Chapitre 22 : Intoxicated

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- Non, je ne viendrai pas je t'ai dit ! répétai-je durement.
- Mais t'es relou, ce sera pas pareil sans toi ! insista Alexy en me secouant.
- Je n'ai pas été invité que je sache, non ? m'agaçai-je. Et je n'ai même pas envie d'y aller en plus.


Alexy se laissa tomber à mes côtés, et Armin contourna le canapé pour se placer à ma droite. J'étais cernée par les jumeaux qui me contemplaient avec insistance.

- Tu vas pas rester à te morfondre ici toute seule ? Surtout que tu sais très bien que si Castiel organise une fête, c'est juste pour oublier tout le merdier de sa vie... reprit Armin pour soutenir son frangin.
- Vous êtes sourds ou quoi ? Je vous ai dit non !
- Sois raisonnable, tu sais très bien qu'il me suffit d'envoyer un seul message pour que tout le monde rapplique et te traîne de force à poil ou habillée jusque chez lui ! s'agaça Alexy.


Je lui jetai un regard outré, il n'oserait quand même pas ? Il soutint mon regard en prenant un air effronté qui me fit réaliser que si, il oserait. Et j'étais persuadée que les autres trouveraient ça très drôle. Enfin, sauf Matt...
Penser à lui me donna envie de m'engouffrer d'autant plus dans le confort de l'assise du canapé. J'avais le cœur en miette en ce moment, comment penser à faire la fête ?
Mon expression sombre de dépressive leur fit apparemment de la peine puisqu'ils me prirent chacun par l'épaule de leur main dans un geste spontané, sans se consulter. C'était amusant de voir comme ils avaient les mêmes mimiques.

- Hé, tu déprimes toujours à cause de Matt ? m'interrogea Alexy en glissant son nez dans mon cou dans une tentative de me réconforter.
- Un peu... avouai-je en soupirant.
- Raison de plus pour sortir sérieux ! continua-t-il en me pressant les hanches pour me faire rire.


Je ne réussis pas à m'empêcher de glousser en tentant de me défaire de son étreinte alors qu'Armin s'y mettait à son tour. Parfois je me demandais si nous avions réellement cessé d'être des enfants, notre façon d'agir les uns avec les autres n'avait jamais vraiment évolué.

- Dégagez ! Vous me... Haha, vous me faites mal ! hurlai-je en me débattant à moitié prise d'un fou rire nerveux.

Lorsqu'ils finirent par me lâcher, je me sentis totalement vidée de tout. Le rire était réellement salvateur, j'en avais toujours été convaincue.

- Si tu n'y vas pas, je n'y vais pas, déclara Alexy en se relevant soudainement.

Il jeta un coup d'œil à son frère, qui resta silencieux.

- Hé ! T'es supposé te lever et faire « moi non plus » connard ! s'énerva-t-il en lui balançant un coussin en pleine tronche.
- Bah oui, bien sûr ! Et pour me faire trucider par Véra : je te rappelle que je lui ai promis de la raccompagner jusqu'à chez elle après la fête, grogna-t-il. Tu sais très bien que quand on se dispute, ça me fout les nerfs en pelote.
- Putain ! Tu penses vraiment qu'avec ton entre-jambe c'est fou ! s'agaça Alexy.
- Hoooo ! Ca suffit ! les interrompis-je avant d'en entendre plus que ce que je ne le voulais. De toute façon, ma décision est prise. Et si j'y vais, on sait très bien tous les deux que Castiel n'appréciera pas du tout, et franchement, je ne me vois pas l'énerver en ce moment.
- Attends, il est tout le temps énervé : ton argument n'est pas vraiment valable, me fit remarquer Alexy avec une certaine lucidité.
- Sortez de chez moi ! grondai-je en indiquant furieusement la porte.
- Tant d'agressivité dans une si petite personne... se moqua Armin.


***

Il m'avait fallu deux bonnes heures, un balai et des insultes pour réussir à me débarrasser des jumeaux. Ils étaient tenaces : deux plaies ambulantes. Mais j'avais tenu bon, ayant simplement envie d'une soirée-télé ce soir, pourquoi est-ce qu'ils n'arrivaient pas à le comprendre ?
Enfin, une fois qu'ils avaient quitté la maison, j'en avais profité. Les parents n'étaient pas encore rentrés et Lysandre était avec Matt et Castiel. J'avais allumé l'enceinte du salon, mis un bon CD d'ABBA et dansé comme une folle en rythme tout en préparant un bon gâteau au chocolat. Je m'étais ensuite installée sur le canapé et j'avais regardé des vieux épisodes de Friends qui passaient à la télé en m'empiffrant. Je n'avais franchement pas vu le temps passer. J'avais ensuite fini par partir m'exiler dans ma chambre, totalement exaltée de cette soirée à ne rien faire, à prendre du temps pour moi.

- Mélodie ? entendis-je soudainement de l'autre côté de la porte alors que j'étais tranquillement assise à mon bureau.

Je reconnus rapidement la voix de mon père. Je fus étonnée, il ne montait que très rarement dans ma chambre. Je jetai un regard vers mon reflet dans le miroir ; j'avais posé sur mon visage une sorte de soin aux algues, supposé me relaxer, et mes cheveux étaient relevés dans un chignon flou pour ne pas me tâcher. En d'autres termes, j'avais l'air ridicule. Mais mon père en avait vu d'autre. Je lui lançai un « entre » que j'espérais chaleureux.
Il passa la tête dans l'embrasure de la porte et fronça légèrement les sourcils en découvrant mon accoutrement, mais il eut assez de tact pour ne pas me faire de remarque désobligeante.

- Tu n'es pas avec Lysandre ? s'étonna-t-il en prenant le ton qu'il employait quand il avait décidé de jouer au papa poule. Je croyais qu'il faisait la fête avec tous vos amis pourtant... Il y a un problème Mélodie, tu es fâchée avec eux ?

Il y a encore quelques mois, il m'aurait presque accroché à une chaise pour m'empêcher de sortir. Et maintenant, il s'étonnait de me voir à la maison et s'en inquiétait. Parfois les parents demeuraient un réel mystère : un coup ils voulaient nous balancer du nid (même si ce n'était pas spécialement le genre de mon père de faire ça), un autre coup ils désiraient nous y étouffer jusqu'à la fin de nos jours.

- Non, c'est juste que je n'avais pas trop envie de sortir ce soir, lui confessai-je avec un sourire pour le rassurer.
- Ok, très bien. Bon, je sais qu'il est déjà vingt-trois heures, mais ça te dirait de regarder le dernier Woody Allen avec Miranda et moi ? Elle a fait du popcorn.
- Oh ! Non ! C'est gentil papa, mais je ne vais pas vous gâcher votre soirée en amoureux, refusai-je. Et puis je comptais prendre un bon bain avant d'aller me coucher de toute façon !
- Comme tu veux ma puce, on est en bas si tu changes d'avis.


Il me fit un petit signe de tête avant de refermer la porte. Je restai longuement immobile, sans trop savoir quoi faire de mon temps libre restant. J'étais en train de me décider à lire le dernier Katherine Pancol dans le bain lorsque mon téléphone se mit à vibrer. Je vérifiai que l'appel ne venait pas d'Alexy avant de décrocher. Je connaissais assez bien le lascar pour savoir qu'il tenterait à nouveau de me convaincre de venir à cette soirée, s'étant fichu dans la tête l'idée que je n'osais pas venir à cause de Castiel, et non tout simplement que je n'en avais pas envie. Quand je vis le nom de Rosalya, je fus immédiatement soulagée. Je positionnai l'appareil entre mon épaule et ma tête afin de pouvoir continuer à chercher dans mes affaires de mes mains libres le livre que je comptais dévorer, bien calée dans la baignoire.

- On a un code blanc ! s'écria Rosy à peine avais-je décroché.
- Hein ? De quoi tu parles ? grommelai-je.
- On a un putain de code blanc force 10 sur l'échelle de Richter ! répéta-t-elle totalement paniquée.


J'en laissai tomber les livres dans mes mains. Oh non, pas le code blanc. Tout sauf ce fichu code blanc.

- Non, tu déconnes ? Il a remis ça ? couinai-je en récupérant le téléphone dans ma main droite.
- Je comprends pas ce qui lui a pris ! Je crois qu'il prononce ton nom entre deux vomissements, c'est pas joli-joli, m'apprit-elle en prenant un air clairement écœuré. On veut le ramener mais il se rappelle plus où sont ses clés ! Et jamais il acceptera qu'on le voit débouler dans ta maison dans cet état, tu le connais !
- Bon sang, je vais le tuer. J'arrive, lui assurai-je en raccrochant rapidement.


Mais qu'est-ce lui avait pris ? Pas ce soir, mais tout sauf ce soir ! Il s'était pourtant montré tellement raisonnable depuis sa dernière cuite... Je lâchai un sifflement plaintif. Rosalya et moi avions instauré le code blanc, le signal qui indiquait que Lysandre avait pris plus d'un verre d'alcool, le signal qui indiquait qu'il était en train de totalement déraper, le signal qui indiquait que j'allais devoir jouer mon rôle de gentille demi-sœur et le ramener à coup de pied au cul jusqu'à la maison sans se faire prendre. Et moi qui rêvais d'un bon bain, j'allais avoir le droit à un abruti avec l'alcool mauvais débitant des conneries entre deux crises de vomi. Mon demi-frère était un homme mort. Et celui qui lui avait mis un verre entre les mains aussi.

***

J'avais enfilé un vieux jean et un T-shirt de Lysandre qu'il avait laissé traîner dans la salle de bain, j'avais dû retirer mon masque pour le visage avant le temps indiqué, ce qui m'avait clairement mis en rogne. Je ne me faisais jamais de masque bon sang ! Pourquoi avait-il fallu qu'il décide de boire plus que la limite de deux verres que nous lui avions collectivement imposé ? Il était totalement inconscient ! La dernière fois, il nous avait fallu la journée entière avant de le retrouver endormi dans une benne à ordure ! Une autre fois, c'était à poil dans la baignoire d'Iris que Violette l'avait découvert, et elle n'en est toujours pas entièrement remise... Comment avait-il pu remettre ça sérieusement ? Il savait pourtant qu'avec plus de deux verres d'alcool dans le sang, il transformait le Lysandre classe, élégant et distingué en une espèce de bombe à retardement ! Surtout qu'il était supposé surveiller Castiel ! Rha, il allait voir ce qu'il allait voir quand j'allais lui mettre la main dessus à celui-là !
J'appuyai avec fureur sur l'interphone en bas de l'immeuble de Castiel. Un inconnu décrocha en balbutiant quelques mots que je ne réussis pas à comprendre avant de m'ouvrir la porte métallique de l'entrée. Je pris la direction de la cage d'escalier et gravis les marches quatre par quatre pour tenter de calmer mes nerfs.   

Et Dieu créa Mélodie... entre deux pauses pipiWo Geschichten leben. Entdecke jetzt