Le Démon (L'Hybride, livre 1)

Chapitre 17.1 : Réception

Contrairement à mes habitudes,

 ce chapitre (beaucoup trop long !) sera divisé en quatre parties.

* * *

Quelques jours plus tard, après avoir apporté à Carole le double de la photo qu'elle lui avait si gentiment confié, Chloé retrouvait le chemin de son appartement. Un beau soleil brillait dans le ciel, et elle opta pour un peu de marche. Depuis qu'elle en avait repris les rênes, Chloé avait le sentiment de passer tout son temps libre au bar. De quoi faire une overdose ! Elle profita donc de l'occasion pour décompresser et renouer avec ses anciennes habitudes.

Revoir la mère de Nicolas lui rappelait inévitablement sa vie avec lui. Par un étrange coup du sort, cela l'aidait aussi à tourner la page. Bien sûr, elle regrettait le temps passé en sa compagnie et déplorait que ces bons moments fussent terminés. Le remord la rongeait toujours au simple souvenir de son geste, et elle ne pouvait se pardonner d'avoir mis fin à sa vie, mais une force la poussait à aller de l'avant. Elle ne pouvait rester bloquée, mettre sa vie sur pause à cause de cette histoire. Les responsabilités de l'Ange ne le lui permettaient pas.

« Avec Darmack sur les talons, tu ne peux t'appesantir sur ton sort. Sous l'influence du Démon, tu as commis des erreurs irréparables, c'est vrai. Mais plutôt que de t'y arrêter et de ne plus avancer, tu dois en tirer ta leçon. »

Chloé prenait l'habitude de ces incursions dans son esprit, de ces paroles qui l'obligeaient à voir chaque situation sous un angle objectif. Elle avait tant souffert de la solitude dans ses plus jeunes années... le changement était radical !

Au début, cette présence constante l'avait agacée. Le temps aidant, elle apprenait à apprécier la sérénité de l'Ange, à prendre en compte ses sages paroles. Sans lui, elle n'aurait sans doute pas pu gérer tous les évènements qui lui étaient tombé dessus ces derniers temps... et s'imaginait sans peine toujours tapie dans son appartement à broyer du noir. Un enfermement qui aurait ruiné l'ouverture du bar, vidé son compte en banque et ouvert la porte à tant d'autres problèmes qu'elle préférait ne pas y songer.

Un courant d'air la tira de ses songes, et elle remarqua que ses pas l'amenaient vers le centre-ville. Sur les pavés des rues piétonnes, elle retrouva une route connue depuis toujours et, plus particulièrement, celle qu'elle avait empruntée chaque jour pour aller au restaurant. À cette heure de l'après-midi, l'établissement était fermé mais il lui rappelait qu'elle n'avait pas contacté Christine depuis trop longtemps. Elle se promit de l'appeler dès son retour.

Autour d'elle, les passants allaient et venaient, se bousculaient, riaient aux éclats, parlaient, s'arrêtaient devant les vitrines, tandis qu'un artiste de rue proposait à qui voulait l'écouter quelques célèbres sonates, jouées avec brio sur son violon. Elle captait des bribes de conversation, dont elle ne se souciait guère en réalité. Touristes ou locaux, Clarme attirait une foule hétéroclite d'individus venant de tous horizons. Cette masse humaine qui arpentait les rues ne se raréfiait qu'au milieu de la nuit, lorsque l'obscurité tombait sur la ville et que les derniers bars et restaurants fermaient boutique.

Une affiche, placardée sur la porte d'un bar, lui rappela que Jérôme ne se produisait pas qu'au P'tit Clarme. Ils n'avaient jamais signé de clause d'exclusivité et, même si elle regrettait de ne pas être la seule à bénéficier de son succès, elle appréciait de savoir que son ami avait trouvé sa voie.

Tandis qu'elle progressait au milieu des hautes et anciennes demeures rappelant le faste dans lequel la capitale avait vécu quelques générations plus tôt, Chloé sentait une sourde inquiétude crisper son estomac. En dehors de quelques foudroyantes migraines qui l'avaient assommée, Darmack s'était montré relativement discret. Il le lui avait dit : puisque la mort ne semblait pas faire effet, il envisageait la souffrance. Elle doutait cependant qu'il se limitât à quelques migraines...