara.
- Comment ça ? Et mon avis à moi il compte pas? Oh bien sûr personne n'a besoin de l'avis de la sale gamine qui se dandine à moitié nue dans un club rempli de vieux porcs. Charly t'as oublié la dernière fois? T'as oublié qu'il m'a humiliée limite insultée?
- C'était aussi en partie de ta faute. Cette fois-ci, je crois qu'il veut faire les choses bien.
- Tu crois? Laisse moi rire. Une pourriture reste une pourriture.
- T'as pas idée de la chance que tu as, Kara. Le patron n'a jamais suivi une fille d'aussi près et j'ajoute qu'au grand jamais, il n'a invité l'une des filles ici plus d'une fois. Si c'est bien ce que je pense, ne le déçois pas et ne te déçois pas.
- Ah parce que maintenant je dois me réjouir qu'un pauvre type m'invite une seconde fois pour me foutre la honte de ma vie? Une vermine qui n'a aucune idée de ce que c'est que la dignité. C'est plutôt toi qui me déçoit, Charly.
- Ce que tu oublies, c'est que tout le monde ne peut pas voir la vie sous le même angle que toi très chère.
- Et c'est ce que je trouve bien dommage.
- Sois prête à 1h de l'après-midi. Nous serons déjà partis mais les gorilles t'auront à l'œil. Je préviendrai Scott pour qu'il t'informe dès que le chauffeur arrive. Je te souhaite une bonne semaine et joyeux Noël à l'avance.
             Je ne voulais pas en dire plus et de toute façon, mon avis autant que celui des autres filles n'a jamais compté sinon nous n'en serions pas là.  Je me contentai juste de souhaiter réciproquement un joyeux Noël à Charly avant de disposer.
        Lorsque je rejoignis ma chambre, j'expliquai à Asha la situation et elle ne s'y prononça que brièvement dessus. L'heure vint où les filles devaient embarquer. Suite à de vives "au revoir" et de prompts vœux de Navidad, elles s'en allèrent heureuses , à mon inverse...
        J'étais seule à présent et le temps filait. En un éclair, il sonna 13h. Bien alors! Scott, l'un des gorilles de la propriété vint m'annoncer l'arrivée du chauffeur. J'embarquai les mains vides, juste vêtue d'un large jogging gris assorti à un sweat zippé qui recouvrait un débardeur blanc...
                                 *
Au bout d'un moment, la voiture s'arrêta devant une géant immeuble. Je n'avais jamais vu de près un si grand bâtiment auparavant. Un homme en costard dont j'ignorais l'identité vint m'ouvrir la portière. Je le remerciai infiniment puis il m'escorta à l'intérieur. La salle de réception était vaste et aérée. Je n'avais juste pas les mots pour juger de toute son esthétique. L'homme qui m'escortait me confia à un autre homme, cette fois-ci moins professionnel. Celui-ci avait l'air plus ou moins jeune. Il avait de beaux yeux bridés et une queue de cheval moyenne qui pendouillait à l'arrière de sa tête. Il était habillé dans un style peu commun, à la mode parisienne. Il se comporta poliment avec moi, me laissant accéder à l'ascenseur la première. Il actionna le bouton et je pus constater qu'on se dirigeait au 18ème étage. Le trajet promettait d'être long et tout semblait bien calme. L'inconnu brisa le silence qui régnait.
- Alors, c'est vous la fameuse Kara.
- Euh oui, hésitai-je à répondre. Comment vous connaissez mon prénom?
- Je l'ai juste deviné.
- Qui êtes-vous? Un ami de Salvatore?
- À votre place, je ne poserais pas toutes ces questions.
- Au moins, dites moi comment vous vous appelez.
-Jerry. Ravie de faire votre connaissance, dit-il en me tendant la main.
      Je la lui serrai après une longue réflexion.
- De même, repris-je.
       L'élévateur s'arrêta et s'ouvrît. Nous en sortîmes et Jerry m'emmena jusqu'à une porte où un gorille séjournait déjà. Il me fit entrer et me demanda de faire comme si j'étais chez moi. Après cela, il disparut...
C'était un vaste et beau penthouse. Le sol était tapissé d'une blancheur inégalable. Je me demandais presque si je ne salirais pas le plancher en y posant mes pieds. Les murs étaient peints en blanc et n'occupaient que les trois quarts de la pièce. Quelques baies vitrées s'imposèrent entre les masses de béton et là, non loin une cuisine totalement aménagée. Quelques lustres sombres décoraient le plafond vitré. Je n'arrivais juste pas à en croire mes yeux. Je pouvais vraiment me voir dans le plafond. Je m'avançai, au milieu de la pièce où étaient alignés en rectangle des canapés noirs apparemment très confortables et entourant une table basse en verre. Juste devant, un écran plat aussi grand qu'une projection de cinéma se dressait. Des escaliers s'étalèrent d'un côté de l'appartement, menant vers une destination inconnue. Il y avait par contre une gigantesque baie vitrée, loin à droite offrant une vue incroyable sur la ville de Mexico mais menant également à un balcon auquel je n'avais pas accès et qui était constitué d'un espace vert et d'un immense jacuzzi. J'étais émerveillée par ce paysage aux milles lueurs. J'observais la ville, froide et gigantesque par ce temps d'hiver qui semblait pourtant être un printemps américain. Je refaisais le vide dans ma tête et je me posais des questions. Pourquoi voulait-il me voir? Enfin, au point d'en vouloir passer la semaine avec moi? Que pouvait bien dire Charly par ses propos de ce matin? Salvatore m'estimerait-il finalement ? Voulait-il s'excuser?
-Rahhh! grognai-je sur le point de m'arracher les cheveux.
     Je n'avais plus les idées en place. J'allai m'asseoir dans le canapé, tâchant de ne pas le salir ou l'abîmer. Puis, je ne sus comment Morphée vint s'emparer de moi...

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