One to one

Twenty-two

Elle

Assise à l'arrière du véhicule sombre, j'inspecte les alentours tandis qu'Ezequiel disparait vers l'intérieur du Palace.

Coïncidence ou pas. C'est dans ce même palace que nous devions célébrer nos fiançailles avec Jared, pas plus tard que demain. J'ai tout fait valser. Est-ce que que Jared méritait cette absence? Je culpabilise de ne pas culpabiliser.

Mon coeur tremble quand je m'imagine un instant, de nouveau sous la coupe de mon père. Cet homme auquel je ne connais rien, à part son autorité et ses décisions innombrables.

Jared est l'une d'entre elles.

« Il t'aime depuis toujours, laisse lui chance. » « Ce sera lui et pas un autre », voilà précisément ce que j'ai entendu à partir de ma majorité.

Jared n'est pas un mauvais garçon, il m'aime je le sais, mais il est son choix, pas le mien. Son future beau fils, pas l'homme que je rêve d'épouser. Y'a t-il seulement un homme pour qui j'ai éprouvé de véritables sentiments un jour? Peut être un...

Mes paroles sont tranchées mais elles demeurent le fond de ma pensée. Ma véritable pensée. Pas celle que je laisse entendre depuis toujours par crainte de me révéler entièrement. Lâchement.

Si je suis amoureuse de Jared? Absolument pas, je ne me retrouve pas en lui. J'ai toléré sa présence car il était mon seul espoir de future. Plus maintenant.

Toutes les fois, ou il me pose la question pour savoir si je l'aime, je réponds oui, alors que le coeur n'y est pas. De la même façon que j'acquiesce quand mon père me sollicite pour quoi que ce soit. Grossière erreur. Je suis... NON, j'étais la petite fille docile et obéissante. Je n'ai plus la force d'endosser ce rôle. Le costume est devenue trop étroit. Je laisse ma place à qui veut.

La goutte de trop est survenue quand mes oreilles ont entendu une vérité dont j'ignorais tout. Une verité qui me pousse à m'éloigner de cet enfer édulcoré dans lequel j'ai grandis. Et puis malgré l'insécurité de La Ciudad, au moins ici, je vis. Et la direction que je prend est uniquement le résultat de ma réflexion. Comment ai-je fait pour vivre autrement?

Julio se tourne vers moi, un grand sourire aux lèvres. J'ai la tête rétracté vers mes épaules, signe que je ne suis pas confortable.

— Détend toi Mia, Eze doit juste régler une petite affaire, m'annonce t-il.

— Une affaire dangereuse? Demandé-je précipitamment, prouvant au conducteur mon angoisse.

— Y a t-il une affaire traitée par Ezé qui ne l'est pas? s'amuse t-il.

— Je suis pas du tout rassuré Julio. Tu devrais peut être le rejoindre. Sait-on jamais..

— Pourquoi ? Tu t'inquiètes pour lui?

Sa question n'est pas ambiguë. Il semble simplement étonné de m'entendre parler ainsi. Je garde le silence.

— T'en fais pas pour lui. C'est un grand garçon. Et je lui suis d'une plus grande utilité en restant dans la caisse. Si les choses se passent mal, ce qui n'arrivent que très rarement, il n'aura plus qu'à sauter à bord et en une fraction de seconde j'aurai déjà descendu toute l'avenue.

— Très bien. inspiré-je pour tempérer mon anxiété.

Julio abaisse la vitre à sa gauche, il s'allume une cigarette et recrache la fumée blanche par l'ouverture.
Je me rend compte à cet instant que la radio est allumée. Je crois reconnaître de la musique argentine, sans y être vraiment certaine.