Chapitre 18.2 : Se battre

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L'eau la submerge.

Partout... elle est partout. Dans ses yeux, son nez, sa bouche. Son gargouillis lui emplit les oreilles.

Le courant l'emporte, implacable. Elle se débat, tente de nager mais tout est flou, et le courant bien trop fort pour ses petits bras.

Ballottée de-ci de-là, sans pouvoir lutter...

Elle étouffe... tente de respirer... l'eau s'engouffre dans ses poumons...

Elle se noie.

Une main, un pied...

... une boucle blonde...


Une puissante odeur d'encens titilla ses narines et la ramena à la conscience. D'un bond, elle se redressa et prit de grandes inspirations.

De l'air !

Elle éternua et constata aussitôt que ses vêtements étaient trempés. Deux mains la repoussèrent doucement sur la banquette inconfortable où elle se trouvait.

Un éclair illumina la pièce triste, révéla sa teinte jaunâtre et les nombreuses photos partout accrochées qui tentaient de la couvrir. Des bibelots sans valeur s'entassaient sur une étagère au milieu de pieuses figures, l'informant sur la nature très religieuse des propriétaires. Son regard, enfin, se posa sur la femme qui la veillait, très brune, le regard sombre, le teint olivâtre. Chloé lui donna une trentaine d'années.

— Vous vous sentez mieux ?

Devant son regard interrogateur, l'inconnue expliqua :

— Vous êtes chez moi. Vous n'avez rien à craindre, je ne vous ferai pas de mal.

— Merci, murmura-t-elle en s'asseyant. Comment suis-je arrivée ici ?

— Tenez.

Elle se pencha et attrapa une serviette, qu'elle passa sur les épaules de Chloé. Celle-ci réprima un nouvel éternuement. Vu la chaleur, son t-shirt sècherait vite ; il en irait autrement de son jeans.

— Les enfants vous ont trouvée. Ben est venu me chercher, et on vous a transportée à l'intérieur.

— Les... enfants ? Ben ?

Derrière l'ouverture béante de la porte qui dévoilait un rideau de pluie impressionnant, Chloé aperçut une dizaine d'enfants aussi trempés qu'elle occupés à se bousculer pour mieux voir. Elle reconnut parmi eux la petite équipe de footballeurs. Pouvait-elle profiter de leur hospitalité ?

— Oui, les enfants du coin. Ben, c'est mon fils.

— Je dois m'en aller, déclara Chloé.

— Vous n'êtes pas en état... de...

Chloé se leva sans difficulté. Alors que le matin même, elle avait cru ne jamais pouvoir sortir de son lit, cette fois aucune séquelle ne subsistait. Elle s'en étonna.

— ... vous lever...

Après une seconde de perplexité, elle plongea son regard dans celui de Chloé.

— Vous êtes sûre que ça va mieux ?

— Oui... et je n'ai pas de raison de m'attarder.

Elle désigna du menton l'agglutinement d'enfants.

— Vous avez des choses plus importantes à faire que vous occuper de moi.

Un silence pesant envahit la pièce, qu'un coup de tonnerre déchira.

Le Démon (L'Hybride, livre 1)Where stories live. Discover now