Chapitre 53

2.6K 181 56
                                    

53 - Un petit imprévu...


Eliane ferma le volet avec précaution. Elle ne dormait toujours pas et pourtant l'aurore ne tarderait pas à pointer à l'horizon. Une touffeur moite envahissait Londres depuis quelques semaines et malgré les sortilèges de rafraîchissement, il faisait trop chaud à son goût. Elle s'était levée quelques heures auparavant pour ne pas que son agitation et ses soupirs réveillent Tom. Depuis, elle s'était installée à la fenêtre en quête d'un peu d'air, laissant son regard se perdre sur les toits de la grande ville, éclairés par la lune. Tout était silencieux.

Il n'y avait pas que la chaleur qui l'empêchait de trouver le sommeil, elle s'inquiétait irrémédiablement. Elle et Tom avaient beau attendre ce jour depuis des années, maintenant qu'ils en étaient à l'aube, elle paniquait. Sa main se mit à trembler sur la clenche du volet, elle essaya de respirer profondément pour se calmer... Si elle continuait ainsi, elle allait réveiller Tom alors qu'il se devait d'être reposé.

Eliane fit quelques pas pour s'éloigner un peu plus de la porte de leur chambre, laissée grande ouverte pour capter le moindre courant d'air. C'était le défaut des barrières magiques qui entouraient leur appartement, elles ne laissaient, certes, entrer aucun intrus, mais pas seulement. L'effet filtre qu'elles avaient pour ne pas qu'on puisse lancer un objet dangereux dans leur maison empêchait aussi l'air de circuler correctement. Elle n'osait pas en diminuer l'efficacité un seul instant, de peur que leurs ennemis en profitent.

Elle traversa la pièce et s'assit dans un fauteuil à bascule qu'elle avait installé près de la grande fenêtre du salon. L'appartement était spacieux. La porte d'entrée débouchait sur une cuisine ouverte où ils avaient installé une petite table pour manger et séparer la pièce du salon tout en long, d'un côté, il y avait la cheminée et un grand canapé, de l'autre, la fenêtre et le siège à bascule d'Eliane. Deux portes ouvraient le mur du fond, une menait vers la bibliothèque - qui servait aussi de bureau - et l'autre vers un petit couloir. A gauche se trouvait la salle de bain, à droite la fenêtre où elle s'était installée plus tôt et en face, leur chambre. C'était spacieux et ils avaient pris le temps de décorer l'appartement à leur goût, dans un mélange de sobriété et de chaleur qui leur allait bien.

Elle s'enfonça dans le fauteuil et d'un appui, elle entama un mouvement de va et vient lent tout en chantonnant une berceuse. Elle ignorait d'où lui venait cette chanson, de son passé perdu sûrement, mais elle aimait se dire qu'il s'agissait là d'un souvenir de sa mère. Les quelques années où elle l'avait connue. Tant de question lui venaient en tête à son propos, elle aurait aimé la connaître, s'en souvenir, surtout maintenant. Elle sentit l'inquiétude refaire surface, secouant la tête, elle soupira et entama son chant une seconde fois. Elle posa une main sur son ventre très légèrement rebondi et ferma les yeux, de ses lèvres remuant doucement s'échappait un murmure apaisant.

« -Tu ne dors pas... » C'était plus une affirmation qu'une question.
« -J'ai peur.
-Je sais. » Elle l'entendit s'approcher mais ne bougea pas. Il reprit. « Mais nous somme prêts. Il n'y aura pas de meilleur moment.
-Je ne veux pas te perdre.
-Eliane... Nous n'avons pas traversé toutes ces années en restant unis pour que tu me perdes maintenant. »

Tom se pencha contre elle, interrompant la bascule, il enserra d'un bras ses épaules en s'installant sur l'accoudoir. Il posa son autre main sur le ventre de la jeune femme, entremêlant leurs doigts.
« -Je ne mourrai jamais, tant que tu es avec moi, tant que nous sommes, nous sommes invincibles. D'accord ?
-Oui, tu as raison. »

Eliane ferma à nouveau ses yeux mais, cette fois-ci, pour plonger en arrière. Elle revit leur combat incessant pour se faire une place dans le monde sorcier. Les dîners, les mondanités, les pressions, les amitiés. La façon dont elle avait dû faire don d'une part de sa fortune pour être acceptée au sein du conseil d'administration de l'école malgré son statut d'assistante. Comment Tom avait failli tuer son oncle quelques années auparavant lorsqu'ils avaient enfin pris la peine de retrouver sa famille. Il était devenu fou de rage face à la réalité de ce qu'avaient été ses parents. Une famille entière de dégénérés et un père moldu ensorcelé. Elle avait senti le danger et avait eu peur pour Tom. Il lui avait semblé sur le point de faire une grave erreur et elle avait dû nourrir le lien de tout son amour pour qu'il revienne à un semblant de raison.

Un voyage dont on ne revient pasWhere stories live. Discover now