14 : « Peur. »

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Je savais qu'elle serait en colère

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Je savais qu'elle serait en colère. Je savais qu'elle serait en colère parce qu'évidemment, quand je lui ai parlé de lui trouver un boulot, je n'ai pas mentionné le fait que je pouvais chercher ailleurs qu'ici. Mais c'était la meilleure solution. Je savais qu'elle cherchait partout ici, et que c'était inutile d'envoyer son CV en double. À Stuttgart, elle peut trouver une place sérieuse et avoir un toit au-dessus de la tête.

Je sais qu'il y a d'énorme chance qu'elle refuse de me suivre, mais je ferai tout pour la convaincre.

-Tu as une boulangerie qui te propose un job, je commence à lui expliquer. Pour faire la caisse, au début, et ensuite plus si ça se passe bien. Une brasserie a besoin d'une serveuse, et ils cherchent quelqu'un pour la caisse dans un cinéma. La brasserie est un peu loin, mais la boulangerie et le cinéma sont accessibles en bus sans problème, l'arrêt est à même pas deux minutes de chez moi, j'ai vérifié.

Victoria ne répond rien, trop occupée à me dévisager, alors je continue.

-Je sais que c'est complètement ton choix mais je pense que la boulangerie est bien. J'ai vu sur ton CV que tu avais des bases d'Allemand, mais on apprend super vite sur le tas. On se parlera Allemand à table si tu veux, je souris.

-Pourquoi tu m'accueilles chez toi comme ça ? Dans ta maison ? On se connaissait pas il y a deux semaines de cela.

Je souris.

-Mais on se connaît maintenant. Et je te connais assez pour savoir que dès que tu pourras te le permettre, tu trouveras ton propre logement.

Elle soupire, regardant partout autour d'elle.

-Regarde-moi dans les yeux et dis-moi que ça te dérange pas, elle me demande, et je m'exécute sans discuter.

-Victoria, je dis, mes yeux plongés dans les siens, c'est moi qui t'ai proposé ce marché. Ça ne me dérange pas de t'accueillir chez moi jusqu'à ce que tu puisses te permettre d'avoir ton chez-toi à Stuttgart.

Je m'attends à ce qu'elle me rit au nez, refuse et parte en courant. Je m'attends à ce qu'elle me dise qu'elle n'a pas envie de vivre avec moi peu importe la durée, et qu'elle préfère crever sous son arbre.

-Merci, Benjamin.

-Tu veux boire quelque chose ?

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-Tu veux boire quelque chose ?

Je secoue la tête, et Pavard soupire.

-Tu n'en veux pas à cause du prix, ou parce que tu n'as vraiment pas soif ?

-Pas soif.

Il hausse les épaules et va faire la queue pour acheter son truc Starbucks qui coûte plus cher que mon corps si j'essayais de le vendre.

C'est la première fois que je mets les pieds dans un aéroport et je dois admettre que je suis un peu déçue. À en écouter les gens dans la rue, c'est absolument phénoménal, mais je vois ça comme un arrêt de bus version avion. Je risque d'être déçue du voyage aussi. Et ne parlons pas de Stuttgart, puisque je m'imagine trouver un petit village très Allemand alors qu'en vérité, ce sera probablement un bled banal et je ne serai pas dépaysée pour trois sous.

Pavard réapparaît avec son gobelet blanc dans les mains, s'asseyant sur la chaise à côté de moi. Il n'y a pas grand-monde, mais il garde quand même sa capuche. Je suppose que c'est grâce à ces cheveux qu'il se fait reconnaître, habituellement, alors il préfère les cacher.

En vingt-quatre heures, j'ai l'impression que ma vie a drastiquement changée. Hier, je m'achetais un croissant en pensant que j'allais mourir à Jeumont, et aujourd'hui, je pars dans la ville de mon nouveau job.

-Tu as un peu réfléchi ? Pavard me demande, et je fronce les sourcils avant de me souvenir des différentes propositions que j'ai reçues. Jusqu'à présent, je n'ai jamais eu le choix. J'avais un poste quelque part et je l'occupais sans me poser de questions. Mais là, j'ai le droit de choisir ce que je préfère.

C'est complètement inhabituel. Je dirais même, inespéré.

-J'ai peur, je dis à haute-voix avant de froncer les sourcils, moi-même surprise.

Ce n'est pas que je n'ai jamais peur, c'est que je n'ai pas l'habitude de l'exprimer. Et Pavard est tout aussi surpris que moi.

-Tu n'as aucune raison d'avoir peur. Fais-moi confiance.

Il me regarde pendant plusieurs secondes avant d'attraper ma main et d'entremêler mes doigts aux siens. Ça ne dure que quelques secondes, pourtant, le fait que je ne l'ai pas repoussé signifie beaucoup.

Je me répète depuis que je suis partie de chez moi qu'on ne peut faire confiance à personne. Et me voilà en train de faire confiance à un joueur de foot, qui, il y a deux semaines de cela, me faisait m'évanouir dans un bar simplement parce qu'il était torse nu.

CONFIANCE » PAVARD ✓Où les histoires vivent. Découvrez maintenant