Episode 3

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— Ah bon ? Moi qui espérais passer une soirée tranquillement avec toi. Il y aura du beau monde, au moins ?

—Tu pourras venir demain pour déjeuner ou dîner, c'est toi qui vois. Ce soir, tu verras ton ami Avenel et ta jolie ennemie Claire De Voyer De Mantou Du Champètre.

— Jolie ? Elle ne doit plus l'être maintenant, depuis le temps. Et puis, il faudrait savoir si elle l'a vraiment déjà été.

— Rhoo, sois pas rabat-joie, il y aura François et Marlène, aussi...

Pierre était tranquillement posé sur le fauteuil en velours de la maison. Bernadette était la même que celle qu'il avait quitté la dernière fois, il y a cinq ans. Rien n'a changé. Leroy ne change jamais rien de toute façon. La maison est toujours aussi froide, mais jolie quand même. Les seules choses qui montrent un peu de vie dans cet endroit, mis à part les tableaux, c'est peut-être ces deux fleurs dans un verre en cristal : deux jolies tulipes.

— Tu es toujours directrice d'école, Berna ? J'ai entendu parler de toi dans un journal, la dernière fois. Il était écrit que tu avais viré injustement une élève du lycée parce qu'elle avait eu plusieurs retards dans l'année. En lisant cela, j'ai eu un fou rire ! C'est tout toi, ça ! Tu ne changes vraiment pas.

Madame Leroy haussa les épaules :

— Ah ! Tu en as aussi entendu parler. Ce n'est malheureusement ni la première ni la dernière élève qui dégagera de mon lycée. Ces élèves sont de plus en plus mal élevés par leurs parents. Ils ne leur apprennent rien. Imaginer que ces imbéciles feront des enfants à leur tour me désespère...

— Vous êtes un peu dur, là, Berna, tout de même...

Elle leva encore les épaules pour montrer son indifférence.

— Il faut de la discipline, de la discipline et de la discipline pour les enfants. Les laisser s'amuser comme des morpions, tu sais ce que ça a donné avec ma pauvre sœur qui a perdu la vie à cause de cela. Maintenant, je dois m'occuper seule de sa fille. Je n'ai pas envie qu'elle s'amuse autant que sa mère s'est amusée, sinon, elle se perdra.

En disant ses mots, Bernadette Leroy se crispa et croisa les bras. Elle prit une grande respiration, puis soupira, en se souvenant... Elle se souvenait de cette sœur qu'elle avait eue. Ce cadeau du ciel. Elle l'avait tant gâté... De la fortune qu'elle avait elle-même héritée de sa maman. Elle donnait tout à petite sœur, surtout de la passion. Sa sœur était passionnée de musique. Alors, elle l'a encouragé à suivre la voie des arts, jusqu'à ce qu'elle devienne une chanteuse assez connue en France et qu'elle commence à goûter à la fête, aux boites de nuit, à l'alcool sans modération et même pire, lorsqu'elle avait rencontré ce garçon... Elle se mit en couple avec lui pour avoir cet enfant, Inès... 

C'est lorsqu'Inès eu 5 ans que sa mère Lucie décéda d'une overdose. Lucie avait pour nom de scène « Paris Le Gall » en hommage à France Gall. Son Mari, Remy, avait l'habitude de se droguer et avait entrainé son amoureuse dans sa chute, pour lui-même mourir d'overdose une semaine après la mort de Lucie, laissant Inès orpheline. Alors, c'est cette fameuse Bernadette Leroy qui s'occupe maintenant de sa fille. « C'était son devoir », disait-elle. Cette rigidité, cette absence de sentiment et cette cruelle dureté qu'elle exprimait à l'égard d'Inès s'explique par la culpabilité qu'elle éprouvait d'avoir laissé sa sœur sans surveillance dans le monde de la musique et au bras d'un homme agité.

— Alors quoi, Bernadette, ma pauvre amie, votre âme ne s'est pas apaisée ?

— Apaisée ? J'ai perdu ma seule et unique raison de vivre, répondit-elle.

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La fille maltraité et le milliardaire américainOù les histoires vivent. Découvrez maintenant