4 : « Croissant. »

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-On est dans un parc, là, je lui rappelle comme si elle était devenue complètement débile

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-On est dans un parc, là, je lui rappelle comme si elle était devenue complètement débile.

-Oui, et ? Je dors ici ce soir.

-Tu...t'as pas de maison ? je balbutie, et elle secoue la tête.

-Non.

Évidemment, j'ai plein de questions qui me viennent à l'esprit. Des pourquoi, des comment, parce que j'ai du mal à digérer ce qu'elle me dit là. Je ne suis pas super bon pour deviner l'âge des gens, mais c'est tout bonnement impossible que cette fille soit plus âgée que moi. Qu'est-ce qu'elle fait, déjà à la rue alors qu'elle n'est qu'au quart de sa vie ?

-Enfin bref, je vais juste manger et dormir, donc tu peux y aller, elle me dit, mais je n'arrive pas à partir.

-Tu devrais venir dormir chez moi, je lui propose.

-Écoute Pavard, ça fait des mois que je dors à la belle étoile, c'est pas ta pitié qui va y changer quelque chose. Rentre chez toi, dors, demain tu te réveilleras et tu m'auras complètement oublié.

-T'es sûre ? je réponds, mais je ne parle pas de l'oublier, parce que ça, ça m'étonnerait que ça arrive.

-Certaine. Salut.

Je secoue la tête avant de quitter le parc, toujours sous le choc. Entre son évanouissement et ça, cette fille ne cesse de me surprendre de jour en jour.

**

Le lendemain, je me lève à six heures, en même temps que le soleil, pour aller courir.

Je ne l'avais pas fait depuis le match de la finale, et ça me manquait. J'ai pu en profiter pour repasser dans des endroits que j'aimais beaucoup avant et évidemment, de voir le soleil se lever petit à petit.

À sept heures, je décide de m'arrêter à la boulangerie pour m'acheter un truc--je cours toujours à jeun alors que c'est pas la meilleure des idées--et, au moment de commander, je demande deux croissants à la caissière.

-Merci beaucoup et bonne journée, je lui souris, et me le renvoie. Je sais qu'elle m'a reconnu, mais ici, personne ne va se mettre à crier en me voyant.

Ni une ni deux, je retourne vers le parc--en marchant, cette fois--, et je souris en voyant que la jeune femme d'hier et toujours en train de dormir sous son arbre.

Je m'assieds à quelques mètres d'elle--elle ne sera déjà pas ravie de me voir, alors je préfère lui laisser son espace vital--et sors mon téléphone pour m'occuper jusqu'à son réveil.

Je m'assieds à quelques mètres d'elle--elle ne sera déjà pas ravie de me voir, alors je préfère lui laisser son espace vital--et sors mon téléphone pour m'occuper jusqu'à son réveil

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Quand j'ouvre les yeux, il fait complètement jour. Cependant, je ne vois personne dans le parc, ce qui m'indique qu'il est encore tôt. Mon téléphone a probablement toujours de la batterie dans mon sac, mais ça fait un moment que j'ai arrêté de vivre en suivant les heures que les humains se sont imposés. Je vis un peu comme je veux, en suivant le soleil. Ce n'est pas si j'étais attendue quelque part, de toute façon.

Je baille avant de frotter mes yeux et de me redresser, et là, je sursaute.

-Bordel, Pavard, mais qu'est-ce que tu fous ici ? je lâche, et il me sourit.

-Salut ! Je t'ai apporté un croissant.

Et il me tend son sachet comme si c'était tout à fait normal, croquant dans son croissant à lui.

-J'en veux pas, je réponds alors que bien sûr, c'est faux. Depuis que j'ai perdu mon dernier boulot en date, je n'ai pas mangé de croissant. Et c'est clairement pas vital, mais ça me manque un peu.

-Allez, il insiste, et je soupire avant d'attraper le paquet qu'il me tend.

-Merci. Combien je te dois ?

-Rien du tout.

-Je sais bien que t'es une star, maintenant, second poteau Pavard tout ça, mais il me semble que tu continues de payer les choses de la vie quotidienne.

-Accepte juste le cadeau, il répond, et je soupire encore une fois.

Ce mec a une patience à toute épreuve. J'espère qu'elle aura flanché d'ici une dizaine de minutes et qu'il me laissera enfin tranquille.

On mange tous les deux notre croissant dans un calme olympien, mais ce silence est de courte durée. Aujourd'hui, Pavard est d'humeur bavarde.

-Tu as bien dormi ? il me demande, et je hoche la tête.

-Comme un bébé.

-Mais...tu as vraiment pas de maison ?

Je souris, un sourcil haussé.

-J'ai vraiment pas de maison. Te fatigue pas à poser plus de questions que ça, j'y répondrais pas.

Il hoche la tête, mais je vois clairement qu'il réfléchit à sa prochaine question.

Il ne comprend donc pas le français standard.

-Mais comment tu fais pour manger ?

Non seulement il pose des questions, mais en plus, elles ne sont même pas un minimum originales.

-J'achète de la nourriture.

Il ouvre la bouche, mais je le devance.

-J'ai travaillé plusieurs fois depuis que je vis dehors. J'ai été viré il y a un mois et depuis, disons que c'est un peu la merde. Mais je vais reprendre mes recherches. Aussi loin que possible de mon ancien boulot.

-Mais alors tu avais un salaire...ouais, je comprends, il secoue la tête, apparemment en train de se faire les questions-réponses lui-même dans sa tête. Sans travail, pas de logement, sans logement, difficile de trouver du travail.

-T'as tout compris, je le félicite, mangeant mon dernier bout de croissant.

CONFIANCE » PAVARD ✓Where stories live. Discover now