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Je n'arrivais pas à me décider. J'hésitais entre une robe légère estivale crème et un t-shirt loose combiné à un shorty en denim. Il était vrai que je ferais plus bad bitch dans l'ensemble que j'eus cité en dernier vu les designs apparents à l'avant du large haut . Mais aujourd'hui, je préférerais m'habiller en mode princess. Et me traiter tel.

J'optai donc pour la robe légèrement beige qui était tout à fait sublime. Elle présentait un bas ovale, assez plissé d'une souplesse sans pareille avec un contraste de tissus tropicaux et en même temps très esthétique. Quand au haut de la robe, il dessinait une échancrure en V plus ou moins prononcée et deux lacets jointifs à l'arrière de mon cou. Parfait!

J'attachai mes cheveux de jais aux boucles rebelles en un chignon moyen que je plaquai soigneusement au gel. D'ailleurs, c'était la première fois que ma crinière ne résistait pas à un tel produit. Je devrais en voler toute la réserve avant de me barrer d'ici.

Enfin bref...

Je me parfumai négligemment à une eau de toilette enveloppée dans un flacon iconique à l'effigie d'un buste de femme. L'odeur...

Elle était d'une immaculée puissance incontestable. Ça sentait divinement bon. Avec des soupçons d'essences florales, boisées, ambrées, caramélisées, vanillées. Ce parfum était une véritable fournaise d'exotisme et de sensations.

J'eus l'impression qu'il m'eut dépouillée, caressée tendrement, pénétrée puis rhabillée gracieusement. Il m'avait laissée synesthésique.

J'attrapai une pochette en forme de demi lune dorée même si au final je n'y avais rien mis.

Disons que je ne devais pas manquer l'occasion d'utiliser tout ce qu'il y avait là que ce soient les sacs, les vêtements, les chaussures ou encore les bijoux.

En parlant de bijou, je rajoutai quelques bagues à mes doigts fins puis de grosses paires de clips d'oreilles assortis à ma pochette.
Je sais. On n'allait faire que du shopping. Mais mon petit doigt me disait que la proposition de Viktoria s'en irait au delà. Raison pour laquelle je m'apprêtais en conséquence.

J'ÉTAIS FIN PRÊTE!!

Je rejoignis sans plus tarder Vicky dans le salon. Je la découvris totalement absorbée par la baie vitrée, son chat dans ses bras. Elle était concentrée sur quelque chose et j'ignorais quoi.

Une servante défila vite devant moi en prenant le soin de me souhaiter une belle journée d'une manière très respectueuse.

J'espère qu'elle la sera!

C'est alors que Viktoria se tourna pour tomber sur une Kara calme apparemment mais au fond plus qu'excitée. Je lui souris.
- T'es à tomber par terre! lança-t-elle.
- Merci !
- On peut y aller? s'empressa-t-elle de prendre son sac noir rembourré signé Chanel, comme ses mocassins aux teintes sombres.
- Oui!

Je la suivis, l'entendant me complimenter à maintes reprises sur ma robe, ma morphologie, mes yeux 'fin tout. Moi par contre, je l'admirais énormément. Elle était très confiante et dégageait le luxe à des mètres. Ça se voyait qu'elle était pleine aux as.

Avant que nous ne franchissions la barrière de gardes implantée juste aux grandes portes de la concession, Viktoria dut répondre à des questions interminables.
- Ya que os cuento que el mismo Salvatore me preguntó eso. Si quieres llámalo. (Puisque je vous dis que Salvatore m'a lui même demandé cela. Si vous voulez appelez-le.)

De la frustration commençait à se lire sur son visage. Ça se voyait clairement qu'elle en avait plus qu'assez de cet interrogatoire. Moi aussi d'ailleurs.
- ¡Voy a llamar al jefe! échangea furtivement un regard l'un des trois gardes avec ma compagne.

Il sortit un portable de sa poche puis s'éloigna, arborant la fontaine flanquée au beau milieu du domaine. Il ne revint que quelques instants après, espérant qu'il n'apporte que la confirmation de cet enfoiré.
- ¡Podemos dejarlos ir! ( On peut les laisser partir!) annonça-t-il.

Ses deux autres collègues se jetèrent des œillades confus. Le garde rajouta:
- ¡El jefe confía en la señora Castanon! Así que no tenemos que preocuparnos. (Le patron fait confiance à madame Castanon! Nous n'avons pas à nous inquiéter.)

Ils cédèrent alors, nous laissant passer. Je soupirai de soulagement. Viktoria se tourna vers moi en disant:
- Et maintenant, à nous la liberté!

Elle sautillait presque. Ce qui m'amusait énormément. Nous atteignîmes une berline noire stationnée non loin de la fontaine. Elle cliqueta sur les clés du véhicule, déverrouillant ainsi les portières. Nous nous y engouffrâmes elle et moi à l'avant et son éternelle boule de poile à l'arrière. Elle démarra.

                                *
Nous avions fait des achats. Beaucoup même je dirais. Et comme j'étais aussi fauchée qu'un clou, Vicky dut me payer de son propre argent; même si j'avais insisté pour qu'elle ne le fasse. Elle était très ouverte d'esprit et à la fois gentille. Elle avait également plusieurs qualités que je n'énumèrerai certainement pas.

- Et c'est ainsi que j'ai pris les rênes de l'entreprise familiale, finissait-elle de me raconter le quand et le pourquoi du comment elle était devenue une boss lady.
- Wow. Tu devrais avoir beaucoup de talent pour que ta famille ait décidé de te mettre à la tête des multinationales de ton père.
- Énormément! se jeta-t-elle des fleurs.
- J'ai toujours aimé voir les femmes dans des grands bureaux, occuper des grands postes. Ça m'inspire.
- Je dois le prendre pour un compliment alors? gloussa-t-elle gracieusement.

Le serveur vint poser l'addition sur la table en s'excusant de nous déranger.
Vicky sortit une carte noire de son sac à main. Ce qui me fit écarquiller mes globes oculaires. Le gentil serveur apporta un TPE qu'il utilisa pour extraire l'argent nécessaire. Elle le remercia de son service irréprochable.

- On peut y aller? souffla-t-elle. J'ai encore plein d'autres endroits à te faire visiter.
- Bien-sûr, me levai-je.
- Euh par contre, tu peux prendre les clefs? J'ai une envie pressante.

Elle grimaça. Je lui souris.
- D'accord je t'attends.
- Va t'installer dans la voiture je t'en prie. Je n'en ai pas pour longtemps.

J'acquiesçai, la voyant s'éloigner avec Mr. Puff.

Qui va aux toilettes avec son putain de chat franchement?

Je quittai la table pour me diriger vers la voiture de mon acolyte que je déverrouillai sans problème. Et, lorsque je m'apprêtais à ouvrir la portière, je sentis comme un objet se dresser dans mon dos, nu. Une présence m'avait envahie. Ce n'était pas Viktoria. Je l'aurais vu venir. J'aurais senti son parfum plus qu'agressif. J'écarquillai les yeux, au son de la voix menaçante de l'individu.
- ¡No te muevas! ¡no grites! De lo contrario, te dispararé inmediatamente. (Ne bouge pas! Ne crie pas! Sinon, je te flingue direct.)

Je déglutis en assimilant les paroles assenantes de l'homme qui respirait un peu trop bruyamment dans mon dos.
- ¡Dame las llaves del auto y entra tranquilamente! (File-moi les clefs de la bagnole et rentre calmement à l'intérieur.)

Mon corps grelotait. Il appuya davantage sur la peau à découvert de mon dos avec son arme froide. Je lui tendis les clefs, réticente et sans jamais me retourner. Je me rendis compte à ce moment précis que je tenais un minimum encore à ma pauvre existence. J'avais besoin de vivre. Et encore que je n'avais pas encore pu réaliser tout ce que je m'étais promise de faire à mon retour aux États-Unis. Je devais vivre pour accomplir mon destin.

Sans un mot, je montai à bord du véhicule. L'homme le verrouilla, minimisant mes tentatives de fuite qui s'avéreraient irréfléchies et risquées. Je priais pour que Vicky se pointe là et maintenant, pour que quelqu'un remarque ma détresse. Mais non. Tout le monde vaquait à ses occupations et personne ne calculait personne. Mes mains étaient devenues froides à un tel point où je sentais mon métabolisme ralentir. J'observai mon agresseur, grand, fort et au visage masqué par une vulgaire casquette noire contourner la voiture puis la déverrouiller. Il s'installa derrière le volant, mit le contact, son arme pointée sur ma côte et moi, prisonnière de son influence meurtrière.

ImpostorOù les histoires vivent. Découvrez maintenant