Chapitre 5 : L'aurore

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-Mon Dieu Mélodie ! Qu'est-ce que t'as fait à tes cheveux ?! s'écria Iris en pénétrant dans ma chambre.

J'étais affalée sur mon lit, entourée de gâteaux en tout genre, un casque sur les oreilles.
Ma colère s'était légèrement apaisée pour le moment et j'avais depuis le début du week-end un terrible sentiment d'abandon, de vide intérieur qui me tenaillait. Je n'avais rien envie de faire à part manger, j'étais dans un état de néant total. Cela faisait deux jours que j'étais enfermée dans ma chambre en prétextant avoir attrapé un coup de froid.
Cette « pseudo-maladie » me permettait d'avoir la paix et puis cela me donnait aussi une excuse pour cacher à mon père mes cheveux devenus d'un lumineux blond cendré. Quand ce dernier venait s'assurer que j'étais encore en vie, je me cachais sous la couette et il n'y voyait que du feu. Mon père n'avait jamais été de ces parents qui se rendent compte du moindre changement de comportement chez leurs gamins. Il était capable de discerner la vérité du mensonge, parce qu'il connaissait mes tocs, mais cela n'était jamais allé plus loin. Mon père se fiait à ce qui l'intéressait, à ce qu'il connaissait, pas à ses intuitions. C'est un homme bien trop terre à terre.
Lysandre était chargé de m'apporter mes repas, il consistait aussi en mon seul contact avec l'extérieur. Fidèle à lui-même, il avait légèrement écarquillé les yeux en découvrant ma couleur mais n'avait pas fait de remarque, se contentant de m'ébouriffer les cheveux affectueusement.
J'étais sûre que c'était lui qui avait demandé à Iris de venir, il avait dû s'apercevoir que je n'étais pas réellement malade, il n'était pas idiot après tout. Et à l'inverse de mon père, Lysandre était quelqu'un de très intuitif, car il était à l'écoute des gens, de l'ambiance autour de lui.

-Whoa ! C'est... bizarre, continua Iris en passant la main dans mes cheveux. Ca te va bien hein, mais rassure-moi, t'as pas fait ça pour te sentir en communion avec Nathaniel ou j'sais pas quoi ?
-Non ! me renfrognai-je. Pour une fois que j'ai fait quelque chose parce que j'en avais envie... Ca n'a rien à voir avec N... enfin tu vois.
-Ok, ok. Et... sinon ça va toi ?
-Super.
-D'accord... ironisa-t-elle en levant les yeux au ciel. C'était débile comme question. Bon, sinon, je suis venue pour te proposer de sortir avec moi cet après-midi. On se fait une sortie shopping avec Rosalya, Violette, Nora et Véra. Rien de mieux pour te remonter le moral !
-Depuis quand vous traînez avec Nora et Véra ? la questionnai-je sans avoir vraiment envie de connaître la réponse.
-On traîne pas vraiment ensemble... C'est juste que l'aprem pique-nique était carrément génial ! C'est vraiment dommage que tu sois partie d'ailleurs... Enfin, tu vois... Peu importe. J'ai beaucoup discuté avec elles et figure-toi que ça a plutôt bien collé... J'en reviens pas moi-même ! Quand Kentin est arrivé, c'est devenu vraiment cool, les garçons se sont battus dans l'herbe comme des gosses, et on s'est fait un foot improvisé ! Kim et Castiel étaient trop drôles, ils étaient chacun chef d'équipe et n'ont pas arrêté de se chamailler et de tricher pour gagner des points. Véra s'est fait tacler dans la terre par Armin, volontairement selon moi mais bon, et elle lui a hurlé dessus pour avoir bousillé son dernier débardeur blanc, même si elle pouvait pas s'empêcher de glousser. L'idée de shopping vient de là. Bon alors, tu viens ?
-Non désolée, je ne me sens pas très bien Iris, refusai-je en me roulant sur le ventre. J'ai envie d'être un peu seule.
-Mélo... Je sais que ça fait mal un cœur brisé. Mais tu peux pas te terrer ici jusqu'à la fin de tes jours.
-Pour le moment, cette idée me convient très bien.
-Bon. Puisque c'est comme ça !


Elle se leva et sortit de ma chambre sans ajouter un mot. Elle n'en avait pas besoin, je la connaissais trop bien pour savoir qu'elle allait faire appel à du renfort.

***

Et en effet, le renfort ne tarda pas. J'eus d'abord la visite d'Alexy, qui hurla comme une gamine en découvrant mes cheveux. Je crois que ça lui a vraiment plu. J'ai néanmoins rapidement réussi à me débarrasser de lui en lui rappelant qu'il allait rater le début des « Reines du shopping ».
Matt fut plus coriace, il s'installa carrément dans mon lit et se mit à me secouer comme un prunier. Je lui assurai que tout allait bien mais il me fit le coup de la sonde avec ses yeux, du coup il ne trouva rien de mieux que de rester avec moi pendant une heure entière. Comme si c'était supposé me remonter le moral de l'avoir dans les pattes. Il me força à regarder le dernier épisode de Naruto, que je ne suivais pas du tout, mais je m'en fichais, je n'avais pas envie de me concentrer sur quoi que ce soit aujourd'hui. Je bavais très légèrement sur l'épaule de Matt après m'être endormie au bout de la cinquième minute. Il finit par partir, à court d'idées pour me sortir de ma phase de dépression.
Ce fut donc le tour d'Armin de débarquer dans ma chambre, sa PlayStation en main.
Sans même me dire bonjour, il partit bidouiller les fils de ma télévision avec sa console en main. Je le regardais faire sans rien dire, amusée par la situation. Il finit par se relever après plusieurs minutes de lutte et me tendit une manette. Il me fit alors jouer à Call of Duty pendant bien une demi-heure (je dois avouer que ça m'a un peu défoulée), jusqu'à ce que sa manette tombe en panne de batterie. Il me regarda en secouant la tête, comme s'il était face à un cas désespéré, et s'empara de ses affaires. Il déposa avant un gros baiser baveux volontairement sur ma joue, qui me fit râler et lui rire, avant de rentrer chez lui.

J'étais donc toujours dans mon lit à m'empiffrer des Oréos que m'avaient ramenés Alexy dans la matinée. Leurs tentatives n'ayant rien changé. J'avais l'impression d'être un légume au dernier stade de sa vie. J'étais allongée sur le dos, les yeux fixés au plafond sans penser à rien, écoutant « Ne me quitte pas » de Jacques Brel comme la dépressive que j'étais.
J'étais en train de m'interroger sur le sens de la vie et tout ça lorsque j'entendis à nouveau la porte s'ouvrir. Je lançai alors les paris : Violette ? Kim ? Rosalya ? Qui mes amis avaient-ils décidé d'envoyer cette fois-ci ?
J'étais en train de pencher sur Rosalya lorsque je sentis que l'on me tirait par les pieds fermement. N'ayant aucune envie de faire un signe de vie, je me laissai traîner comme une loque jusqu'au bout de mon lit, la tête toujours vers le plafond. Je m'attendais à ce que ce nouveau renfort s'arrête lorsque j'aurais atteint le bout du sommier, mais il continua de me tirer jusqu'à ce que mes fesses atterrissent lourdement sur le parquet en bois massif de ma chambre.
Agacée, je relevai les yeux pour enguirlander l'abruti qui m'avait offert un bleu gratuit sur la fesse gauche lorsque mon regard se posa sur un Castiel, qui avait des yeux écarquillés sous l'étonnement.
Mais qu'est-ce qu'il fait dans ma chambre cet abruti ?

-Qu'est-ce que tu fous là toi ? grognai-je en me relevant pour le toiser.
-C'est quoi ces cheveux ?! relança-t-il en tenant entre son pouce et son index une de mes mèches comme s'il s'agissait de la chose la plus étrange qu'il ait jamais vu. T'as voulu nous refaire un remake de Boucle d'Or ?
-Ouais c'est ça, t'es trop fort, lançai-je en tapant sur sa main qui tenait mes cheveux. Et toi, tu m'expliques pourquoi t'es dans ma chambre ?
-Lysandre m'a payé pour que je vienne t'emmerder, enfin « te servir de bonne compagnie », rectifia-t-il en prenant un accent noble. Vingt balles.
-Super, ravie de t'aider à te remplir les poches. Tu peux partir maintenant, le félicitai-je en me laissant tomber à nouveau sur mon lit.
-Il est pas con l'autre, s'il me voit sortir au bout de deux secondes, il me filera pas mon billet.
-T'as qu'à t'asseoir là pendant une dizaine de minutes, et tu pourras te casser il y verra que du feu, assurai-je en désignant un fauteuil dans ma chambre. Mais je te demande juste de faire le silence.


Castiel toisa le fauteuil rose bonbon que je lui montrai du doigt comme s'il s'agissait d'un dangereux psychopathe, quand il posa à nouveau ses yeux dans les miens, il avait haussé un sourcil qui signifiait : « tu t'attends vraiment à ce que je pose mes fesses de rockeur là-dedans ? ».
Il leva les yeux au ciel avant de se laisser tomber à côté de moi dans mon lit en calant sa tête sur son avant-bras droit.

-Alors comme ça on s'est pris un râteau ? lâcha-t-il en tournant sa tête de mon côté.
-Ferme-la, intimai-je en augmentant le son de mon iPod pour ne plus l'entendre.
-Bordel, tout ça pour Nathaniel, l'entendis-je néanmoins ajouter.
-T'es pas obligé de réellement m'emmerder Castiel, grognai-je. Lysandre va pas venir vérifier. Il a sûrement déjà dû oublier toute cette histoire de toute façon.


Il lâcha un rire rauque. Je tournai mon visage instinctivement vers lui pour immortaliser cet instant, rencontrant ses yeux gris à moitié fermés sous les coups de l'hilarité. C'était si rare de le voir rire, Castiel n'avait jamais été quelqu'un de particulièrement joyeux, depuis sa tendre enfance. C'était quelqu'un de compliqué, d'entier. Je ne sais pas si c'était la rareté de ce rire qui le rendait si spécial mais j'aurais pu écouter ce son si particulier qui s'échappait de ses lèvres encore et encore. C'était comparable à l'effet d'un bruit de carillon provoqué par le vent, d'un beau morceau de piano, d'un rire de nouveau-né. Et comme cela ne risquait pas de se reproduire de sitôt, je tentai tant bien que mal de retenir mentalement chaque pli de son visage, la sonorité de son éclat de rire si grave. C'était très étrange, mais c'était sûrement l'une des choses qui m'avaient toujours fasciné chez lui.
Je fus vite ramenée à la réalité quand je le vis tenter d'arracher l'œil en plastique de mon ours en peluche.

-Je comprends même pas ce qui est passé par la tête de Lys quand il t'a demandé de venir ici, ajoutai-je en lui arrachant mon doudou des mains. Comme si t'étais agréable en plus comme compagnie.
-J'en ai rien à secouer, Mélodie. Tant qu'il me file mes vingt balles pour que je puisse m'acheter mon paquet de clope.
-T'es vraiment nul parfois, lui reprochai-je en me retournant pour me retrouver dos à lui.
-Et toi alors ? Tu crois pas que t'as l'air conne à gémir sur ton sort comme une pauvre victime ? Ils croient tous que tu nous fais une dépression ! Si tu veux qu'ils arrêtent de te faire chier, c'est pas vraiment la bonne méthode de terrer ton gros cul ici moi j'te l'dis.


Je méditai quelques instants sur ses paroles. Il n'avait pas spécialement tort, enfin pas sur l'histoire du « gros cul », mais sur le fait qu'ils continueraient à tenter de me remonter le moral tant qu'ils penseraient que je n'avais pas le moral. Si je jouais le jeu et faisais la fille « heureuse », peut-être qu'ils me laisseraient faire ma révolution personnelle en paix ?

-Tu comptes tirer les cheveux de Sue lundi ? s'enquit-il subitement.
-Non, abruti. Le problème c'est pas Sue.
-Ouais, c'est Nathaniel, lui et ses stupides billets de colle... marmonna-t-il entre ses dents.
-Non, c'est moi le problème. Je... commençai-je difficilement en sentant les larmes me monter pour la première fois depuis deux jours. J'arrive pas à être... normale, décomplexée... Je me sens totalement inutile...
-Euh... Tu vas pas chialer là rassure-moi ? s'inquiéta-t-il en prenant un peu de distance comme si j'avais une maladie contagieuse.
-Non, mentis-je. J'sais pas pourquoi je te parle à toi, tu comprends jamais rien.


Il y eut un léger silence pendant quelques longues secondes. Nous regardions tous les deux le plafond sans vouloir prononcer un mot. Chacun était trop agacé par le comportement de l'autre.

-Bon, j'y vais, qu'il aille se faire foutre avec ses idées à la con, annonça-t-il en se relevant.

Il épousseta sa veste en cuir, rangea les lacets de ses rangers à l'intérieur des chaussures pour éviter qu'ils ne traînent par terre et se dirigea vers la porte. Il me lâcha cependant une dernière phrase avant de partir, à laquelle je ne répondis pas par lassitude :

-Tu devrais tous les envoyer chier au lieu de pleurnicher comme une victime.

Je regardai alors la porte se refermer derrière le rebelle. C'était facile à dire pour lui ! Il envoyait tout le temps bouler tout le monde, se décrétant maître de toute chose.
Mais il avait raison sur un point : qui dans ce monde avait décidé que je n'avais pas le droit d'être un peu plus comme lui ?
Je repensai à une citation de Jean-Paul Sartre que le prof de français nous avait balancé en cours et que je n'avais pas complètement saisie avant aujourd'hui : « Dans la vie on ne fait pas ce que l'on veut mais on est responsable de ce que l'on est ». J'étais l'unique responsable, et je ne pouvais pas blâmer Dieu, non, pas cette fois.

***

Ce lundi matin, j'étais attablée pour le petit-déjeuner avec ma famille tout au complet : mon père, Miranda, Lysandre et même Leigh (ce dernier était peu présent ces derniers temps, très pris par l'ouverture de sa boutique de vêtement en centre-ville). J'avais coincé mes cheveux sous mon sweat de pyjama pour cacher ma nouvelle couleur. Je n'en revenais pas que Miranda et mon père ne l'ait pas encore remarqué. Mais je m'en fichais, aujourd'hui, c'était la première phase de mon plan d'expérimentation personnelle, intitulée « j'emmerde le monde entier ». J'étais bien décidée à laisser sa chance à la nouvelle Mélodie, celle qui ne cachait plus ses défauts et ses côtés sombres. Comme pour sonner le glas du début de mon expérimentation, Miranda me contempla avec étonnement :

-Mélodie, c'est très mal poli de se couvrir la tête à table. Enlève-moi ça s'il te plaît.

Lysandre me lança un regard désolé, j'haussai simplement les épaules en tirant mollement sur ma capuche. J'observai mon père du coin de l'œil, il stoppa la trajectoire de sa fourchette remplie d'œuf brouillé et resta la bouche grande ouverte en me découvrant. Miranda lâcha un petit cri surpris et Leigh se contenta de réagir comme son frère : silencieusement.

-Mélodie, qu'est-ce que c'est que ça ? s'indigna mon père en reposant sa fourchette calmement.
-Une nouvelle couleur, annonçai-je avec un sourire en glissant mes doigts dans ma chevelure.
-Tu ne crois pas que c'est un peu trop ? insista mon père en lançant un regard entendu à Miranda.
-Non, pas du tout, assurai-je.
-Et bien je n'apprécie pas, mais alors pas du tout, que tu t'affiches avec... ça. C'est très voyant et ça ne fait pas du tout naturel. Et tu es mineure, je te rappelle. Pourquoi tu ne me l'as pas demandé avant ?
-C'est qu'une couleur de cheveux papa, maugréai-je en haussant les épaules pour l'aider à relativiser sur la situation. Et puis, j'ai toujours voulu être blonde comme toi et maman. Je ne vois pas le problème.


Ma mère s'était en effet teint les cheveux en blond quelques mois avant de nous quitter pour partir en retraite bouddhiste en Inde et ne plus jamais revenir. Il plissa les yeux, comme si je venais de lui faire un coup bas. Il n'était pas habitué à ce que je lui tienne tête et encore moins que je parle de ma mère (LE sujet tabou), il paraissait légèrement perdu et cherchait encore comment réagir. Je n'avais pas envie de lui laisser le temps de trouver une autre excuse pour me bloquer dans ma nouvelle expérience personnelle, je me levai et posai mon sac sur mon épaule.

-J'y vais, je vais être en retard, affirmai-je en prenant la direction de la porte d'entrée.
-Mélodie, attends, m'interrompit Lysandre. Est-ce que tu as conscience d'être en pyjama ?


Je baissai le regard sur ma tenue : mon sweat gris à capuche ouvert sur mon débardeur avec une grosse tête de nounours en plein milieu et mon bas de pyjama noir avec des têtes de Bart Simpson. J'avais mes baskets blanches fétiches au pied, elles étaient salies par cette foutue texture boueuse indélébile due aux footings que m'avaient obligé à faire mon père l'année dernière, dans son délire « esprit sain dans un corps sain ».

-Et alors ? relançai-je en haussant les épaules.

Je quittai la maison sous les regards ébahis de l'ensemble de ma famille. J'entendis mon père murmurer : « c'est l'adolescence, c'est ça ? Elle n'est pas un peu trop vieille pour ça ? ». Pfft, voilà la preuve que mon père est très différent de moi. On est jamais trop vieux pour apprendre à s'accepter soi-même en piquant une bonne crise existentielle.

***

Autant j'avais trouvé mon idée de venir habillée en pyjama pour me faire remarquer très drôle au départ, mais au bout de la deuxième rue j'avais sérieusement songé à faire demi-tour pour me changer. Les passants me dévisageaient comme si j'avais perdu la boule. Ce qui était sûrement le cas d'ailleurs.
Oh et puis zut ! Pour une fois que je n'allais pas passer inaperçue au lycée, j'allais en profiter !
J'oubliais la boule de nerf qui venait de se former dans mon ventre, comme à chaque fois que je faisais face à une situation stressante. Quelle aille au diable celle-là ! Dix ans de ma vie passés dans l'ombre à vouloir séduire un gars qui n'en avait clairement rien à cirer, ça mérite bien un petit craquage de plombs moi j'vous dis !
Je pénétrai dans le long couloir du lycée avec un air détaché. D'habitude, le brouhaha ambiant et les discussions allaient bon train et les gens prenaient un grand soin de totalement m'ignorer. Mais aujourd'hui, en me voyant débarquer, toutes les conversations se stoppèrent instantanément et les regards se tournèrent vers moi d'un mouvement uni et collectif. J'entendis des « elle est vraiment en pyjama ? » ou « c'est Mélodie ? Non, impossible », « depuis quand elle est blonde ? », « bordel, j'adore son pantalon » (Bon, j'avoue celle-là c'était plus une réflexion personnelle).
Je m'arrêtai devant mon casier, en ignorant totalement les messes basses autour de moi. Un petit sourire vint néanmoins apparaître sur mes lèvres. C'était la première fois que qui que ce soit dans ce lycée prêtait réellement attention à moi, et pas seulement pour me demander un service dans le cadre de mes attributions d'assistante-déléguée. Je tirai mon livre de mathématiques de mon casier et m'apprêtai à refermer ce dernier lorsque je sentis une présence derrière moi.

-Mé-Mélodie ? s'assura doucement la voix grave de Nathaniel.

Les vieilles habitudes reprenant le dessus, je ne pus m'empêcher de me retourner d'un coup sec pour lui faire face. Le voir à nouveau me fit un vrai choc, j'en laissai tomber mon livre.

-Tu... Tu vas bien ? s'inquiéta-t-il en me ramassant galamment mon livre.

Mon Dieu, et moi qui avait cru que je le trouverai moche, ou stupide, ou agaçant la prochaine fois que je le verrai, ça avait foiré. J'étais toujours autant fascinée par ses boucles blondes et ses beaux yeux ambrés. Seulement, il y avait une forme de douleur en arrière-plan qui me donnait un goût amer dans la bouche. Et puis, je venais de constater que la colère qui s'était planquée pendant deux jours revenait pointer le bout de son nez et m'ordonnait même de foutre mon poing dans sa belle bouille angélique.

-Oui ça va, répondis-je sèchement en récupérant mes livres.
-Tu as changé de couleur de cheveux, fit-il remarquer toujours aussi surpris par ce qu'il avait devant les yeux.
-Très perspicace.
-Je... Tu es énervée contre moi ? s'enquit-il en fronçant les sourcils.


Allez Mélodie, c'est injuste ce que tu fais. Ce n'est pas de sa faute s'il ne t'aime pas comme toi tu l'aimes. Je sentis mon cœur se serrer à cette pensée. Je plongeai mon regard dans le sien, j'aurais voulu qu'il y lise comme Matt avait l'habitude d'y faire. Mais il ne comprit pas.

-Non pas du tout, répondis-je en tentant de paraître honnête. C'est juste qu'il va y avoir un peu de changement tu vois ? Je vais pas très bien en ce moment, j'ai besoin de faire des trucs un peu normaux, et surtout des trucs pour moi. J'en ai un peu marre d'être transparente, ou que les gens me prennent pour ce que je ne suis pas. Je suis pas parfaite et il est temps que le monde entier le sache ! Tu ressens jamais ça toi ?
-Euh... Non. Pas vraiment. Tu es sûre que ça va ?


Il se retenait sans doute de mettre sa main sur mon front pour prendre ma température. Une parole de plus et il m'emmenait direct chez l'hosto.
C'était dur, très dur mais je savais qu'il me fallait pour mon propre bien m'éloigner de lui. Comment notre relation pouvait-elle continuer comme avant alors que sa proximité me torturait tant ?
Je ne pouvais pas continuer à vouloir changer si je m'accrochais encore à lui, c'était tout bonnement impossible. Je me mordis la lèvre inférieure, je savais par avance qu'il allait me manquer. Je l'aimais, et pas seulement d'un point de vue amoureux. Je l'aimais et je l'admirais. M'éloigner de lui allait s'avérer plus compliqué que ce que j'avais imaginé.
Néanmoins décidée, je refermai violemment la porte de mon casier, ce qui le fit sursauter, et m'éloignai tout en lui faisant le V de la victoire avec ma main sans me retourner.
Je venais à peine de commencer à chercher qui j'étais réellement, et je n'allais pas m'arrêter en si bon chemin. Je savais qu'il fallait que je détruise l'image que j'avais longuement entretenue pour repartir sur de bonnes et nouvelles bases. J'étais un peu effrayée par cette idée, j'allais perturber tous mes repères. Seulement, j'avais eu le temps d'y réfléchir et de regarder la question sous tous les angles, je ne voyais pas d'autres options. Comment laisser de la place à la véritable Mélodie alors que l'ancienne avait encore une si grande emprise dans l'esprit de tout le monde et surtout dans le mien ?
Pour muer, un serpent a besoin de se débarrasser de son ancienne peau. Loin de moi l'idée de me comparer volontairement à un reptile, mais le concept me paraissait logique. J'allais me débarrasser de l'ancienne Mélodie, ou du moins, je comptai devenir sa version 2.0.

***

Le début de la journée s'était avéré plus complexe que prévu. Les professeurs m'avaient tous regardés avec des yeux exorbités, il y en avait même un qui m'avait demandé de me présenter devant la classe, croyant que j'étais une nouvelle. Mais au final, j'avais l'impression d'avoir accompli une prouesse et je me sentais fière de moi. Vraiment. J'avais dépassé ma peur du regard des autres, j'avais réussi à supporter les messes basses, les commentaires cinglants et parfois drôles (je dois l'avouer) des autres élèves.
J'ai entendu un jour qu'il faut accomplir un truc qui nous terrifie par jour. Et bien, j'avais largement donné ma part aujourd'hui. Je me sentais plus légère, c'était assez inexplicable comme sensation, comme si on m'avait retiré un certain poids, un fardeau des épaules. Maintenant que j'avais goûté à une vie avec moins pression, de contrainte, j'en voulais plus. Je savais pertinemment que pour une fois, la partie raisonnable de mon caractère, qui existait bel et bien, je ne saurais le nier, avait elle aussi décidé de suivre la route escarpée, laissant la jolie prairie baignée de lumière loin derrière nous.
Et c'est pour cela qu'en débarquant à la cafétéria, je ne me dirigeai pas vers ma table habituelle, de toute façon mes amis n'étaient pas encore arrivés, mais décidai d'enfreindre toutes les règles sociales de ce lycée en déposant mon plateau à côté de ceux de Nora, Véra, Castiel, Kentin et Lysandre.

-Salut Mélodie ! me lança joyeusement Nora en décalant sa chaise pour me faire de la place, comme si la situation était des plus banales.
-Euh... Mélodie, tu t'es perdue ? grogna Castiel. Ta table est plus loin la cruche.
-C'est quoi cette tenue ? T'es pas passée par la case miroir ce matin ? ajouta Matt interloqué.
-Bonjour tout le monde, les saluai-je avec un sourire en ignorant les remarques de Castiel et de mon voisin.
-Mon Dieu ! TES CHEVEUX ! s'écria Véra excitée. C'est trop rock ! J'adore !
-C'est vrai ça te donne un côté sexy et élégant à la fois je trouve. C'est très réussi, et ça fait ressortir tes beaux yeux, me complimenta Nora en caressant une de mes mèches de cheveux.
-Merci, marmonnai-je.


J'avais toujours eu du mal avec les compliments, c'était à la fois agréable et en même temps je ne savais jamais quoi répondre, j'étais toujours très gênée.

-Hey ! Salut tout le monde ! s'immisça Alexy accompagné de son frère.

Alexy me regardait avec un sourire. Il était apparemment plutôt satisfait que je nous ais poussés à changer nos habitudes. Je regardai la cafétéria, certains des élèves (des secondes et des premières en particulier) nous observaient avec étonnement. Je lisais avec facilité leurs questionnements : « depuis quand est-ce qu'ils sont amis ? », « c'est quoi cette histoire ? », « attends, on a le droit de changer de table comme on veut ici maintenant ? ».

-Salut ! roucoula Véra en regardant intensément Armin. Assieds-toi là !

Véra s'écarta un peu trop brusquement sur la droite pour laisser de la place au jumeau d'Alexy et bouscula Castiel qui était en train de boire un verre d'eau. Résultat : un rouquin rouge de colère avec du Coca sur son jean déchiré à un endroit très mal placé si vous voyez ce que je veux dire.

-Véra ! Je vais te massacrer ! gronda-t-il en se relevant brusquement, la tête baissée vers son pantalon trempé.
-Calme-toi Castiel, c'était un accident, gloussa la blonde les deux mains en avant pour l'apaiser.


Véra se leva alors lentement de sa chaise, un sourire aux lèvres comme si elle préparait un mauvais coup.

-Après tout, c'est pas de ma faute si à ton âge tu sais toujours pas te retenir dès que tu vois mes seins, se moqua-t-elle avant de déguerpir en courant vers les toilettes pour filles en riant à gorge déployée.
-Reviens ici ! Débila si je te chope sur la vie de mon chien ! la menaça Castiel en partant à sa poursuite d'un pas lent et pourtant très effrayant. Si tu crois que t'enfermer chez les filles ça va m'empêcher de venir te massacrer !


Les autres élèves regardaient les deux adolescents se courir derrière avec une jalousie non-dissimulée. Il m'était aussi arrivé de ressentir cette envie, ce désir d'avoir ne serait-ce qu'un petit aperçu de la vie qu'ils menaient au quotidien, de faire partie de leur monde. Je m'étais souvent dit que cela devait être incroyablement excitant de sortir autant, d'être invité à des fêtes tous les week-ends, d'être jalousé, d'être fantasmé, d'être insouciant.
Nora les observait avec un air amusé et attendri.

-Pas de cochonneries les enfants ! leur ordonna-t-elle avec ses mains en porte-voix.

Je ne pus m'empêcher de tourner la tête vers Armin, qui tentait tant bien que mal de dissimuler son malaise et son agacement.

-Ne me mets pas des images sordides dans la tête s'il te plaît, supplia Matt un sourire aux lèvres. Ou sinon tu peux dire adieu à ton cadeau d'anniversaire !
-Oh ! En parlant de ça ! s'exclama Nora en se tournant vers Alexy et moi. Ca vous branche une sortie en club samedi soir pour mes 18ans ? Ca me ferait très plaisir que vous veniez tous !
-Je viendrai avec joie et Armin aussi ! s'enthousiasma Lex sans consulter son frère avant de se tourner vers moi. En revanche, je ne suis pas convaincu que le père de Mélodie la laisse...
-Boucle-la un peu, bien sûr que je vais venir ! assurai-je en le poussant légèrement.
-Non mais t'es au courant qu'avant de t'autoriser à te rendre à la soirée de Sue il a demandé à Lysandre s'il y aurait de la drogue ? m'apprit Matt.
-Lysandre ! Dis-moi que c'est pas vrai ! m'indignai-je en me tournant vers le concerné.
-Eh bien... Euh... Je... Désolée Mélodie, confirma-t-il en rougissant.
-Bon, peu importe, si je vous dis que je viens, je viens.


Je sentais des regards sceptiques se poser sur moi devant la sale réputation que traînait mon père, mais je fis mine de ne pas les percevoir, levant la tête bien haut pour me conforter dans ma décision.

***

Bordel, bordel, bordel. Comment vais-je donc pouvoir faire pour convaincre mon père ? Lui mentir ? Faire le mur ?
C'est en réfléchissant à des plans en tout genre que j'entendis, au tournant d'un couloir, la voix de la directrice s'élever. Je me stoppai nez, oh non, pas celle-là.

-Iris, sauriez-vous par hasard où se trouve mademoiselle Vernant ? Je la cherche depuis ce matin et votre amie demeure introuvable, entendis-je d'un ton qui me parut très agacé (la directrice n'aimait pas du tout jouer à cache-cache avec ses élèves).
-Non madame, désolée, lui répondit Iris.


Il y eut ensuite un bruit qui m'indiquait qu'Iris venait de fermer son casier, puis un cliquetis de talon sur le sol en carrelage.
Je jetai des regards affolés autour de moi, il n'y avait aucune planque où je pourrais me terrer pour échapper à une énième remontrance ou à une énième excuse qui justifierait que je lui rende un service qui n'était absolument pas dans mes compétences.
Et là, ce fut comme de voir le Christ en personne : la porte de secours. Personne ne passait jamais par là pour la simple et bonne raison que c'était interdit. Elle ne servait que dans l'hypothèse d'un incendie. Je poussai le lourd battant sans trop réfléchir et m'infiltrait à l'intérieur tel un ninja. Je m'appuyai le dos à la porte et soupirait bruyamment, haletante et grisée de transgresser un interdit.
J'étais en train de récupérer une respiration normale lorsque je fus à nouveau témoin d'une conversation que je n'étais pas supposée entendre.

-Tu te fous de ma gueule ? Non, tu peux pas être sérieuse là.

Castiel. Son grain de voix teinté d'une colère presque naturelle chez lui était si reconnaissable. Il était au téléphone. Je sentais que la conversation était tendue pour une raison qui m'échappait. Je ne voulais pas l'écouter, c'était intime. Je le sentais dans le ton de sa voix. Et en même temps, l'idée de me retrouver face à la directrice ne me tentait pas non plus. Je restai alors immobile, en priant pour qu'il s'éloigne et que je n'ai pas à entendre sa conversation.

-Mais bordel je suis ton fils ou merde ? C'est qui ce mec au juste ? continua-t-il en élevant légèrement la voix. Attends, tu veux dire l'espèce de trouduc qui était affalé dans notre canapé la semaine dernière ? Pardon ? Je l'ai insulté ?! Et alors ? Ce mec est un gros porc.

Il y eut alors un silence, qui dura plusieurs longues secondes. J'entendis une voix féminine qui sanglotait à l'autre bout du téléphone, je ne pouvais pas entendre distinctivement ce qu'elle racontait. Castiel ne disait rien, il encaissait. Lorsque la femme eut fini sa tirade, aucun des deux ne prononça un mot pendant un certain temps. C'est Castiel qui brisa le silence le premier.

-Il t'a posé un ultimatum c'est ça ? Et donc toi naturellement tu préfères garder un merdeux dans son genre plutôt que ton propre fils ?! Non mais je rêve ! Tu dis n'importe quoi, je ne fais pas fuir tes mecs, c'est toi qui les fait fuir ! Ne rejette pas la faute sur moi, je ne me suis pas élevé tout seul je te rappelle, si je suis « si difficile » c'est pas la faute du Saint-Esprit. Ne me dis pas comment je dois te parler ! Tu m'entends ? T'as perdu ce droit depuis que tu viens de me foutre dehors ! Comment ça « où je vais dormir » ? Arrête ça, je pourrais presque croire que ça t'intéresses ! C'est ça. C'est ça. Salut. N'oublie pas de m'envoyer une petite carte pour mon anniversaire surtout.

Un craquement se fit entendre, je devinai que Castiel avait dû frapper le mur. Le bruit se répéta plusieurs fois, je n'osai pas bouger. J'avais l'impression de violer son intimité, c'était une sensation terriblement dérangeante. Seulement je ne pouvais ignorer ce que je venais d'entendre. Surtout que je connaissais brièvement sa situation familiale compliquée.
Je me rappelai le jour où sa mère était venue le chercher à l'école en pleine classe pour lui annoncer la mort de son père, nous devions avoir 9ans. Il s'était tué dans un accident de voiture. Castiel n'était pas revenu pendant plusieurs semaines après ça. Il avait toujours été un enfant un peu différent, plus compliqué, plus difficile, mais cela ne fit que s'empirer par la suite. Je savais aussi ce qui se disait sur sa mère dans le voisinage, depuis la disparition de son mari, elle faisait une dépression et se consolait avec des bouteilles de vodka. Certains avaient été même tentés d'appeler une assistante sociale. J'ignorai en revanche que la situation ne s'était pas arrangée depuis le temps. Lysandre était-il au courant ?

-Bordel qu'est-ce que tu fous là toi ?

Je relevai lentement les yeux, découvrant un Castiel tremblant de rage, le poing ensanglanté. Il me regardait avec incompréhension.
Voyant que je ne disais rien, il comprit rapidement que j'en avais entendu plus qu'il ne l'aurait voulu. L'incompréhension se transforma alors en colère et en dégoût. Je tremblai, je n'aimais pas ce Castiel. Pas du tout.

-Si tu le répètes à qui que ce soit, je te le ferai regretter, c'est clair ? me cracha-t-il avec un ton menaçant tout en pointant son index vers moi.

A cet instant, j'eus très envie d'hocher la tête et de me carapater. C'est sûrement ce que j'aurais fait en temps normal d'ailleurs. Seulement, je n'irais pas jusqu'à dire que Castiel était mon ami mais je me préoccupais de ce qui pouvait lui arriver. Et puis, s'il fallait que j'apprenne à tenir tête aux autres, autant s'entraîner directement sur lui. Castiel était un peu le boss de fin de jeu dans le domaine. Sachant pertinemment que je le regretterai amèrement, je décidai de lui faire face.

-Castiel, tu vas quand même pas dormir dehors ? me renseignai-je en tentant de paraître la plus douce possible pour l'apaiser.

Il cligna plusieurs fois des yeux, comme si j'étais une sorte de mirage. Il avait dû s'imaginer, à juste titre, que je me serais tirée sans demander mon reste face à son air carrément effrayant. Son ton condescendant et son côté inaccessible suffisait généralement à faire fuir la plupart des gens.

-Ca te regarde pas, lâcha-t-il avec un dédain incroyable. Casses-toi maintenant !
-Mais je...
-Non ! me coupa-t-il en s'approchant dangereusement. C'est pas parce que je t'ai adressé la parole deux fois dans ta petite vie que ça veut dire quoi que ce soit ! Tous les deux, on a rien en commun, et on aura jamais rien en commun. Je supporte pas les gens comme toi, tu m'entends ? J'ai pas besoin de ta pitié. Va te faire foutre avec ta petite vie parfaite !
-Pauvre con, crachai-je à deux centimètres de son visage.
-Pardon ?
-T'as très bien entendu, j'ai dit « pauvre con », répétai-je en détachant chaque syllabe. Si tu crois que t'es le seul à avoir une mère qui n'en a rien à foutre tu te fourres le doigt dans l'œil mon vieux. T'as des problèmes et j'essaye juste de t'aider ! Pourquoi tu te sens toujours obligé de repousser les gens ? C'est un passe-temps c'est ça ? Ou c'est juste parce que t'es un froussard qui a peur de faire confiance ?
-Tires-toi, maintenant, m'intima-t-il lentement en me dardant de son regard noir.


Me rendant compte que je l'avais réellement poussé à bout et qu'il risquait d'exploser, je tirai la poignée de la porte pour rentrer dans le lycée. J'avais les mains tremblantes. Je n'avais pas su me retenir, j'avais déballé un flot de parole ininterrompu. Mais en un sens, j'avais réussi à lui ôter toute répartie, pour la simple et bonne raison que j'avais raison. Castiel n'était pas de ceux qui offrait leur confiance à tout va, la sienne se méritait. Je le connaissais depuis dix ans et j'avais seulement le droit à un peu plus de cordialité et des dialogues plus longs que le commun des mortels. Ce qui consistait déjà en un effort surhumain pour cet énergumène, ce qu'il n'avait pas manqué de me rappeler. « Je t'ai adressé la parole deux fois dans ta petite vie ». J'avais encore l'image de sa bouche se plissant sous le dégoût. Je venais d'entrevoir Castiel au plus bas de sa forme, heurté dans sa sensibilité : était-ce une nouvelle étape à franchir pour se rapprocher de son noyau profond ? De ce qui l'habitait réellement ? De cette confiance si difficile à obtenir ?
A dire vrai, je n'y pensais pas plus que cela. Me contentant de me remettre de mes émotions en contemplant les couloirs vides du lycée. La sonnerie avait déjà retenti, j'étais en retard en cours.
Seulement, pour la première fois de ma vie : je me fichais totalement d'arriver en retard. Une seule pensée me taraudait l'esprit : il fallait que j'aille parler à Lysandre, d'urgence.  

Et Dieu créa Mélodie... entre deux pauses pipiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant