Douze.

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Je frappe dans le sac, encore, reprends mon souffle, et continue.

Les frangins sont sur le ring, Anders sur le rameur juste à coté de moi. Je passe mon temps libre là, à me vider la tête.

Parce que c'est simple de rire avec eux, passer du temps ici c'est comme une thérapie à base de coups de poing, et de vieille blague pourrit. Dans une odeur de sueur, et d'houblon de la veille... Qui dit mieux?

Je commence à réussir, non, parvenir à sortir la tête de l'eau. Grâce à eux, et surtout ... Liv.

Je suis à bout de souffle, les mains en feu, et je commence à voir flou. Ça me lance dans les flans, comme si je prenais les coups que je mets dans le sac. Je m'arrête sur le banc, le temps de reprendre un semblant de dignité.

Je dors mieux, et ça m'aide à être bien plus performant à la salle.

Autant, la colère m'a permis de garder le niveau, mais je manquais d'énergie pour m'améliorer. Et depuis quelques jours, je sens bien que la force revient. Et putain, ça me fait un bien fou.

Les jours se suivent, dans une parodie de quotidien plutôt agréable.

Parodie? Parce que rien n'est fluide. J'ai l'impression de tout réapprendre.

Réapprendre à vivre, à ne plus avoir peur, à avoir confiance, à être tranquille, à dormir, à manger plusieurs fois par jour, à ne plus vivre la nuit pour la surveiller dans son sommeil.

En fin de compte, je sais pas ... lequel de nous deux, aide-le plus l'autre.

Je la sens ... bien, mais bizarre. Elle n'a pas l'air effrayée de la situation, et Liv ne sait pas cacher ses craintes. Dans son monde, ses démons prennent systématiquement le dessus. Et quand je la regarde évoluer, je ne sais pas ... si elle va bien.

Elle cache continuellement son visage, parfois, elle oublie, et du coup ... tout le monde autour détourne le regard. Est-ce que c'est pour éviter de la mettre mal à l'aise? Respecter son envie de ne pas être vue? ou alors ... par dégout?

Je n'en sais rien, et dans tous les cas, ça me fou en l'air. J'ai mal au coeur.

Douglas me rejoint sur le banc, il me tend une bouteille d'eau gelée, mon gars sûr. Lui aussi à bout de souffle, il prend le temps de boire, de s'essuyer le visage, avant de réussir à me dire;

- Il est en forme aujourd'hui le petit bâtard ... ça fait un bail qu'il ne m'a pas mis à l'amende comme ça !

On en rigole comme des cons, parce que putain, pour que Douglas soit dans le mal, il en faut, même moi je galère à réussir.

Il continue de boire, et en profite pour se vider les dernières gouttes dans le cou. Il réprime un frisson géant, il se trémousse à coté de moi, comme s'il venait d'entendre le son de sa vie!

Nous ne sommes que tous les deux, je saute sur l'occasion;

- Comment va Sibylle?

- À merveille. On devrait plus trop tarder à l'annoncer à tout le monde.

- Ce n'est pas plus mal, je sais même pas comment vous avez réussi à le cacher aussi longtemps, vous êtes tellement grillé bordel ...

J'ai le droit à un clin d'œil bien lourd,

- Si on m'avait dit que t'étais le moins con du lot !

Je lui claque l'épaule du plat de la main,

- Je n'aurais pas parié non plus!

#2 Ne vie pas trop fortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant