Chapitre 105

240 33 76
                                    

Quand la sonnerie du réveil de son téléphone la tire de ses songes, il lui faut quelques secondes pour ouvrir les yeux, et d'autres encore pour se souvenir où elle est, avec qui, et éteindre son téléphone.

— Mais c'est quoi ce bruit du diable ? se plaint Colin sans ouvrir les yeux.

— Mon réveil, il faut que je me lève.

Toujours les yeux fermés, il se colle contre elle, l'empêchant de bouger.

— Quelle heure il est ?

— Six heures et demie.

— Mais pourquoi tu mets le réveil si tôt ? C'est le milieu de la nuit !

— Tu as bien changé, avant tu étais debout depuis des lustres. Je dois passer chez moi prendre une douche et me changer, avant d'aller à l'école. Les enfants arrivent dans deux heures.

— Tu sens toujours bon et ta robe est très jolie. Reste.

— J'ai peur que les vêtements de la veille et mon air béat soient trop d'indices pour le reste de l'équipe.

— De toute façon ils finiront bien par le savoir, grommelle Colin.

— Tu tiens vraiment à ce qu'on ait cette discussion maintenant ? Réponse : Non. Rendors-toi, fait Ana en posant ses lèvres sur celle de son amoureux.

— Pas question, je vais te faire un café avant que tu t'en ailles.

— Je le prendrai chez moi. Allez Colin, la journée sera longue et fatigante pour toi, je serais rassurée que tu te reposes encore un peu. Tu peux dormir au moins une heure de plus. Je reviens te chercher à huit heures dix.

— Hum, acquiesce-t-il en se retournant, et Ana en profite pour se glisser hors du lit. Elle le contourne pour récupérer ses vêtements mais la main de Colin tâtonne et emprisonne son poignet.

— Je t'aime, souffle-t-il d'une voix lourde de sommeil.

Elle s'agenouille près de lui, pose ses lèvres sur le petit bout de joue qui déborde du drap.

— Je t'aime aussi. A tout à l'heure.

***

Ça a été une sacrée journée, dense et riche en émotions. Quelques couacs, un mauvais départ pour la chorale des petits, un lot de tapis oublié qui a ralenti le spectacle d'acrosport, un fou rire au milieu de la pièce de théâtre, mais dans l'ensemble, la fête des talents aura été une formidable réussite.

Les yeux brillants, Colin a assisté à tous les spectacles, à la consécration de l'investissement de son équipe et des enfants.

Tout le monde était ravi et soulagé de voir Colin, les collègues, l'équipe municipale, les parents et surtout les élèves, et chacun a défilé pour le féliciter de cette formidable initiative et recueillir quelques informations sur son état de santé, intrigués aussi par son nouveau look approximatif. Les nouvelles vont vite, les ragots aussi, et le bruit avait rapidement couru que le directeur devait subir une intervention très délicate, certains semblaient même étonnés de le voir en vie.

Mais il était là, et bien là, même si dans l'étincelle de ses yeux, Ana voyait autant de souffrance et de fatigue que de fierté. Elle a même dû l'emmener se reposer un peu, au calme, dans la salle des maîtres de l'école, au cours du repas qui avait suivi le spectacle.

Sandra, en récupérant des boissons fraîches dans le frigo de la pièce, est tombée sur eux, mais rien de croustillant, il dormait sur le sofa tandis qu'elle le veillait. Elle a bien remarqué qu'il se passait un truc entre eux, non mais c'est pas une école c'est un site de rencontre ma parole ! Enfin elle s'en fiche, elle est heureuse, maintenant qu'elle a son Serge. Elle a même échangé quelques paroles avec Ana pour prendre des nouvelles de celui qui semblait, à cet instant, plus mort que vif, avec son teint cireux et sa grande cicatrice.

Colin Maillard et chat perchéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant