9 : « Bénévolat. »

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Ce matin, je ne me suis pas réveillé pour courir

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Ce matin, je ne me suis pas réveillé pour courir. J'ai entendu mon réveil, l'ai éteint et me suis recouché. Enfin, jusqu'à ce que ma mère passe l'aspirateur en pensant que j'étais parti courir.

-Je suis désolée, elle me répète pour la soixantième fois. Mais tu cours, d'habitude, à cette heure-ci !

-Je sais. J'étais fatiguée, ce matin.

-Mmh, elle me sourit, et je hausse un sourcil. Ma mère ne dit jamais « mmh. » Jamais.

-Quoi ? je demande, et elle hausse les épaules.

-Rien, rien...c'est juste que tu passes beaucoup de temps dehors, en ce moment...

Je hausse un sourcil.

-Et j'ai croisé Nicolas au marché, il m'a dit ne pas avoir de nouvelles de toi depuis que vous avez bu un verre l'autre soir...

-Maman...j'essaie de l'arrêter, mais c'est bien trop tard.

-C'est une fille, que tu vas voir ? Ou un garçon, elle ajoute, et je lève les yeux au ciel.

-Non.

-Vraiment ? elle insiste, et je soupire.

-Je fais du bénévolat, j'improvise pour qu'elle me lâche la grappe, et elle me regarde, surprise.

-Du bénévolat ? Oh, c'est très bien ça, Ben ! Je suis vraiment fière de toi, tu sais ? Et ton père aussi. Depuis ton retour de Russie, tu ne cesses de donner pour les autres, que ce soit de l'argent ou du temps.

Si tu savais, maman.

-Merci, maman, je la prends dans mes bras. Je sais que j'ai pas trop le temps de faire tout ça pendant la saison, soit je suis loin, soit je passe ici en coup de vent, alors...

-Mais oui, mais oui, tu as raison de profiter de ton temps ici pour faire le bien comme ça.

-Tu as besoin de quelque chose pour midi ? je lui propose, réalisant que dans cinq jours, je vais repartir à Stuttgart, et que même si je leur téléphone tous les week-ends, je ne reverrais mes parents que pour Noël.

-Je veux bien que tu ailles m'acheter une baguette, prends de l'argent dans mon porte-monnaie à l'entrée.

-Bien sûr, j'acquiesce sans prendre d'argent, et je sors de la maison en soupirant. La chaleur est toujours aussi étouffante, ici, et plus j'approche de la boulangerie, plus j'espère que Victoria n'a pas encore décidé de se promener à jeun dans la ville. Et en passant devant le bar, je suis surpris de la voir en sortir, l'air pas vraiment ravie.

-Tu reviens aux sources pour mieux me supporter ? je me moque, et elle me fusille du regard.

-Fais pas le malin, t'as ruiné mes chances de travailler ici, je marmonne, et Pavard fronce les sourcils

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-Fais pas le malin, t'as ruiné mes chances de travailler ici, je marmonne, et Pavard fronce les sourcils.

-Moi ? Pourquoi ?

-Parce que je suis devenue une bête de foire depuis que je me suis évanouie ici.

-Je croyais que tu t'étais évanouie à cause de la chaleur, il me dit avec un petit sourire narquois, et ça y est, j'ai de nouveau envie de le frapper. Mais comment ça, une bête de foire ?

-Les proprios m'ont limite remerciés de m'être évanouie parce que je leur ai fait de la pub. Si je leur disais que j'avais besoin d'un job, ils m'embaucheraient plus vite que la lumière et ils feraient probablement une banderole à mon effigie pour l'accrocher devant et attirer du monde.

Pavard hoche la tête, souriant.

-Là, je dois bien avouer que c'est pas tout à fait moral. Mais je suis content de voir que tu as refusé. T'as pas perdu la raison même s'il te reste que cinq jours et que ça te ferait vraiment mal de me laisser prendre le relai.

-Mal ? Ça me ferait bien plus que mal. Mais comme ça n'arrivera pas, c'est pas la peine d'en parler.

Il rit, et si je n'avais pas pour principe d'être constamment en colère contre lui, j'aurais peut-être admis que son rire est vraiment mignon. Mais je ne peux vraiment pas me le permettre.

-Qu'est-ce qui te fait rire ?!

-Ta détermination. Comme si le fait que je trouve un job était la pire chose au monde.

-C'est le cas. Et juste pour que tu saches, je refuse catégoriquement de me prostituer.

-Merci pour ces indications, il répond, l'air blasé, et je hausse les épaules.

-Je voulais juste que tu le saches. Qu'est-ce que tu fais ici ? je demande d'un air qui indique que j'aimerais qu'il disparaisse de mon champ de vision, alors qu'étrangement...je pourrais le supporter encore un peu.

-J'achète une baguette pour ma mère, il me dit avec un sourire, et cette phrase pourtant si banale me fait l'effet d'une vague qui m'emporte.

-Oh, ouais. Écoute, je dois filer, à plus, je dis, et il n'a même pas le temps de protester--je peux voir à son visage qu'il allait le faire--que j'ai disparu.

Je ne me suis plus attachée à personne depuis que je suis partie de chez moi. J'ai quitté Lille pour me retrouver quelque part où je ne connais personne. J'ai fait des heures et des heures de stop pour être seule, parce que je sais que je ne peux compter que sur moi-même. Et en laissant Pavard entrer dans ma vie, j'en ai oublié que lui, c'était le contraire. Cette ville est la ville de son enfance, la ville de ses parents. Il est ici pour être proche d'eux alors que je suis ici pour être loin.

Quand il n'est pas dans mes pattes, je ne fais rien. Mais lui, il a sa vraie vie.

Et je ne peux de toute évidence pas rivaliser avec ça.

CONFIANCE » PAVARD ✓Where stories live. Discover now