25. Encerclé

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Aveuglé par la lumière.

Assourdi par un cri monstrueux.

Immobile et en mouvement.

— De simples précautions, avait expliqué Leo, face à la grimace de Nina.

Arthur avait pressé les mains sur ses oreilles mais gardé les yeux ouverts. Nina lui avait dit d'être fort, ce qu'il n'avait pas été depuis son départ de Camelot. En l'absence d'Hector, il devait faire face pour deux.

Mais il n'y voyait pas grand-chose. Leur voiture semblait avoir été avalée par le sol et était soumise à divers sortilèges crépitants. Rien de tangible ne les atteignait, pourtant. Nina frissonnait, Leo s'était renversée sur son dossier, bras croisés, comme si elle attendait que la tempête s'éloigne.

Ce qu'elle fit.

Ils se trouvaient à l'entrée d'une vaste salle plongée dans une semi-pénombre. Devant eux, s'alignaient d'autres véhicules, à l'arrêt le long d'un mur. Un homme en uniforme leur fit signe de se diriger vers la gauche.

— Arthur, tu vois les objets que portent ces gens ? demanda Leo.

Six ou sept personnes évoluaient autour d'eux, comme une escorte, et la plupart portaient des outils sombres, serrés entre leurs deux mains.

— Ce sont des armes, l'équivalent d'une arbalète en beaucoup plus efficace. Alors... quoi qu'il advienne... On reste tous très calmes. C'est compris ?

— Sommes-nous en territoire hostile ? souffla le jeune roi.

— En territoire complètement parano. Avec raison, sans doute. Mais tout va bien se passer.

— Je ne les laisserai pas faire de mal à Hector.

Leo acquiesça, lèvres pincées sur un sourire moqueur.

— Ça, j'avais déjà plus ou moins compris.

Sous l'injonction d'un de leurs gardes improvisés, leur chariot s'immobilisa, Nina et Leo dégrafèrent leur sangle, Arthur batailla avec la sienne. Hector, toujours, dormait.

— Sortez du véhicule, ordonna une voix ferme, depuis l'extérieur.

Leo s'exécuta la première, tandis que Nina se retournait vers Arthur.

— Je suis désolée, Arthur, vraiment désolée, souffla-t-elle, les yeux encore humides, avant de sortir à son tour.

Le roi breton carra les épaules et prit une profonde inspiration. Il s'extirpa doucement de sous Hector et émergea. Aussitôt, il fut la cible de plusieurs armes.

— Tes mains, mec, on veut voir tes mains !

La voix nerveuse appartenait à un homme presque aussi grand que lui, engoncé dans des vêtements trop étroits pour sa carrure, et dont les yeux disparaissaient derrière des cercles noirs. Tendu, Arthur présenta ses paumes. Il connaissait ce genre de ton, celui de la peur, qui peut dégénérer en catastrophe au moindre incident. Il avait vu des injures virer à la rixe meurtrière, à plus d'une occasion, pour des broutilles, un geste déplacé, un regard mal interprété. Désarmé, vêtu de toile, sa marge de manoeuvre était nulle.

— Arrêtez, il n'est pas dangereux ! protesta Nina en s'interposant entre lui et le soldat le plus proche.

Qu'une jeune femme menue puisse risquer sa vie pour le protéger, lui, le roi de Bretagne, le mortifia, mais il n'eut pas le temps de s'en inquiéter longtemps.

— Écartez-vous, que je voie ça.

Les nouveaux venus étaient deux, habillés de blanc. Le premier, un homme aux tempes grises, arborait un large sourire, amical et dangereux. Son pourpoint élégant mettait en valeur une silhouette mince. La femme, vêtue d'une longue chemise ouverte qui lui arrivait aux genoux, sur une robe plus courte, était son double en tous points. Son visage, en revanche, demeurait inexpressif, à l'exception de ses prunelles. Un feu dévorant y brûlait, dirigé sur lui.

Les Héros de Rien (en cours)Where stories live. Discover now