Chapitre 67

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Ce que Camille préfère dans le fait de dormir avec une femme, c'est la douceur de sa peau. Même si elle ne s'est pas épilée, ça n'a rien à voir avec ce qu'elle a connu avant : mollet velu, torse poilu, barbe qui pique et irrite la bouche.

Elles passent en général quatre jours par semaine ensemble, du dimanche soir au jeudi matin, puis Camille rentre chez elle après le travail, car le jeudi soir, Annelise a son entraînement de Volley-ball. Alors, Camille retrouve son appartement, et c'est sa soirée télé-pilou. Le week-end, elle voit ses amis et sa famille, puis le samedi ou le dimanche en fin de journée, remonte vers le Nord du département, chez Annelise qui vit proche de la frontière luxembourgeoise, plus près de leur lieu de travail.

De temps en temps, Annelise passe le week-end sur Metz, vient dormir le vendredi soir, et le samedi, elle rend visite à sa grand-mère à l'EHPAD, accompagne Camille boire des verres avec ses copines, puis elles rentrent ensemble chez Annelise. C'est lors de une de ces occasions qu'elle a rencontré Colin, un samedi midi de mi-décembre. Ça s'était bien passé. En même temps, c'est normal, Annelise est vraiment sympa, et Colin c'est un amour. On ne peut pas ne pas aimer son grand frère. Ils avaient discuté, s'étaient questionnés mutuellement, poliment. Voilà. Un bon moment, mais sans aucune alchimie. On ne peut pas tout avoir.

Elle est réveillée depuis longtemps. Elle tend le pied, caresse la jambe de sa chérie, mais celle-ci grogne et se retourne, c'est une lève tard. Camille soupire et quitte le lit sans bruit. Elle enfile de grosses chaussettes, un pantalon de pyjama, et un gilet à capuche et se faufile dans la cuisine où elle se prépare un café instantané qu'elle boit à petites gorgées sur un coin de canapé. Annelise est très bordélique. Pas qu'elle-même soit un modèle d'ordre, mais là c'est peu trop pour elle. Bordélique, et un peu cracra. Elle le lui a dit une fois, qu'elle ne comprenait pas que pour une femme, elle ne soit pas plus soignée. Ça a été leur plus grosse dispute. Annelise l'avait regardé avec les yeux ronds.

— Comment ça, pour une femme ?

— Ben oui, en général les femmes sont plutôt maniaques, elles aiment que la maison soit propre, quoi.

— Donc, tu penses que la propreté est dans les gènes ? avait demandé Annelise, calmement, mais la voix pleine de colère contenue.

— Je... non, c'est pas ce que je voulais dire, mais il faut avouer que souvent les femmes... euh... font le ménage ?

— Putain mais on en est là ? Genre année cinquante, les femmes tiennent la maison, un homme qui pleure est une tapette ? T'es sérieuse là, Camille ?

Camile avait cligné des yeux, incapable de répondre, surtout que ce n'est pas du tout ce qu'elle pensait.

— Eh bien moi, tu vois, je n'aime pas faire le ménage. Alors oui, je fais le minimum parce que je n'aimerais pas vivre dans une porcherie non plus, mais je préfère lire que passer l'aspi, regarder la télé que briquer la baignoire, faire du sport plutôt que la poussière ! C'est mon droit, non ?

— Oui, oui.

Les yeux baissés, Camille attendait la fin de l'orage, fâchée contre elle-même de ses paroles stupides, mais aussi stupéfaite qu'une phrase malhabile, un peu ridicule puisse mettre sa petite amie aussi en colère.

— Pardon, chérie, avait murmuré Annelise, calmée. Je me suis un peu emportée, mais je déteste quand les femmes deviennent les pires machistes.

— Je ne suis pas comme ça. J'ai été maladroite, mais je ne suis pas comme ça. Tu le sais quand même.

— D'accord, on oublie.

Camille avait hoché la tête, mais n'avait pas oublié.

Pourtant, c'est plus simple de vivre avec une femme. Camille a l'impression qu'elle et Annelise sont bien plus souvent sur la même longueur d'ondes qu'elle ne l'a jamais été avec ses anciens petits amis. Et ce n'est pas juste une histoire de personnalité, elles se comprennent mieux. Au lit, et dans la vie de tous les jours. Enfin, sauf pour le ménage.

Colin Maillard et chat perchéWhere stories live. Discover now