32. Déterminé

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L'équipe médicale reparut plusieurs heures après le départ de Nina et Leo. Arthur le devina au changement de lumière. Lui-même avait louvoyé entre veille et sommeil, adossé au mur, sans se décider à regagner son lit. Il voulait être présent si quelque chose se produisait, si Hector ouvrait un oeil, s'il sombrait dans la nuit éternelle.

Il avait songé à Merlin, son mentor, son ami, un acteur payé pour le prétendre, une image implantée dans son esprit. Il regrettait de ne pas avoir interrogé Nina à son sujet, tout en sachant qu'il aurait détesté la réponse. À présent que la plaie saignait, il lui semblait indispensable de la vider de tout son pus. Il devait affronter le pire, tête haute, droit dans les yeux. La vérité était un monstre, mais il pouvait le terrasser.

Il était roi. De rien, peut-être, mais roi tout de même.

Debout, le regard flou, il observait le ballet des étrangers en tablier, bourdonnant autour du corps alangui de son amant imaginaire, lorsque Max le rejoignit dans son poste d'observation. Son hôte portait un costume immaculé, la copie conforme de celui qu'il avait arboré la veille. Le blanc symbolisait la pureté, l'innocence, une couleur bien peu pratique mais chargée de sens. Max la portait manifestement pour clamer quelque chose.

— Nuit compliquée, je vois, déclara-t-il. Tu veux petit-déjeuner ?

De l'autre côté de la fenêtre, Alex soulevait la paupière d'Hector et balayait son oeil d'une petite lumière vive. Impossible de lire la moindre émotion sur le visage figé de la guérisseuse, mais la tranquillité du tableau renseignait Arthur sur la situation aussi bien que si elle l'avait crié : rien de neuf.

— Je veux y retourner.

— Après désinfection, c'est envisageable, commença Max. Mais le traitement nécessite une immuno-dépression et...

— Retourner chez Légendes.

Le silence lui répondit.

— Arthur, qu'est-ce que tu racontes ? finit par demander le sorcier.

Le jeune homme tapa doucement du poing contre la vitre, sans le moindre bruit, sans violence.

— Je vais renverser ce Miles. Détruire son château maléfique. Libérer les miens. Récupérer l'antidote pour sauver Hector. Je peux le faire, je dois y retourner.

Max rit, mais cette marque d'hilarité, aussi insultante soit-elle, ne fit que raffermir la résolution d'Arthur.

— Tu n'es pas sérieux.

Il se retourna pour faire face à son hôte. Ce dernier écarta les mains dans un geste interdit.

— Légendes est une... forteresse... gardée, protégée... C'est de la folie. Comment imagines-tu... C'est ridicule.

Le sorcier leva les yeux au ciel, puis ses épaules retombèrent.

— Mais tu es sérieux, bien sûr.

— Oui.

— Sérieux, déterminé et buté comme un âne. Un vrai roi de légende. Du genre qui ne fait pas de vieux os.

Il leva les yeux au ciel.

— Arthur...

— C'est dans ma nature, aussi artificielle soit-elle. Je suis le roi Arthur. Un défenseur de la lumière. Un héros. Je dois essayer, quels que soient les risques. Tout autre voie... n'est pas la mienne. Je suis contraint de l'emprunter.

Son interlocuteur le dévisagea, sourcils froncés, une seconde, une deuxième.

— Très bien, concéda-t-il.

Les Héros de Rien (en cours)Where stories live. Discover now