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     L'endroit était absolument magnifique. De grands sapins s'érigèrent dans des angles et les baies vitrées situées à hauteur filtraient les rayons lunaires. De géants lustres voltigeaient au dessus de nos têtes et la grande salle grouillait de monde. Il y avait beaucoup plus d'enfants que ce que je pouvais m'imaginer et que dire de la décoration mixte partagée entre les couleurs de Noël, le rouge, le blanc et le vert sapin. Un couple s'avança vers nous alors que nous nous dirigions vers le buffet étalé sur une dizaine de mètres au moins. L'homme était vêtu d'un smoking tout aussi noir que celui de Salvatore. Il était blond et très imposant. Sa compagne quant à elle vêtait un ensemble blanc, une longue jupe profondément fendue sur le côté et un haut très osé, laissant à découvert ses clavicules et sa poitrine généreuse. Elle affichait un grand sourire de mannequin et n'avait que d'yeux pour Salvatore. Je me serais bien demandée la raison pour laquelle elle le regardait de cette façon mais je pense que je ferais mieux de n'en rien savoir, enfin pour l'instant. L'homme quant à lui me reluquait de haut en bas comme s'il eut vu un extraterrestre. J'étais à vrai dire légèrement gênée. Il finit par parler.
- Ça fait un bail Salvatore. Qui nous ramènes-tu là? Mademoiselle...?
- K..., commençai-je sans jamais terminer.
- Ça ne te regarde en rien Kevin, reprit Salvatore, agacé.
- Suzie chérie, tu peux faire visiter le domaine à la demoiselle pendant que Don Salvatore et moi parlons un instant? se tourna le dénommé Kevin à son épouse.
- D'accord chéri , fit-elle en quittant le bras de son conjoint après le lui avoir caressé tendrement et ouvertement.

Elle m'arracha ensuite des bras de Salvatore comme si elle n'eut attendu ce moment que depuis le début de la conversation voire depuis sa naissance.
- Elle ne bouge pas, me retînt Salvatore.
- À moins que tu veuilles qu'elle sache qui tu es vraiment, parrain! menaça Kevin.
Je regardais Salvatore pleine d'incompréhension et il semblait cogiter. Il nous ordonna de nous en aller au bout d'un moment.
Nous partîmes après avoir attrapé deux coupes de champagne chez un traiteur déambulant, emportées par l'agréable sonorisation de l'orchestre qui animait la galerie. Mais, à l'inverse de Suzie, j'étais loin d'être l'esprit tranquille...
*
[Salvatore]
Nous avions rejoint la terrasse logée au premier étage pour discuter calmement. Je m'impatientais qu'il commence son discours.
- Alors comme ça, t'as vraiment couché avec ma femme?
Je le regardais , inerte. Il continua:
- C'est vrai, espèce d'enfoiré?
J'étais taciturne. Et vraiment, si ce con était là pour me faire avouer cela, autant interroger tous les autres membres de la Familia qui ne s'étaient pas eux non plus gênés pour obtenir les petits services de sa pute d'épouse. Suzie était ce genre de femme, insatiable et sans aucune personnalité. Elle n'était pas destinée à un homme comme Kevin qui n'était pas capable d'assouvir à ses désirs sexuels. Il attrapa soudain le col de ma chemise et à ce moment, je pus me forcer à lui faire entendre deux mots.
- Lâche-moi.
- Tu te crois tout permis n'est-ce pas?
Un rire moqueur m'échappa.
- Tu oublies qui je suis? fulminai-je.
Il me fixa longuement, le regard rempli de dédain et les dents serrées avant de me relâcher. Je réarrangeai mon col et je terminai la conversation sur un : Commence à faire tes adieux à ta famille. Puis, je le laissai là, seul à réfléchir au sort qu'il s'était auto-infligé.

*
[Kara]
Dix minutes déjà que mes pensées sont dispersées. Je me demandais bien de quoi Salvatore pouvait discuter avec cet homme. De notre côté à nous, rien d'intéressant ne se passait. Suzie n'osait guère m'adresser la parole. Par contre, elle kiffait bien enchaîner des shots sur shots. J'aperçus au bout d'un moment Salvatore qui venait en notre direction et mon visage s'illumina de gaieté.

La main de Suzie se posa sur mon avant-bras. Ce qui me dit détourner le regard de mon compagnon. Elle se pencha sur moi et me chuchota:
- Ah j't'avais pas dit! Tu vois ce bel homme qui vient là, désigna-t-elle du menton Salvatore, c'était mon amant. Il a une de ces fougues dans ses couilles, hmm...j'te fais pas dire.
Il se produisit un déclic dans ma tête. L'odeur âcre de l'alcool que dégageait Suzie assaillait mes sens et j'en perdis littéralement le contrôle. Je me libérai aussitôt de l'emprise de sa main et tentais de réguler ma respiration qui s'en allait à la hausse. Je me contenais, tout en la dévisageant. Ma seule envie était de lui arracher ses dents qui lui servaient tant à exposer son sourire de merde. J'avalais difficilement la salive et j'en arrivais à envisager qu'elle ne me racontait que des sottises. Bien sûr! me rassurais-je pour une quelconque raison. Salvatore finit par nous joindre.
- Je vous laisse, s'empressa de dire Suzie tout en jetant un regard qu'elle dut croire sensuel à Salvatore avant de partir.
Je restais silencieuse. Il prit la parole sans tarder.
- Qu'est-ce qu'elle t'a dit?
- Rien d'interessant. Juste que t'as ce p'tit comportement de pute. À ce que je vois, on n'est pas si différents l'un de l'autre, dis-je en le fixant droit dans les yeux.
Il m'attrapa brusquement par la taille puis dans un élan frénétique me ramena vers son corps. Son geste me laissa sans voix mais également extatique. Je regardais ses yeux marrons puis ses lèvres et elles se mirent à bouger pour me faire entendre une voix rauque et dominante:
- C'est bien pour cela que tu me plais chaque jour, de plus en plus.
- Si je te plais autant que tu prétends le dire , prouve-le !
    Il me fixa longuement avant de reprendre :
- Suffit de dire ce que tu veux ma beauté.
     Je le savais bien. Il le savait bien, enfin je crois. Pourquoi me forcer à le lui avouer? Franchement, je ne sus quel démon m'eut possédée à cet instant mais j'avais perdu le contrôle de mes mots ainsi que toute pudicité.
Je vins lui chuchoter à l'oreille:
- Tu le sais déjà et même depuis très longtemps je dirais.
- Un gentleman n'a pas de mémoire, s'imposa-t-il.
- Je ve..., hésitai-je mine de rien, ma conscience voulant reprendre le dessus. Je veux que tu me fasses l'amour.
     Enfin je l'ai dit!

Il répliqua automatiquement, toujours aussi serein et s'inclinant légèrement vers mon oreille:
- Moi je n'fais pas l'amour, señorita. Je baise.
Une décharge électrique parcourut mon corps tout entier et j'eus un moment la chaire de poule. Il se redressa, dégagea ensuite ses mains de ma taille et s'éloigna enfin de moi. Je ressentais à chaque fois ce vide lorsqu'il me touchait puis s'en allait si lâchement. Venais-je donc de m'humilier? Certainement. Je devais paraître très vulgaire dans mes propos. Évidemment , pour la pute que je suis ça ne devrait pas être gênant. Mais le suis-je réellement si je n'ai commis que l'impudicité? Une pute c'est censé coucher avec n'importe qui. Et... Merde! Je m'embrouille.

Je me sentais vraiment bizarre. Je torturais mon esprit de mille et une questions. Je perçus tout à coup un aura m'envahir et un parfum masculin me chatouiller subtilement les narines. J'entendis une voix plus ou moins familière prononcer mon prénom.
- Kara!
Je me retournai aussitôt et je tombai sur le visage de l'homme. C'était Jerry.

ImpostorWhere stories live. Discover now