Chapitre 23 - L'enfermement

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Trois jours se sont écoulés, Thomas a installé un verrou à ma porte. J'ai accès à la salle de bain et la chambre. Il a posé une chatière pour me fournir à manger chaque soir, comme on traite un animal. Il m'affame et se réjouit de m'enlever toute force de me battre. Je me triture les méninges, je n'ai que ça à faire. Si mes calculs sont bons, je dois passer devant le juge pour récupérer ma fille dans huit jours. Et si je n'y suis pas, est-ce qu'on va venir me chercher ? Est-ce que quelqu'un va essayer de me retrouver ? Qu'est-ce que Thomas a dit à Thalia pour qu'elle me laisse tomber ?

Je crois que mon bras est vraiment cassé, chaque mouvement est insoutenable. Je l'immobilise au maximum. Le peu de nourriture qui m'est donné me permet à peine de me laver. J'ai des étourdissements constants et, moi qui ne suis pas croyante, je me mets à prier pour que quelqu'un me trouve avant que je n'y reste.

Il n'y a plus l'ombre d'une femme de ménage ou d'un chauffeur. Cette maison est désespérément vide.

Je suis dans cette « chambre d'amie », mais Thomas y a-t-il déjà accueilli quelqu'un ? Un Tableau abstrait japonais, des murs blancs, un lit deux places en fer et une table de chevet noirs, je m'étonne qu'il laisse la poussière faire son apparition depuis trois jours, lui qui est si maniaque. Toute cette maison est un camaïeu de blancs et de noirs, épurée, dans un style industriel, bien loin de la chaleur du manoir.

Je repense au sourire de Julie, à ses cheveux colorés, à sa façon de voir toujours le bon côté de la vie. Je repense à ma Thalia, si belle et si gentille. Toujours là pour moi, ma sœur de cœur, où es-tu ? Je repense à Art, ses bras protecteurs, sa chaleur, sa beauté naturelle, son sourire charmeur. Est-ce que tu penses à moi ? À son évocation, mon cœur se serre... Et ma petite Émilie... Je l'imagine, courir sur la plage bordant la maison de ma grand-mère, les cheveux au vent, libre et souriante, ma petite chérie, j'espère que tu vas bien. J'espère que la famille qui te garde est bienveillante et que les premiers jours de ta vie sont heureux. Je m'en veux tellement de t'imposer cette vie-là. Une vie incertaine. Une vie dangereuse.

Je perds la notion du temps, je n'ai pas de montre, mon seul repère est le soleil.

J'entends la sonnette de l'entrée, je crie malgré la douleur, je veux que l'on m'entende, mais la chambre est à l'opposé de l'entrée et le silence, pesant, revient, anéantissant tout espoir.

Thomas rentre, il me parle de la porte, ne prend même plus le risque de l'ouvrir, il devient paranoïaque. Comme si j'avais la moindre chance de lui échapper.

— Ta copine est revenue sur Paris, elle devient chiante, je te mets un papier et un crayon, tu lui écris que tu vas bien, rien de plus, et tu me le rends, cette mégère veut une preuve. Tu as cinq minutes.

Cette phrase me réchauffe le cœur, elle me cherche. Je dois réfléchir vite, un mot, une alerte.

J'écris, d'une main faible et tremblante :

Thalia, je vais bien, ne t'inquiète pas. Il nous reste encore beaucoup de démarches à faire avant de passer devant le juge. On se verra là-bas. Bisous

Thomas s'impatiente et me demande de lui rendre le papier.

— Je ne t'ai pas demandé de lui faire un roman !

J'espère qu'elle comprendra.

Tu m'appartiens (CONCOURS FYCTIA)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant