Une longue route

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La nuit avait été agitée et le sommeil fuyait. A cinq heures du matin, alors qu'Eddy m'avait envoyé un SMS pour me dire que tout allait bien, je pris mon petit déjeuner.

Une bonne douche me ferait le plus grand bien.

Dans mes bagages, j'avais mis des affaires pratiques. Des jeans et des pulls. J'avais prévu deux survêtements et une seule tenue un peu sexy : une robe noire.

Bref, là où j'allais, je n'avais pas besoin de plaire, j'avais besoin de me retrouver sans chichi.

La route était longue. Au moins six heures de route. En voiture, je me sentais en sécurité. La musique et la vitesse, j'adorais ça. Eddy devait dormir à cette heure- là, et il le méritait.

Mon père, était un soldat. Il est mort au combat lors d'une intervention en Afghanistan. J'avais à peine seize ans. Ma mère était effondrée .Mon père était mon centre du monde. Lorsque l'armée est venue nous annoncer son décès, je ne voulais pas y croire. Mon père était un héros, il avait combattu fièrement. Moi, la seule chose à laquelle je pensais, c'est que je ne le reverrai plus du tout.

Le jour de son enterrement, de nombreux soldats étaient venus pour rappeler à quel point il était bon et fort. J'étais comme abasourdi ou hypnotisé par cet évènement funéraire. J'avais l'impression d'être dans un autre corps, tout cela n'était qu'un cauchemar, je me réveillerai bientôt, c'est sûre.

Un jeune homme de son unité vint à ma rencontre. Il devait avoir environ vingt -deux ans. Il me salua et me tendit une lettre que mon père m'avait écrite quelques jours avant sa mort. Il n'avait pas eu l'occasion de me l'envoyer, et ce petit bout de papier représentait encore un lien avec mon père.

L'enterrement fut un déchirement pour ma mère. Elle pleurait et criait. Je n'avais pas la force nécessaire pour la calmer. J'essayais de ne pas perdre la face vis-à-vis de tous ces soldats.

Le ministre avait fait le déplacement pour la cérémonie et les médias forcément essayaient d'avoir des images. Il ne respectait rien. La douleur des gens méritent une certaine morale.

Ma mère avait organisé un repas après les funérailles, elle voulait que les proches se retrouvent après ce moment difficile. Les gens venaient vers nous, tristes et avec les mêmes airs de pitié. J'avais du mal à le supporter, donc après une ultime phrase –« Toutes mes condoléances, on est là pour toi et ta maman, et bla bla bla... », Je rejoignis ma chambre à l'étage.

L'armée nous donnait une maison systématiquement ou un appartement lors de nos déplacements.

C'est pour cette raison, que je changeais souvent d'école car les déménagements avaient lieu souvent.

Les larmes coulaient doucement sur mes joues et rien ne semblaient les calmer.

J'avais gardé dans ma poche, la lettre qui m'avait été remise par un officier. Je la pris et la déplia.

« Ma petite chérie,

Tu me manques tellement. J'espère que les cours se passent bien et que tu soutiens ta mère. Tu es tellement courageuse. Déjà petite, lorsque je t'ai appris à faire du vélo, tu tombais et malgré les égratignures, tu continuais jusqu'à épuisement. J'espère pouvoir rentrer bientôt à la maison et je suis sûre que tu as encore grandit. Si tu as besoin de quoique ce soit, je te joins ce numéro. C'est un soldat que j'ai formé et en qui j'ai parfaitement confiance .Je te laisse dans la feuille joint son numéro de téléphone. Je t'embrasse fort ma chérie et surtout fais un gros câlin à ta mère pour moi. »

Cette lettre, c'était un peu de réconfort dans cette apocalypse.

Jamais, je ne m'étais servi de ce numéro jusqu'à présent. Mais j'avais besoin d'aide aujourd'hui. D'ailleurs, je l'avais oublié jusqu'à aujourd'hui.

Ma mère vivait avec sa sœur désormais et elle paniquait rapidement dès que quelque chose ne marchais pas correctement. Elle était incapable de prendre une décision rapide, c'était mon père pour ce genre de chose. Donc inutile de paniquer et de l'appeler. Elle s'affolerait et deviendrait un poids pour ma tante. Elle savait que je travaillais dure et que j'avais peu de temps pour l'appeler. En fait, la voir ou lui parler me faisait mal car elle me rappelait forcément mon père. Je voulais oublier ces moments de ma vie. Après sa mort, elle avait préféré m'envoyer en pension et m'éloigner pour éviter que je la voie souffrir. Enfin, c'est comme ça que je l'interprétais. Lors des vacances, elle restait distante et parlait peu.

J'avais appris à mes dépens que je jour où j'avais perdu mon père, j'avais également perdu ma mère. Elle n'était plus vraiment elle-même et au lieu de se concentrer sur moi, elle préférait oublier. Je regretterai certainement à l'avenir le fait de ne pas avoir fait plus d'effort pour tenter de me rapprocher d'elle mais pour le moment, je voulais effacer cette période.

Je me concentrais donc sur la route. Il y avait peu d'embouteillage et la routé était dégagée. J'allais arriver vers treize heures.

Je savais que l'homme que je recherchais se nommait Steve Matthews.

Il ne travaillait plus pour l'armée apparemment.

C'est tout ce que j'avais obtenu comme information.

Je m'arrêtais une dernière fois à la station d'essence avant l'arrivée à cette maison, qui j'espérais me faciliterait la vie.

Je mettais peut-être beaucoup d'espoir dans cette rencontre mais je ne voyais pas vers qui je pouvais me retourner.

L'adresse qui m'était indiquée, concordait avec le GPS. La maison était spatieuse et bien entretenue. Elle était assez isolée et surtout le jardin était très grand.

Un chien aboya dès qu'il entendit ma voiture s'arrêter près des gravats à l'entrée de la maison.

Personne pour autant, n'ouvrit la porte. J'espère que Steve était là. Je n'avais pas fait toute cette route pour rien.

Ce matin, j'avais mis un jeans 501 avec un top Zadig & Voltaire. J'avais mis une paire de basket tendance montante pour être encore plus à l'aise.

Bref, rien de très sexy mais confortable.

Je m'approchais de la porte. Le temps était nuageux et il commençait tout juste à faire froid.

Je mis ma veste en cuir et m'approchais du perron.

Je sonnais une première fois mais personne ne répondit.

Je recommençais à nouveau. Toujours rien.

Je frappais alors à la porte.

J'allais laisser tomber quand la porte s'ouvrit sur un homme torse nu avec une musculature à faire pâlir les plus beaux mannequins de la planète.

-« Euh, excusez-moi... »Réussis-je à dire en bégayant.

...




Opération spécialeWhere stories live. Discover now