Janvier - Chapitre 58

158 34 12
                                    


Le reste des vacances se déroule plutôt calmement pour Ana. Natacha part quelques jours avec son père et Clara, rentre juste avant Nouvel an, et Ana profite de ces quelques jours de liberté, sans école ni enfants pour se relaxer, lecture, farniente, et un peu de travail aussi quand même.

Pour le réveillon, elle permet à sa fille, qui a ramené un excellent bulletin, d'organiser une petite fête à la maison.

—Trois règles : pas plus de dix personnes, pas d'alcool, rien qui se fume.

—Evidemment, maman, on a quatorze ans, je te rappelle, fait Natacha en haussant les épaules.

Ana ne réplique pas qu'elle a goûté à la cigarette et bu ses premiers verres bien avant de coucher.

Pour sa part, elle est invitée à une soirée par Léo-Paul, un truc assez chic avec tout le gratin local, journalistes et patrons de journaux locaux, directeurs de grands magasins, propriétaires de boîtes de nuit ou de restaurants en vue.

Ça la tente sans plus, mais il l'a suppliée de l'accompagner et l'évocation du buffet réalisé par un chef étoilé et le champagne millésimé l'a convaincue. Et de toute façon, c'est toujours mieux que de chaperonner dix ados devant « Just dance. »

Elle est rentrée tard dans la nuit, enchantée de sa soirée. Les jeunes avaient installé des matelas gonflables dans tout le salon et dormaient, les uns sur le canapé déplié, les autres par terre, Lucas et Natacha seuls dans la chambre de l'ado. L'appartement était plutôt propre et rangé, enfin, pas selon ses critères, mais pour une bande de gamins de quatorze ans, c'était déjà pas mal. Pas de bouteilles vides au fond de la poubelle, ni de résidus d'alcool dans les verres qui attendaient d'être lavé dans l'évier, pas plus que de mégots sur la terrasse. Ana n'est pas dupe. Elle sait qu'un mégot se balance par le balcon, qu'une bouteille se jette à la benne à verre, mais elle connaît les ados, ils ne voient pas plus loin que le bout de leur nez, même pour cacher des bêtises à leurs parents. Elle décide de croire qu'ils ont été raisonnables.

Il reste quelques jours avant la reprise, et Ana décide d'inviter Julie et ses jumeaux à venir passer la journée à la maison. Son amie hésite, met un moment avant d'accepter. D'ordinaire, c'est Ana qui se déplace, au parc, ou chez elle, pour que les enfants aient leur chambre, leurs jouets. Mais Ana insiste et Julie finit par accepter. Leur relation reste tendue, elle n'a pas envie que cela empire parce qu'elle a refusé son invitation.

Lucas est invité à déjeuner avec eux, Ana a mis une grande table, et a préparé de quoi faire une raclette, ce qui plaît beaucoup à Méline et Timéo, les enfants de Julie. Pour l'après midi, Ana a prévu un atelier pâtisserie et profite de l'humeur plutôt conciliante de sa fille pour lui faire réaliser des cup-cakes au chocolat avec les enfants. Lucas, probablement soucieux de se faire bien voir, propose d'acheter de quoi faire une galette des rois, et les mamans qui avaient initialement prévu de passer leur après-midi à discuter en sirotant du thé, décident finalement de se joindre à la petite troupe ; c'est un bon moment de plaisir partagé, deux adultes, deux ados, deux enfants, mais plein d'éclats de rire, et de complicité retrouvée. Le fait de partager leur temps avec les autres, et non pas en tête à tête comme souvent, aident Ana et Julie à se détendre enfin, et quand Julie s'en va après le goûter, elle s'autorise à serrer son amie dans ses bras, chose qu'elle n'avait plus faite depuis de très longs mois.

—Merci, souffle-t-elle. C'était une très chouette après-midi.

—Merci à toi d'être venue. Je suis vraiment heureuse.

Elles s'embrassent sur les joues, et Julie quitte l'appartement, un enfant dans chaque main, et sourire aux lèvres.

Les vacances s'achèvent avec le traditionnel pot de nouvel an de la MJC. Ana fait de la danse là-bas depuis trois ans, et c'est l'année dernière qu'elle y avait rencontré Mehdi. Elle hésite un peu à y aller. D'un côté, elle craint de le recroiser, la gêne qu'elle ne manquera pas de ressentir en le voyant, surtout s'il est avec une femme. D'un autre côté, ses copines du cours de danse comptent sur elle, et puis, elle n'a pas envie que Mehdi pense qu'elle l'évite. Elle ira.

Colin Maillard et chat perchéWhere stories live. Discover now