29 - Harry

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Si Thanksgiving a été compliqué pour moi, Noël a été un véritable enfer. Et de ce que j'ai cru comprendre dans mes cours de catéchisme, l'enfer dont on parle après la mort semble bien plus fun que ce que j'ai dû vivre cette semaine.


Mon père a été compliqué à gérer et heureusement que Louis était présent par téléphone. Nous n'avons pas pu énormément nous téléphoner mais nous avons beaucoup communiqué par SMS et même s'il ne s'en rend pas vraiment compte, je crois qu'il m'a aidé à garder la tête hors de l'eau durant tout mon séjour à la maison.


C'est la troisième fois que je rentre depuis mon départ, et c'est catastrophique. J'arrive à pointer du doigt toutes les choses qui ne vont pas et elles commencent à s'accumuler à une vitesse fulgurante.


J'ai été menacé à plusieurs reprises de ne pas pouvoir retourner à New York parce que mon comportement ne lui plaisait pas. Pourtant, j'ai essayé d'être au maximum « comme avant ». J'ai tout fait comme il le fallait mais je crois qu'ils commencent doucement à se douter de quelque chose, et ça me fait très peur.


Jusqu'à hier soir, je n'étais même pas sûr de pouvoir monter dans l'avion et j'ai prévenu Louis qui m'a bien fait comprendre que si je ne rentrais pas, il n'hésiterait pas à mettre la police au courant. Quand il a utilisé des mots comme chantage, séquestration et toxique, j'ai compris que ma famille, celle que je mettais sur un piédestal, celle qui représentait le modèle parfait pour moi, est en fait toxique. Et c'est la première fois que je mets un mot sur toute la situation. C'est perturbant.


J'ai préparé mes affaires au réveil, ce 30 décembre et je me suis senti bien plus léger. Comme si je savais que je quittais un endroit problématique pour retrouver le confort de mon appartement New Yorkais. Et même si je ne peux pas voir Louis directement ce soir, au moins, je serai ailleurs qu'ici.


Le trajet jusqu'à l'aéroport est glacial. Pas de radio, pas de bruit, rien. Juste mes parents et moi. Gemma est restée chez elle. Je ne savais pas pourquoi j'espérais qu'elle prenne ma défense alors qu'au final, elle reproduit le même schéma familial. J'aimerai lui en parler, lui faire part de tout ce que j'ai découvert mais j'ai peur de la réaction de mes parents. Après tout, nous avons tous remarqué les hématomes sur son bras et pourtant, personne n'a rien dit. J'en ai honte.


J'essaie de ranger ce sentiment de culpabilité en me disant que je n'ai pas toutes les clés pour l'aider et que je dois déjà penser à beaucoup de choses me concernant. De toute façon, je sais très bien que je pourrais en parler à Louis pour qu'il me conseille.


Quand nous arrivons, je descends de la voiture, récupère ma valise et nous rejoignons bien rapidement les barrières de sécurité. Mon père me tend sa main puis me regarde de haut en bas, presque avec dédain.


« - La prochaine fois que tu viens ici, tu m'auras coupé cette coiffure de femmelette. J'ai pas besoin que le village pense que mon fils est pédé. »


J'encaisse, simplement. C'est la première fois que ces mots me font autant mal. Ils me touchent directement cette fois-ci.


« - Oui papa, ne t'inquiète pas. Excuse-moi.

- J'aurai du te les couper moi-même ! s'exclame ma mère en passant sa main dedans. C'est vrai qu'ils sont bien longs.

A Fearless JourneyWhere stories live. Discover now