Chapitre 101

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Bonjour mes amours... oui, je sais ce que vous vous dites. Il était temps... Je sais que j'aurais dû venir avant, mais ça ne change rien au fait que je pense à vous chaque jour, chaque nuit, en permanence... Je vous parle tout le temps, est-ce que vous m'entendez ? Moi, je crois que de venir ici, ça ne change pas grand-chose, et vous voir dans ces espèces de cases en marbre, c'est aussi dur que ce que j'avais imaginé. Mais il le fallait. J'avais besoin de venir, et de vous parler de vive-voix. C'est drôle ça, hein, de vive-voix. Non ? Non. Quoiqu'il en soit, c'est une manière de tourner la page aussi, pas notre page à nous, celle-ci, elle restera toujours là, dans mon cœur. Mais la page de mon deuil.

Je vous demande pardon. Jamais je ne me pardonnerai d'être celui qui, par sa négligence, son inattention, a causé votre mort. En une fraction de seconde, je vous ai perdues, vous avez disparu. Mais c'est fait. Je pourrai m'en vouloir jusqu'à la fin des temps –ce qui arrivera probablement- ça ne changera rien à ce qui est arrivé, et la culpabilité qui me ronge ne vous ramènera pas. Aujourd'hui, je viens vous demander le droit d'être à nouveau heureux. J'ai rencontré une femme. Elle s'appelle Ana. Elle ne veut pas de moi, parce qu'elle pense que... elle croit que... je n'aimerai jamais que vous. Je vous aimerai toujours, bien sûr, mais je l'aime aussi, alors j'espère que ça aussi, vous me le pardonnerez.

Je suis malade, j'ai une tumeur, mais vous le savez déjà, n'est-ce pas ? C'est peut-être une punition divine, qui sait ? Ou alors, une drôle de coïncidence. Je me dis parfois que c'est peut-être à cause de cette tumeur qu'on a eu l'accident, et je ne sais pas si cela me rassure ou m'accable. Longtemps, j'ai cru que j'allais mourir, et que ce serait bien fait pour moi. Et grâce, ou à cause d'Ana, je n'ai plus tant envie de mourir. C'est un signe, je crois, que je suis prêt à avancer.

Sandrine, ma délicieuse épouse, ma merveilleuse femme, pendant des années, tu as été ma moitié, celle qui me complétait si bien, celle qui me comprenait, celle... celle que j'aimais. D'un amour pur, lisse, inconditionnel. Mais je sais au fond de moi que tu comprends. Aujourd'hui, je vais enlever mon alliance, parce qu'il est temps. Mais je la garderai toujours près de moi, dans une petite boîte, dans ma table de chevet avec le doudou de Salomé.

Toi, ma puce, ma petite princesse, mon tendre amour, tu as été mon monde, le centre de ma vie, mon soleil. Quand je pense à ton sourire, mon cœur se déchire, et ça ne changera jamais. Aujourd'hui, la douleur de t'avoir perdue est la même qu'au premier jour. Si je peux à nouveau me projeter dans une vie amoureuse, une vie de couple, je ne veux plus être papa. Je ne peux pas. Tu seras à jamais mon unique enfant.

Je reviendrai vous voir. Avec elle, peut-être, avec Ana. Je suis sûr que vous l'aimerez. Et pour lundi, ne vous inquiétez pas. Ça va probablement bien se passer, et sinon, on se voit bientôt.

Je vous aime. Pour toujours.

Colin Maillard et chat perchéWhere stories live. Discover now