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Quand Nadejda était petite, il lui semblait que la vie était merveilleuse

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Quand Nadejda était petite, il lui semblait que la vie était merveilleuse. Puis, elle a grandi et elle a compris que ce n'était qu'un mirage, que tout n'était qu'une illusion.

Nadejda se souvient du fils des voisins, il est tombé à l'âge de deux ans d'une tumeur au cerveau. Il portait toujours le calot de son grand-père sur la tête, il avait travaillé comme liquidateur. Il en est mort avant d'être rejoint par son petit fils dans le caveau familial.

Aucun médecin n'a utilisé les termes, mais tout le monde savait.

La pâleur de Katia n'était pas simplement dûe à ses origines slaves, c'était une baisse du taux de ses globules rouges. Les milliers de boutons rouges sur sa peau n'étaient pas à des puces de lit comme sa mère avait voulu se rassurer au début, c'était une accumulation de tumeurs malignes.

Nadia n'avait que trois ans quand elle a compris que la vie n'était pas merveilleuse. Elle a compris qu'être née à Korosten n'était pas un avantage pour démarrer sa vie, pour pouvoir continuer à grandir sainement.

Tous les enfants tombaient.

Aucun médecin n'a utilisé les termes mais tout le monde savait.

Tchernobyl est une guerre au-dessus des guerres. C'est se battre contre une peur durant des milliers d'années. Une peur qui n'a aucune couleur, aucune odeur, aucune senteur.

L'atome où l'homme ne trouvera son salut nulle part, seulement sur un lit d'hôpital.

Il y avait des pissenlits dans sa chambre d'hôpital que Nadejda ramassait pour sa sœur, quand celle-ci passait des scanners où son corps brillait comme une véritable guirlande de Noël.

Ils étaient jaunes, la couleur préférée de Katia, celle des médailles qu'elle voyait à la télévision en regardant les courses d'athlétisme. Elle aurait aimé courir, Katia, si seulement elle n'était pas aussi faible.

Aucun médecin n'a utilisé les termes mais tout le monde les avait sur le bout des lèvres.

Une autre maladie radio-induite qui a arraché sa sœur de ses bras. Nadia ne se souvient que de sa pâleur, des pleurs de ses parents et de l'incompréhension d'Alexandre. Sacha était l'aîné et il n'a jamais voulu comprendre ce qu'il se passait sous ses yeux, c'était inexplicable et personne n'a pu leur expliquer ce qu'était une leucemie aiguë.

Personne n'a présenté ses condoléances, personne n'a offert de présent à la famille Ivanova. C'était une habitude perdue ici, car trop d'enfants souffraient et finissaient par tomber à Korosten.

A peine le cercueil fermé, le village s'est mobilisé. Les retraités de l'Afghanistan ont décrété que le sacrifice avait assez duré. Une collecte de fonds a eu lieu pour envoyer Nadejda et son frère à Kyiv, afin de passer des tests médicaux avant qu'une association française ne les prenne en charge pour les envoyer sur la principauté.

C'ÉTAIT ÉCRIT » Charles Leclerc ✓Où les histoires vivent. Découvrez maintenant