c.26: Incapable

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- Aller Iris, c'est pas compliqué de bosser dans une carrière en sable avec des barrières dépassant vingt centimètres quand-même, t'exagères!

Lou me hurle presque dessus, je regarde la carrière remplie d'obstacles. Ce n'est pas que j'ai peur, en fait si, totalement. J'aime pas les obstacles, c'est obstiné en moi.

- Iris? Tu m'écoutes au moins?

Mon regard était planté non sur son visage mais sur l'obstacle le plus proche de l'entrée de la carrière. Il est moche, la barre est trop grosse et le petit arbuste présent devant le vertical est au bord de la sécheresse.

- J'aime pas les obstacles.

Elle lève les yeux au ciel en hurlant mon nom, exaspérée, cela fait dix minutes qu'elle me fait un topo sur le comment du pourquoi il est si important que j'arrive à travailler dans la carrière principale.

- IRIS JOY BON SANG!!

Cette fois, sa voix m'imprégnait la peur, elle en avait clairement marre.

- Iris Joy, en effet, c'est toi que je viens voir.

Je me fige. Un homme âgé de la cinquantaine, les deux mains plantées dans les poches de son  jean bleu marine, un tee-shirt noir, et une veste en cuir marron prend place dans mon champ. Il porte de vieilles bottes de western. Mes yeux passent à présent à son visage, il porte un chapeau, de cow-boy si je peux préciser. Son visage m'est familier. Soudain, je le reconnais. C'est Philippe, l'entraîneur de l'équipe de France.

L'étonnement se fait royal sur mon visage, si bien que Philippe me demande:

- Oh, tu savais que je venais, n'est-ce pas?

A côté de lui, je vois que Lou est complètement perdue, son regard cherche à comprendre désespérément la situation. Elle me fixe du regard, l'air de me dire "Et moi, je suis quoi là?", mais ceci ne me préoccupe largement pas face à la tête de l'homme aux cheveux gris qui me regarde.

- Heu... Oui, oui.

Je réussi à peine à bafouiller cette phrase, tant il me fait perdre le contrôle mental et sûrement également le total sang froid avec lequel je refusais d'entrée dans cette foutue carrière jusqu'à présent. Je perds largement tous mes moyens, sous la pression de l'alerte rouge de mon quartier central.

- Bon, qu'est-ce qu'on attend? En route, mauvaise troupe!

Lou regarde uniquement la scène. Je ne sais pas trop si c'est de rire ou de honte, mais je la fusille intensément du regard et demande gentiment à Azzaro de rentrer en piste.

 A toutes les personnes qui n'ont pas vécu leur pire cauchemar, tout simplement parce que la mort de leur partenaire vous en a donné l'horreur de le revivre, je crois que vous ne pouvez pas comprendre ce que je vis. Je pénètre dans la carrière de sable, avec des obstacles et des barrières de partout. Une bouffée de chaleur monte, ma tête tourne, j'ai quelques vertiges.

Pour l'instant, ce qui me préoccupe le plus n'est même pas le fait que Philippe me regarde, c'est la lutte acharnée que je suis en train de faire contre mes larmes qui ne demandent qu'a couler, voire sillonner mes joues à coups de rafales pluvieuses. Je revis l'accident. Mon visage informe largement à Lou que je ne vais clairement pas bien, que j'aurais préféré que ce personnage ne vienne jamais me voir. Je suis plus blanche que la farine au moment précis ou je frôle ce foutu obstacle. Je fais un tour au pas. Vu mon niveau de stress, je crois je mériterais toute une séance au pas même! Vérification des alentours: Lou et Adrien sont accostés à la barrière opposée et me fixent en parlant. J'avoue que j'aimerai bien savoir de quoi ils parlent, parce que c'est sûrement de moi. Egoïste? Un peu.

AzzaroWhere stories live. Discover now