Chapitre 15 : Petit colis de la cigogne

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De : Mélodie
A : Castiel
Tu dors où ce soir ? Tout se passe bien ?

De : Castiel
A : Mélodie
Relax, général ! J'ai récupéré l'appart de ma mère. Faut juste que je trouve un taff pour payer le loyer maintenant. Mais arrête de stresser pour rien, gère plutôt tes histoires avec ton Dark Vador.


J'avais relu plusieurs fois son message, comme pour chercher à comprendre s'il fallait que je m'inquiète ou non. Je finis par décider que je devais arrêter de me faire du mouron pour rien, qu'il était bien plus autonome et indépendant que je l'étais. Et surtout qu'il détestait que l'on intervienne trop dans ses affaires. J'avais replacé mon téléphone dans ma poche avant de me diriger vers la porte d'entrée. J'avais rendez-vous une vingtaine de minutes plus tard chez Iris, qui avait décidé d'organiser une pyjama party entre filles, pour mon plus grand plaisir.

- Mélodie ? m'interpella mon père alors que j'avais la main sur la poignée. Il n'y aura bien que des filles chez Iris, c'est ça ?
- Oui... Il n'y aura que des filles, soufflai-je un peu lasse de ses contrôles répétitifs. Mais si ce n'était pas le cas papa, tu m'aurais interdit de m'y rendre, c'est ça ?


Il leva les yeux au ciel avant de replonger la tête dans son journal, pour montrer que la discussion était close. Mon père pouvait se montrer extrêmement borné.

***

- Regaaaaaardez ce que j'ai ramené ! s'enthousiasma Nora en brandissant dans chacune de ses mains une bouteille de vin. J'ai Chardonnay et sa copine Bourgogne !
- Quelle soiffarde celle-là, grommela Kim en lui arrachant néanmoins une bouteille des mains.


Je me laissai tomber sur la moquette de la chambre Iris, reposant mon dos contre son grand lit double à la couverture bleu pastel. Toutes mes amies étaient là et Iris venaient de nous ravitailler avec un tas de paquet de chips, de cacahuètes, de bonbons et de cochonneries en tout genre. Elle les avait soigneusement déposés au centre de notre petit groupe, profitant de l'absence de ses parents pour monter de la nourriture dans sa chambre.

- Parlons peu parlons bien ! proclama Rosalya pour commencer la soirée avec un sourire malicieux. Comment ça se passe avec Armin ma petite V ?

Rosalya profitait sûrement de cette soirée pour obtenir des réponses à toutes les questions qui gravitaient constamment dans son esprit. Et je pense qu'aucun nombre défini et existant ne suffirait à les comptabiliser.
J'observai brièvement Iris du coin de l'œil qui riait joyeusement à une blague de Nora tout en essayant, non sans difficulté, de remplir les verres de vin.

- Super bien, minauda Véra en prenant une gorgée de Chardonnay.
- Et... alors ? Vous avez déjà passé... la vitesse supérieure ? s'intéressa Rosalya en se rapprochant de sa cible comme la commère qu'elle était.
- Tout ce que je peux te dire, c'est qu'il n'est pas seulement doué avec ses jeux vidéo, affirma notre blonde avec un clin d'œil qui en disait long.
- Noooooon ! T'as dépucelé Armin ? s'étonna Iris en portant la main à sa bouche.
- Mais non, intervins-je en attrapant une chips. Tu te rappelles, il avait eu cette fille, qu'il avait rencontrée sur Internet ?
- Ah oui ! Marie ! Elle était chiante... Je l'aimais pas du tout : elle était vraiment pas faite pour lui, conclut Iris en attachant ses cheveux.
- J'espère bien, s'exclama Véra. Et toi Rosy, tout va bien avec ton prince ?
- Ca se passe plutôt bien si je me base sur ce que je peux entendre à la maison... me plaignis-je en lançant un regard noir à Rosalya. Eurk...
- Oh fais pas ta prude voyons ! Il va falloir que je te trouve un garçon ma petite, me lança-t-elle d'un ton menaçant. C'est plus possible qu'un bonnet C comme le tien n'ait pas encore eu l'honneur d'être tripoté !


Je ne pus m'empêcher de lever les yeux au ciel. Rosalya avait pris la fâcheuse manie ces derniers temps d'évoquer mon tour de poitrine à tout bout de champ. A croire qu'elle faisait une fixette.

- Déjà, on élimine Nathaniel ! clama Iris en riant. J'ai assez donné avec lui.
- Et Matt alors ? insista Nora. Je vois bien comment vous vous regardez tous les deux, vous chafouinez un peu non ?
- Chafouiner ? Cette expression n'a pas été utilisé depuis 1870 ma vieille, se moqua Kim qui regardait avec scepticisme Iris faire des tresses à Violette.


Nora tira la langue à la pulpeuse métisse avant de retourner son attention sur ma personne. Je lui répondis d'abord par de gros yeux étonnés. Etait-ce réellement l'impression que nous donnions ?

- On s'est mis d'accord pour rester amis, leur appris-je en prenant à mon tour une gorgée de vin. Depuis tout petit, ça fonctionne entre nous de cette manière. Et je le connais assez bien pour douter sur le fait que nous serions plus heureux en tant que couple, qu'avec la relation que nous avons actuellement.
- Et s'il se mettait avec quelqu'un d'autre, tu réagirais comment ? s'enquit Violette timidement.
- Je serais sûrement un peu jalouse au départ, affirmai-je après un instant de réflexion. C'est horrible à dire... mais je n'ai jamais eu à le partager avec une autre fille en réalité. Mais je finirai par être heureuse pour lui, parce qu'il le mérite vraiment.
- T'es drôlement généreuse, assura Véra en riant. Déjà que j'aurais juste dû mal à voir un des garçons du groupe en couple tellement je suis possessive ! Faut veiller au grain, moi j'vous le dis ! Dans les sectes, on se reproduit seulement entre membres de cette même secte. C'est comme ça que ça marche, c'est tout.
- Tu racontes vraiment n'importe quoi ! railla Nora. Surtout que Lysandre a échappé à notre surveillance. Holala ! Je l'avais pas vu venir celle-là d'ailleurs !
- Fais-moi ça un jour avec mon frère, je te jure que ça chauffe ! ajouta Véra un sourire aux lèvres.
- Ah merde... Mais c'est arrivé qu'une seule fois, je te le promets... souffla Nora en prenant un air sérieux.


Le visage de Véra se décomposa littéralement. Nora ne tint pas plus longtemps et explosa de rire devant l'air déconfit de sa meilleure amie. Cette dernière, folle de rage, lui sauta dessus soudainement et la chatouilla au niveau des côtes. Nora était écroulée de rire sur le sol.

- Arr-Arrête ! tenta Nora. Ou alors je ba-ba... Haha... Balance des dossiers à Armin !
- Pfft. Espèce de vendue, grommela Véra en croisant les bras sur sa poitrine.
- Ca y est les amoureuses ? Vous avez fini ? pesta Rosalya. Fais passer les chamallows Violette s'il te plaît. Violette ! C'est pas bon de s'empiffrer comme ça !
- Bon, allez ! clama Nora en levant son verre. Cul sec tout le monde !


***

- J'ai jamais... mordu quelqu'un ! s'exclama Iris tout en riant aux éclats.

Je dus me résoudre à boire, ayant déjà commis ce méfait sur Matt dans un bain quand nous étions petits. Je gardai précieusement cette anecdote pour moi, ne voulant pas recevoir des remarques obscènes en la matière. J'observai les autres et j'aperçus sans aucune surprise Nora, Véra et Rosalya boire en se lançant mutuellement des regards complices.

- A mon tour ! A mon touuuuur ! grogna Nora en se tortillant. J'ai jamais... Haha, elle est pour toi celle-là Mélodie ! J'ai jamais été attiré par Matt.

Je fis la moue avant de boire une gorgée, m'avouant vaincue sur cette manche. Je manquai cependant de m'étouffer en découvrant qu'Iris était elle aussi en train de boire.

- Houlalalalaaaaaaaaaaa, crêpage de chignon en vue ! Quel tombeeeeeeur ce Matt ! s'exclama Véra en applaudissant.
- Désolée Mél... Mais c'est vrai qu'il a un beau cul, tu peux pas le nier ! relança Iris en manquant de renverser son verre sur sa couette.


Je me surpris à sourire. Nous étions sûrement bien trop pompettes pour nous prendre la tête à propos de Matt ce soir. Et puis, j'avais toujours su qu'il avait du succès auprès des filles. Je ne me doutais simplement pas que son charme opérait aussi sur Iris. Mais après tout, je n'avais pas le droit de m'en mêler.

- A moi... reprit Violette en rosissant. Je n'ai jamais embrassé un garçon du groupe.

Alors là, c'était la question piège. J'en avais embrassé deux. Enfin trois en comptant Alexy. Encore un vieil accident... Je pris donc une nouvelle gorgée, ainsi qu'Iris, Rosalya, Véra et Nora.

- Attendez... Pourquoi est-ce que j'ai l'impression que les seules qui auraient dû boire étaient Véra et moi ? fit remarquer Rosalya en nous regardant tour à tour. Avec qui ?
- Matt, marmonna Iris.
- Que... Quoi ?! s'exclama Kim. Tu sors avec ?
- Non, c'était juste... comme ça ?
- C'était juste comme çaaaaa, tenta de l'imiter Véra en lui tirant la langue. Regardez-moi cette prétentieuse là-bas !


Iris lui offrit son majeur en guise de réponse. Je l'avais connu plus élégante !

- Et toi Mélodie ? Matt aussi je suppose ?
- Oui, oui, c'est ça, affirmai-je rapidement en rougissant.
- Oh !!!! La coquine ! s'exclama Iris en se relevant d'un seul coup tout en me pointant du doigt. Tu dis pas tout là, je connais ce regard ! Qui est l'heureux élu ?
- Alexy, marmonnai-je.
- Haaaa le dossier ! Mélodie... Et si c'était à cause de toi qu'il était devenu gay ?! hurla Nora en riant aux éclats.
- N'importe quoi ! me défendis-je en lui balançant un coussin en pleine tête. Nous étions petits, c'était totalement innocent et sans conséquences. Nous étions partis un samedi après-midi avec Armin et des épuisettes, persuadés que nous allions attraper des papillons au parc municipal. Armin râlait comme pas possible qu'on l'ait traîné là-bas... A un moment il a agité son filet pour je ne sais plus quelle raison, et je me le suis pris en plein dans le visage. J'ai pleuré comme pas possible et Alexy m'a embrassé pour me calmer. C'était mon premier baiser, du coup... c'est vrai que ça a plutôt bien fonctionné.


Je ne pus m'empêcher de me remémorer cet instant en souriant. J'étais étrangement contente d'avoir partagé mon premier baiser avec Alexy, c'était un moment de notre passé qui nous liait perpétuellement tous les deux dans la mémoire de l'autre.

- C'est tellement adorable... rêvassa Violette en souriant.
- Oui, c'est mignon mais n'essayes pas de noyer le poisson ! Il manque un nom là, je te connais, insista ma meilleure amie avec un sourire diabolique. Allez... Dis tout à tata Iris !
- Et... Ca ne te regarde pas ! conclus-je en rougissant de plus bel.
- Rho allezzzzz ! Si tu nous dis qui c'était, je te dis pour moi, me proposa Nora en me filant un coup de coude.
- Non ! refusai-je catégoriquement.
- Hé les Totally Spies, c'est pas non plus comme s'il y avait cinquante mecs dans ce groupe, fit remarquer Kim. Il reste Armin, Lysandre, Kentin et Castiel.
- Tu peux tout de suite retirer Lysandre de la liste ! Et Kentin aussi, ils n'ont jamais été assez proches pour ça, affirma Iris en prenant un air songeur. Mélodie... Qui as-tu embrassé ?


Elle me regarda droit dans les yeux, sachant pertinemment mon habilité plus que douteuse au mensonge. Je décidai de ne pas répondre, afin de ne pas lui donner matière à réfléchir, mais ses sourcils se haussèrent sur la surprise.

- Oh ! C'est Castiel ! Mélodie t'as embrassé... Castiel ?! hurla Iris en portant sa main à la bouche.
- Attends j'ai rien fait ! Comment t'as deviné ? m'offusquai-je en rougissant de honte.
- HA ! Tu es bien trop facile à manipuler... Oh mon Dieu ! Comment t'en es arrivée là au juste ? balança-t-elle.


Et zut. Je m'étais fait avoir comme une débutante. Elle m'avait balancé le premier nom qui lui était passé par la tête pour jauger ma réaction. Et crédule comme j'étais, j'avais mis directement et sans ménagement les pieds dans le plat.

- Qu-Quoi ?! s'étonna Rosalya qui n'en avait bien sûr pas perdu une miette. Attends, Castiel comme dans Castiel Greenberg ? On parle bien du même là ?
- Tu connais un autre Castiel dans ce monde toi peut-être ? pestai-je en me mordillant la joue. Et ça va à la fin, on va pas en faire tout un fromage !
- Castiel, relança Nora les yeux dans le vide.
- Oui, Castiel, c'est bon c'est pas un drame non plus... Et c'est lui qui m'a embrassé, il était bourré, et c'est tout, je ne vois pas le...
- Non, c'est pas ce que je voulais dire. Je t'informe juste que moi aussi, j'ai embrassé Castiel, me reprit Nora d'un ton nonchalant.
- Pardon ? couinai-je, prise par surprise.
- C'était il y a longtemps... Un an environ à mon avis. On rentrait d'une soirée plutôt arrosée.
- Et... Vous avez fait plus que vous embrasser ? s'enquit Rosalya qui avait repris son ton solennel tout droit sorti d'un interrogatoire d'une série policière.


Nora haussa les épaules d'un air neutre, confirmant qu'elle n'avait pas particulièrement envie de donner une réponse claire à Rosalya. Je ne pus m'empêcher d'écarquiller d'autant plus les yeux. Si je m'étais attendue à ce que Castiel et Nora aient partagé plus que des vannes et des conneries...

- Mais... Il te plaît ? m'étonnai-je.
- C'est un beau garçon, mais il est trop... trop compliqué. J'aurais pu avoir envie de sortir avec lui, mais j'ai vite compris que ce n'était pas le genre de type qu'il me fallait. Il est si renfermé, si difficile à comprendre. Je l'adore, mais il n'est pas fait pour moi. Et je me demande même parfois si cette tête de nœud est réellement fait pour quelqu'un dans ce monde !


Iris se releva soudainement et se plaça au centre de notre petit groupe. Elle enfila des lunettes roses ridicules en forme d'étoile qui jonchaient depuis toujours sur l'une de ses tables de nuit.

- Bon, assez parlé de Castiel ! décida Iris d'un ton qu'elle espérait autoritaire, malgré le ridicule de sa position. Qui est partant pour un petit film d'horreur ?

***

Je n'avais presque pas dormi de la nuit, les ronflements de Rosalya avaient été trop forts pour que je réussisse à trouver le sommeil. Faute de pouvoir dormir, j'avais imaginé durant toute la nuit qu'un psychopathe était tapi dans l'ombre et attendait le moment propice pour venir me faire la peau...
Je faisais donc le chemin de retour jusqu'à chez moi avec des valises en guise de cernes, et une démarche qui s'assimilait aisément à celle d'un mort-vivant.
Je poussai machinalement la porte d'entrée, m'infiltrant dans la maison. J'allais monter dans ma chambre lorsque j'aperçus mon père, assis négligemment sur une chaise de la table du salon. Inquiète, je m'approchai doucement. Il leva des yeux vers moi, il avait son regard des mauvais jours, mêlé à une nervosité inexplicable. Il m'observait en serrant la mâchoire. Je compris rapidement qu'il s'apprêtait à m'annoncer quelque chose qui n'allait pas me faire plaisir.

- Ta mère vient d'appeler. Elle a accouché d'un petit garçon, m'annonça mon père sans exprimer la moindre émotion. Il s'appelle Timéo.

Il n'ajouta rien, me laissant le temps de digérer la nouvelle. Je me pris le visage entre mes mains, instantanément submergée par des émotions douloureuses et contradictoires. Tout d'abord une terrible jalousie. Ce petit garçon allait sûrement connaître et profiter de ma mère d'une manière que je n'avais jamais eu la chance d'expérimenter, et ma mère allait forcément l'aimer plus qu'elle ne m'avait jamais aimé.
Ensuite, de la joie. Je ne pus m'empêcher de penser que je venais de devenir grande sœur. J'avais un petit frère, je l'imaginais déjà potelé, adorable, et je mourrais d'ors et déjà d'envie de le découvrir, de le voir, de le sentir. C'est ainsi que je finis par ressentir inévitablement une grande tristesse, mêlée à une colère noire. Je ne serai sûrement jamais proche de lui, je ne le verrai pas marcher, prononcer ses premiers mots, grandir. Il était de mon sang, de mon héritage familial, et nous allions passer à côté l'un de l'autre. En plus de m'avoir ôté l'amour maternel, ma mère m'éloignait maintenant d'un frère dont je ne serais sûrement jamais proche.
Je me mordis l'intérieur de la joue, comme à chaque fois que je sentais que mes yeux me piquaient. Pourquoi se trouvait-elle toujours à me barrer la route quand je commençais à me détacher d'elle ?

- Elle va revenir en France. Elle veut que tu le rencontres, reprit-il en jaugeant mes réactions.

Je clignai plusieurs fois des yeux. Ma mère... En France ? Cela faisait bientôt dix ans qu'elle était partie, et je ne l'avais jamais revu en dehors de nos conversations sur Skype par écrans interposés. Faisait-elle réellement le voyage pour me voir ? Comptait-elle quitter définitivement l'Inde ? Cela signifiait-il qu'elle m'aimait-elle toujours ? Et Timéo... Comment était Timéo ?
Toutes ses questions tambourinaient dans mon crâne.

- Où est Lysandre ? interrogeai-je mon père.
- Il est parti chez Matt je crois, m'informa-t-il. Mélodie, tout va bien ?


J'avais besoin de parler à quelqu'un, de sortir d'ici, d'évacuer mes pensées. Ne souhaitant pas déranger Lysandre et Matt qui étaient peut-être sur la voie de la réconciliation, ma pensée suivante fut à l'égard d'Iris. Mais c'est alors qu'un choix plus évident s'imposa à moi. J'avais envie d'en parler à Castiel, il saurait trouver les mots pour minimiser la situation, tourner mes sentiments en dérision, me remettre les idées en place, et me comprendre dans un sens. J'avais besoin de ça.

- Où vas-tu Mélodie ? s'enquit mon père en me voyant prendre la direction de la porte d'entrée.
- Chez Castiel, répondis-je sans réellement me rendre compte de la bombe que je venais de lancer.
- Mélodie ! gronda mon géniteur en se relevant brutalement. Je croyais avoir été clair à son sujet !
- Je te promets que je ne t'ai pas désobéi, je ne l'ai pas revu depuis la dernière fois, lui promis-je en lui faisant face. Mais papa, il faut que je sorte. Lysandre et Matt ne sont pas là, Iris ne comprendrait pas, lui, si. Il est le seul à connaître réellement toute ma situation.
- Si tu as besoin d'en parler, je suis là, moi. Et je connais ta situation, affirma-t-il.
- Tu sais très bien que tu n'es pas objectif quand il s'agit de mam... de ma mère, assurai-je en me reprenant à la dernière minute pour ne pas avoir à la qualifier de ce qu'elle n'était pas.
- Il a une mauvaise influence sur toi Mélodie... souffla-t-il en me prenant par le bras.
- Papa... Je sais qu'il est désagréable, insupportable, moqueur, sans gêne, et j'en passe. Il va sûrement d'ailleurs m'envoyer paître. Mais il sait tout, et étrangement, il me comprend. Laisse-moi aller lui parler, simplement quelques petites minutes.


Il plissa légèrement les yeux. Il prenait sa décision. Une lueur étrange s'alluma soudainement dans son regard, signifiant qu'il s'apprêtait à me faire part d'une de ses idées qui allait sûrement arranger la situation.

- Ecoute. On va faire un marché tous les deux. Je te laisse partir le rejoindre si tu fais en sorte qu'il vienne dîner à la maison ce soir. S'il me fait une bonne impression, je reviendrai peut-être sur mon jugement à son égard. Si ce n'est pas le cas, je ne le veux plus jamais avec toi, et encore moins chez moi. Sauf, bien sûr, s'il vient pour rendre visite à Lysandre, il n'est pas mon fils, je n'ai donc aucun mot à dire quant à ses fréquentations. Ca te va comme deal ?

Castiel ? Accepter une invitation à dîner ? J'avais l'impression que mon père n'avait soit absolument aucune idée du caractère de cet énergumène, soit, au contraire, il le connaissait bien plus qu'il ne souhaitait l'admettre pour deviner que le faire venir à ce genre d'événement, un peu trop familial et solennel à son goût, le ferait fuir à coup sûr.
Mais que pouvais-je faire d'autre qu'accepter ? En me sachant d'ors et déjà vaincue, je pris la main tendue de mon père pour sceller officiellement cet accord qui m'était clairement défavorable.
Le problème, c'est que je n'étais pas lucide. La seule chose dont j'avais actuellement envie était de quitter cette maison, d'oublier ma mère et d'en oublier d'autant plus sa venue imminente. Je ne voulais pas la voir. Plus le temps passait, et plus ma rancœur à son égard augmentait, je lui en voulais tellement de m'avoir abandonnée de la sorte. Comment pouvait-on faire cela à son propre enfant ? Y avait-il une explication lucide, excusable ? C'était bien cela ma plus grande peur. Aucun des choix qui allaient se présenter à moi ne me convenait. Soit ma mère n'avait aucune excuse pour m'avoir abandonnée, ce qui consistait à m'avouer qu'elle ne m'aimait clairement pas assez pour rester auprès de moi, soit elle en avait une, et il me faudrait peut-être faire le choix de lui pardonner. Et je ne savais absolument pas si j'en avais le courage ou la force, et encore moins l'envie.
Je m'accrochai à l'idée que j'allais rencontrer mon frère, c'était le seul point positif qui ressortait du voyage de ma mère.
Je fis volte-face et pris la direction de l'appartement de Castiel. Allait-il me repousser à nouveau ? Etais-je stupide ou tout simplement sadomasochiste pour vouloir me confier à lui ? Pourquoi avais-je donc le sentiment stupide que Castiel allait m'apporter du réconfort et son soutien si particulier ? Après tout, il s'agissait de Castiel.
Encore une fois, je n'en avais absolument aucune idée.

Et Dieu créa Mélodie... entre deux pauses pipiKde žijí příběhy. Začni objevovat