Chapitre 8 : Bond, appelez-moi Matt Bond

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- Bon tu bouges ou quoi ? s'impatienta Castiel en me tirant par la manche.

Nous nous trouvions à quelques pas du bureau des délégués et je m'étais littéralement figée en entendant la voix suave de Nathaniel en pleine conversation téléphonique qui s'échappait de la pièce. Je n'avais pas du tout envie d'y aller, je me sentais tellement pathétique.

- Un marché est un marché, trancha Castiel en s'approchant de moi rapidement.

Il posa son épaule contre mon ventre avant de me faire basculer tête la première en direction de ses fesses. Et j'étais tellement tétanisée à l'idée de ressentir à nouveau toutes les émotions que j'avais enfoui pour Nathaniel ces dernières semaines, que je ne réussis même pas à esquiver un mouvement pour me défendre. Loin des yeux, loin du cœur : mais qu'étais-je supposée ressentir une fois que je le retrouverai ? J'avais tellement peur que tout me revienne d'un seul coup, que le choc soit trop rude. Je ne voulais pas replonger.

- Castiel ! Stop ! J'ai changé d'avis ! me plaignis-je la tête à l'envers dans son dos.

J'agrippai avec mes mains sa veste en cuir en tentant de le retenir, de le tirer en arrière. Mais Castiel était quelqu'un de très têtu, une fois qu'il avait décidé quelque chose, il n'était pas question d'agir en sens inverse.
Il me fit pénétrer contre mon gré dans le bureau, les fesses les premières, rouge de honte et aussi nerveuse qu'un jour d'examen de physique-chimie avec madame Marnier.

- Mais que... Mélodie ? entendis-je dans la salle.
- Ouais, elle a un truc à te demander, asséna durement Castiel en me reposant au sol.


Une fois à terre, je tentai alors de retrouver brièvement une certaine convenance en lissant ma chemise et en me recoiffant correctement.
Mon manège ne put durer indéfiniment et il me fallut oser un regard dans sa direction, il était apparemment éberlué par notre arrivée. Je profitais de son choc pour l'observer quelques instants. Il était beau, c'était indéniable. Une beauté pure, simple, qui me touchait particulièrement.

- Mélodie ! Je suis content de te voir, c'était triste sans toi dans les parages ! finit-il par dire une fois la surprise passée.

Il s'approcha alors de moi d'un pas décidé et me serra dans ses bras fortement. Son contact me fit frémir des pieds à la tête, comme une vague de picotement mais cette fois-ci terriblement désagréable. Je ne me sentais pas prête pour cette proximité, je ne le serais sans doute jamais dans ses conditions. J'avais cependant eu tort de croire que je retomberai dans ses bras, sa vue ne m'évoquait qu'une douleur dans le bas du ventre. J'avais ouvert les yeux, c'était trop tard pour revenir en arrière. La part de moi qui voulait encore contraindre le reste à être une élève modèle pour lui plaire était devenue largement minoritaire.

- Qu'est-ce que tu fais avec Castiel ? me questionna-t-il en formant une moue dégoûté avec ses lèvres en prononçant le prénom de ce dernier.
- Qu'est-ce que ça peut te foutre ? contre-attaqua le rouquin en levant ouvertement les yeux au ciel. T'es flic depuis quand ?
- Je... Tout va bien Mélodie ? relança Nathaniel en ignorant son ennemi de toujours. J'ai l'impression qu'en ce moment tu es distante avec moi. Comme si j'avais fait quelque chose de mal. Tu m'as déjà dit que ce n'était pas le cas, mais j'ai tout de même l'impression que tu m'évites...
- Je ne t'en veux pas, j'ai juste besoin de recul, je te l'ai déjà dit, assurai-je en me plongeant dans une observation de mes ongles rongés à cause de mon caractère nerveux. Si je viens c'est parce que Castiel et moi avons besoin d'un billet de retard pour ce matin.


Nathaniel posa sa main sur sa bouche, ses beaux yeux s'écarquillèrent doucement face à mon annonce. Je ne pouvais pas réellement lui en vouloir d'être surpris, je n'avais jamais eu de billet de retard ou d'absence de toute ma scolarité. Nathaniel savait pertinemment que je détestais m'absenter et rater les cours. C'était d'ailleurs toujours le cas, mais seulement aujourd'hui, je me sentais juste moins... coupable ?

- Je ne comprends pas Mélodie. Tu... tu es... Bizarre. Vraiment bizarre. D'abord la couleur de cheveux, qui te va bien certes, mais c'est beaucoup de changement. Puis ton heure de colle. Et ensuite, tu démissionnes de ce poste alors que j'avais l'impression qu'on s'amusait bien tous les deux, ça m'a fait un sacré choc. Puis finalement tu te rapproches de Castiel. Je ne sais pas trop quoi penser de tout ça, je ne savais même pas que tu l'appréciais. Je dois t'avouer que ça ne me plaît pas beaucoup, je ne veux pas qu'il ait une mauvaise influence sur toi.

Whoa. Il était réellement en colère. J'en fus tellement étonnée que je ne pris pas la peine de lui répliquer que c'était à cause de sa copine que j'avais pris cette foutue heure de colle.
Son intonation et ses grands yeux dorés suaient la réprobation. Et sans trop savoir pourquoi, j'étais mélangée entre un sentiment d'agacement incroyable que ce dernier ose se mêler ainsi de ma vie mais aussi de plaisir de réussir à l'énerver ainsi. Cela impliquait que j'étais capable de l'atteindre, que j'avais de la valeur à ses yeux. Je ne voulais pas que cette idée me plaise, mais c'était plus fort que moi. Je pris alors la décision de le pousser dans ses retranchements.

- Ecoute Nath, si je décide de passer du temps avec Castiel, ça ne te regarde pas.
- Bien entendu, répliqua-t-il sur le même ton. Mais si tu commences à faire des bêtises et à arrêter de prendre tes études au sérieux, là ça me regarde. Tu es mon amie et je sais à quel point tout ça compte pour toi.
- Je ne négligerai pas mes études, mais il n'y a pas que ça qui compte.


Il me regarda comme si j'avais complètement perdu les pédales.
Je savais bien entendu qu'il ne fallait pas toucher à ce domaine avec Nathaniel, il s'agaçait très rapidement. Et je cherchais réellement à l'énerver, je connaissais ses cordes sensibles et j'étais prête à les exploiter : les bonnes notes et Castiel.
La réussite scolaire était vitale pour lui. Ca l'était aussi pour moi, toujours et encore, mais je commençais à comprendre que je n'avais pas envie de n'avoir que ça de positif dans ma vie. C'était le rêve et les envies de Nathaniel tout ça, et pas totalement les miennes. A un moment de ma vie, j'avais simplement été incapable de dissocier les deux.

- Parce que Castiel est capable de comprendre ce qui compte, c'est ça ? cracha-t-il soudainement.
- Vous avez vos règles ou quoi ? intervint le rebelle qui avait observé notre échange. Je veux juste mon billet d'absence et j'me tire.
- Tiens, céda Nathaniel en gribouillant avec un stylo bic deux trois mots sur une feuille de papier avant de la tendre à Castiel. Prends-le ton billet d'absence.


Castiel fronça les sourcils et plissa légèrement les yeux, cherchant le piège. Son regard passa du bout de papier que lui tendait Nath au visage du beau blond.

- Attends, tu me le files comme ça ? Sans rien ? Même pas un regard désapprobateur, une heure de colle, une petite tentative de me faire culpabiliser ? s'étonna le rebelle. Putain Mélodie, tu devrais m'accompagner plus souvent !
- C'est vrai, tu devrais l'accompagner plus souvent Mélodie, répéta Nathaniel d'un ton ironique en me regardant droit dans les yeux.


Mais à quel jeu jouait-il ? Il avait décidé de passer le plus clair de son temps avec Sue, je ne comprenais pas pourquoi je n'aurais pas le droit de passer du temps avec qui je voulais ! Nathaniel ne s'était jamais montré aussi protecteur avec moi. J'imaginais pourtant pourquoi il agissait ainsi, il ne supportait pas de me voir, moi, son amie la plus proche, traîner avec son pire ennemi, le gars qu'il exécrait viscéralement. Je voyais dans son regard qu'il se sentait trahi.
Je n'eus pas le temps de réfléchir plus longtemps puisque Castiel quitta la pièce en grognant qu'il avait vu assez de blond pour une journée. Je décidai de le suivre sans un mot envers le délégué, le laissant gérer tout seul sa jalousie et son incompréhension, comme j'avais géré les miennes.

***

De : Matt
A : Mélodie
Hé, mademoizelle, t'es charmante, ça te dirait de passer la soirée chez moi ?

De : Mélodie
A : Matt
Aussi intéressante que soit ta proposition, je suis privée de sortie je te rappelle. Et tu connais mon père, quand il a décidé quelque chose, il n'y a pas grand-chose à faire.

De : Matt
A : Mélodie
T'inquiètes poupée, Matt Bond est sur le coup. La mission sauvez-Willy est en marche.

De : Mélodie
A : Matt
Matt... Je ne sais pas ce que tu prépares mais renonce, tu n'es pas prêt à te battre contre cette force de la nature.
PS : Je rêve où tu viens de me comparer à un orque ?


Je relus les SMS que m'avait envoyé Matt une demi-heure plus tôt, il n'avait pas répondu à mon dernier message. Je savais qu'il préparait un mauvais coup et je n'étais pas sûre de vouloir y être associée.
J'entendis soudainement des éclats de voix venant du salon, un long rire se détacha du reste de la discussion. Il ne me fallut même pas une seconde pour reconnaître cet abruti de Matt. Je sortis alors de ma chambre en quatrième vitesse et dévalai les escaliers en priant pour qu'avec la délicatesse qui le caractérisait, il n'avait pas réussi à prolonger ma punition.
Dans le salon, il y avait trois hommes discutant joyeusement en cercle : Matt, mon père et Roy, le père de Matt.

- Mélodie ! s'exclama Roy en me découvrant. Comment vas-tu ma belle ? Ca fait tellement longtemps !

Roy était la copie conforme de Matt mais dans une version adulte et plus ridée, Matt avait aussi hérité de lui son caractère taquin et enfantin. Roy s'approcha de moi rapidement et me prit dans ses bras pour me saluer. Par réflexe, je lui agrippai fermement les avant-bras, sachant pertinemment qu'il s'apprêtait à me chatouiller. C'était sa façon à lui de me dire bonjour depuis que j'avais 5ans. Il ne put s'empêcher de rire de plus bel face à mon instinct de défense.

- Ca va plutôt bien, soufflai-je en replaçant une mèche de cheveux derrière mon oreille. Et toi ?
- On ne peut mieux ! Surtout que je vais pouvoir profiter de votre écran plasma toute la soirée. Soirée rugby au programme !


Mon père et Roy se réunissaient environ une fois toutes les deux semaines pour regarder ensemble un match dans un sport quelconque sur notre écran plat dans la cave. Matt et moi savions pertinemment qu'ils se retrouvaient plus dans l'optique de passer une bonne soirée entre hommes plutôt que pour effectivement regarder avec attention un match sportif.

- Mélodie, tu fais quoi ce soir ? me questionna Matt en prenant un air innocent qui ne me trompa absolument pas.
- Rien du tout, répondis-je sans trop savoir où il voulait en venir.
- Oh ! Mais une jolie fille comme toi, ça devrait sortir ! s'étonna Roy en plantant son regard dans le mien. Tu ne vas pas rester toute seule ici alors que ton père et moi allons disparaître toute la soirée.
- Il y a Lysandre, intervint mon père apparemment agacé par la tournure que prenait la situation.
- Non, malheureusement, je l'ai invité chez moi ainsi que quelques amis pour la soirée, l'informa Matt sur un ton faussement désolé. Tu veux venir Mélodie ?
- Ah non, refusa mon père en secouant vigoureusement sa main droite. Désolé Matt mais Mélodie est privée de sortie.
- Voyons Philippe ! s'interposa Roy en donnant une bourrade à son vieil ami. Cette petite est un ange ! Tu ne vas pas la laisser enfermée dans sa chambre alors qu'elle entendra de la musique et ses amis s'amuser dans la maison juste en face.
- Je... bégaya mon père en passant son regard de Roy à moi plusieurs fois. Ce n'est pas raisonnable.
- Bon, on va rater le début du match, se plaignit le père de Matt en croisant ses bras sur son torse. Tu la laisses sortir la petite qu'on puisse profiter du match la conscience tranquille ? Surtout qu'elle ne risque rien, elle sera juste en face. Elle peut même dormir à la maison si ça te rassures !


Mon père me regarda alors intensément, comme s'il cherchait à y trouver une réponse quelconque. Je voyais qu'il était en plein dilemme, hésitant entre d'une part l'éducation stricte et ferme qui lui venait de ses parents, et de l'autre sa terrible envie de se retrouver seul avec son ami pour la soirée. Roy avait toujours été son point faible, j'adorais quand il venait à la maison : je pouvais m'empiffrer toute la soirée de gâteaux sans que mon père ne trouve rien à redire. D'ailleurs, il affirmait toujours que le père de Matt avait une mauvaise influence sur lui.
Mon père se mit alors à passer sa main sur son menton en soufflant bruyamment, je sus qu'il avait pris sa décision.

- Tu as été sage toute cette semaine et tu as fait toutes tes corvées sans te plaindre Mélodie, je pense que tu mérites que je lève ta punition, conclut-il. On est vendredi soir, va donc t'amuser avec tes amis.

Mon visage s'illumina littéralement, après une semaine d'enfermement, j'allais enfin pouvoir quitter cette maison qui commençait à littéralement m'oppresser. C'était d'ailleurs très étrange car je n'avais jamais eu cette impression auparavant, bien au contraire, j'avais toujours adoré passer mes journées enfermée dans ma chambre à lire de bons bouquins ou à regarder en boucle des émissions de télé débiles. Mais là, ça avait été différent : j'avais été forcé de rester coincée à la maison, alors que les autres profitaient de leur temps libre pour manger à la pizzeria du coin, faire du shopping,... J'avais eu l'impression de tout louper, d'être isolée. Ca n'avait clairement pas été facile.
Pour montrer ma reconnaissance, je sautai au cou de mon père. Il parut surpris, nous n'avions pas pour habitude de nous faire des démonstrations d'affection en public.
Alors que je m'apprêtai à monter à l'étage pour me préparer, j'aperçus Roy me lancer un clin d'œil complice. Je le remerciai avec un large sourire d'un hochement de tête discret.
Tel père tel fils...

***


- Alors ça y est, papa ours a laissé sortir sa petite fille ? s'enquit Iris avec un verre à la main.
- C'est entièrement grâce à moi ! intervint Matt tout fier depuis le canapé. Quelle ingrate cette Mélodie elle m'a même pas remercié !
- Merchi Matt ! lui lançai-je en mâchant difficilement tous les dragibus que j'avais stupidement mis en même temps dans ma bouche.


Tout le monde avait réussi à se libérer pour la soirée, mis à part Kim qui avait rendez-vous avec le videur de la boîte avec qui ça avait plutôt bien collé. Nous étions un peu serrés dans le petit salon de Matt mais il avait déplacé les meubles afin de faire plus de place. Il avait aussi débarrassé sa table à manger afin d'y déposer les boissons et les restes de quiche que nous avait ramené Violette.
J'étais bien entendu à portée de main de cette dernière qui était tout simplement succulente.
La sonnette de la porte se mit à retentir dans le petit salon, me faisant sursauter au point que je manquais de faire tomber la part de quiche que je tenais dans ma main. Qui pouvait donc sonner ? Personne ne me semblait manquer à l'appel.
Matt se leva, laissant une place vide dans le canapé à côté d'un Castiel allongé de manière un peu trop décontracté, et trottina jusqu'à la porte d'entrée. Il l'ouvrit en grand en laissant découvrir derrière deux blondinets qui se tenaient main dans la main.

- Oh ! Ca fait plaisir que t'es pu venir mec ! s'enthousiasma-t-il en venant taper dans la main de Nathaniel.

Non ! Il n'a pas osé ! Pourquoi est-ce qu'il ne m'a pas prévenu qu'il les avait invités ? Mais à quoi pensait cet idiot, je ne serais jamais venue si j'avais su... Je n'avais aucune envie de les voir roucouler comme le couple transis d'amour qu'ils étaient, je ne le supporterais pas.

- Salut Sue, lança-t-il légèrement plus froidement à l'égard de la nouvelle.

Sans vraiment trop comprendre ce qui me prit, je me dirigeai à grande enjambée vers le canapé et me laissai tomber à côté de Castiel avant que Nathaniel ou Sue n'ait pu m'apercevoir.
Je fis un grand sourire innocent au rouquin qui me regardait d'un air détaché.

- T'es au courant que t'es pas obligée de me coller comme ça ? T'as toute la place de l'autre côté du canapé, me fit-il signaler en bougonnant.
- Euh... Je... C'est-à-dire que... bégayai-je en jouant nerveusement avec mes doigts.
- Tu veux énerver blondie c'est ça ? comprit-il facilement. Ca me va, ça lui apprendra à se foutre de ma gueule en cours de mathématiques à ce connard.


Nathaniel fit alors son entrée suivie d'une Sue qui me paraissait plutôt nerveuse face à tout ce monde. Je pus remarquer qu'elle avait fait un effort pour s'habiller, elle avait enfilé une jupe blanche à volant et un petit chemisier en velours. L'association des deux était étrange mais lui allait comme un gant. Je me sentis à nouveau stupide, m'étant contentée de sortir le premier jean de ma penderie et un basique débardeur blanc. Je n'avais même pas pris la peine de me maquiller. J'avais simplement passé un coup de peigne dans mes cheveux blond cendré.
Matt accompagna les deux nouveaux arrivants, il marqua une pause quand il me découvrit si proche de Castiel sur le canapé, il fronça fortement les sourcils sous l'incompréhension. Et ce ne fut rien comparé à l'expression de Nathaniel qui se mit à blêmir fortement. Je pris le temps de prêter attention à ses oreilles, je savais qu'elles rosissaient légèrement quand il était en colère. Et c'est exactement ce qui se produisit.
Je me mis à culpabiliser : qu'étais-je en train de faire au juste ? C'était ridicule, tenter de l'énerver en me rapprochant de son pire ennemi. Je ne pouvais pas croire que j'étais tombée si bas.
Je m'apprêtai à me relever du canapé pour mettre fin à cette mascarade plus que puérile mais Castiel passa un bras sur mes épaules et me força à rester en place en affichant un sourire moqueur sur le visage.

- Attendez... Vous êtes ensembles tous les deux ?! s'étonna Sue en nous pointant de son index.

Suite à cette remarque qui était tout sauf perspicace, il y eut une sorte de réaction en chaîne. Castiel partit dans un rire et je ne sus dire s'il était gêné ou s'il se contentait d'être moqueur, je me mis à devenir plus rouge que les cheveux d'Iris, Matt manqua de recracher sa bière sur la moquette et la mâchoire de Nathaniel se décolla complètement, achevant définitivement le blondinet.
J'entendis les gloussements de Véra et Nora à ma droite, signalant qu'elles profitaient bien de la situation.

- Je crois qu'il faut que j'aille boire un verre d'eau, commença Matt en prenant la direction de la cuisine en s'étouffant.
- Mélodie, c'est vrai ? souffla Nathaniel toujours la bouche grande ouverte.
- Non ! m'exclamai-je en me relevant d'un seul coup du canapé.
- Alors qu'est-ce que tu fous dans ses bras ? reprit Nathaniel d'un ton qui était cette fois-ci accusateur.
- C'est vrai que c'est étrange tout de même, approuva Sue toujours aussi curieuse.
- De quoi j'me mêle toi ? cracha Castiel en la regardant de haut en bas avec dédain. Qui l'a invité celle-là ?


Castiel n'était jamais tendre avec les personnes qu'il ne connaissait pas, il ne se privait pas de soit dire ce qu'il pensait soit de les ignorer totalement et complètement. En l'occurrence, il venait de dire tout haut ce qu'apparemment ici tout le monde pensait tout bas. La plupart de mes amis considérait que Sue leur avait enlevé Nathaniel, et qu'elle l'apparentait plus à un toutou qu'à un petit ami. J'étais personnellement d'avis que le délégué l'acceptait volontiers.
Je me sentis presque mal pour la blonde lorsque toutes les personnes présentes se retournèrent vers elle subitement, comme s'ils se posèrent eux aussi soudainement la question.

- Ne lui parle pas comme ça Castiel, lui reprocha durement Nathaniel.
- Couché Blondie, cracha-t-il en affichant un sourire carnassier.


La tension dans la pièce monta de plusieurs crans. Nathaniel serrait ses poings, il s'apprêtait à craquer d'un moment à l'autre. Seul Castiel réussissait à le mettre dans de tels états. Et Sue paraissait totalement désemparée et déboussolée par les propos du rouquin.

- Cast, vient fumer une clope avec moi, intervint Armin en l'empoignant par le bras.

Je soufflai bruyamment et tout le monde remercia Armin du regard, ce dernier disparut avec un Castiel traînant des pieds dans le jardin. Nathaniel passa sa main dans ses cheveux blonds comme le blé pour se calmer tandis que Sue se laissait tomber d'un air las sur une chaise.
Et tout ça parce que je m'étais assise à côté de Castiel, c'était du grand n'importe quoi.

- Tiens, ça va te faire du bien, affirma Alexy en me tendant un verre.
- C'est quoi ? m'enquis-je sur la défensive.
- Vaut mieux pas que tu le saches, m'assura-t-il en me le fourrant de force dans une main.


***

- Bordel, j'me sens con quand même ! se plaignit Armin en replaçant les mandarines qu'il avait sous son T-shirt.

Véra l'avait défié il y a environ une vingtaine de minutes de réussir à survivre dans la peau d'une fille toute une soirée après qu'il se soit fichu d'elle pour avoir manqué de tomber en marchant avec ses bottes à talon haut. Armin, idiot et amoureux comme il était, avait accepté et était parti farfouiller dans les affaires d'Amélie, la sœur de Matt. Il avait enfilé une jupe noire élastique et une chemise avec des motifs effet peau de croco. Il portait aux pieds des escarpins rouges avec environ 8cm de talon. Je crois que je n'avais jamais rien vu d'aussi drôle de toute ma vie que quand il avait déboulé dans le salon en manquant de se casser la figure à chaque pas. Castiel lui avait mis du rouge à lèvre rouge en débordant dans tous les sens en se bidonnant comme une baleine.

- T'es sexy Armina ! lui balança Matt en lui fichant une main aux fesses.
- Pas touche ! J'suis pas ce genre de filles moi, monsieur, affirma Armin en passant rapidement la main dans ses cheveux noir corbeau.
- Bordel, et moi qui ait toujours rêvé d'avoir une sœur ! s'enthousiasma Alexy en le prenant en photo.
- J'avoue que tu m'impressionnes, concéda Véra. Enfin un qui porte ses couilles ! Chapeau bas !


Véra lui fit une petite révérence amusante avant de venir s'asseoir sur ses genoux sous les acclamations de tout le monde.

- Le bisou, le bisou, le bisou ! clama Matt en se laissant tomber à côté de moi sur le canapé.
- La ferme Matt ! le rabroua Armin apparemment gêné. Toujours à la ramener, mais en attendant je te vois pas trop concrétiser toi de ton côté hein !
- Est-ce que t'es en train d'insinuer ce que je crois que tu insinues ? fit-il mine de se vexer en portant sa main sur son cœur. Tu vas voir si je pécho pas !


J'étais en train de glousser stupidement lorsque Matt se saisit de mon visage avec ses mains et déposa brusquement ses lèvres sur les miennes. Le baiser fut très bref, mais il n'en fallut pas plus pour que je me retrouve plus choquée que jamais. Ma bouche était restée légèrement entrouverte et mes yeux étaient grands ouverts.

- Ah non ! Méli-Mélo ne compte pas ! se moqua Armin qui ne paraissait pas plus surpris que ça devant ce qui venait de se passer.
- Comment ça je compte pas ?! m'insurgeai-je en tentant de retrouver une convenance.
- Bah... On sait tous qu'avec toi... Un peu d'argent et puis... commença-t-il sans réellement finir sa phrase.
- Armin t'as vraiment trop joué aux jeux vidéo ! affirmai-je en lui balançant un coussin dans la tête.


Je m'étais servie de cette petite distraction pour tenter de cacher ma surprise.
Matt venait de m'embrasser. Je savais qu'il l'avait fait plus pour le jeu et son amour pour les défis que parce qu'il en avait réellement envie, mais c'était tout de même un gros choc qu'il me fallait assimiler.
En tentant de faire le point sur mes émotions, je croisai le regard de Nathaniel. Il n'avait pas prononcé un mot depuis son altercation avec Castiel et se contentait de me lancer des regards noirs toutes les cinq minutes. Quant à Sue, elle tentait tant bien que mal de cacher son malaise, ne sachant pas réellement comment réussir à s'intégrer dans le groupe. Et en effet, elle avait plus de rétracteur qu'autre chose. Castiel n'avait même pas daigné lui porté une minute de plus de son attention, Alexy semblait un peu remonté contre elle (et il en fallait pour l'énerver celui-là !), Iris lui en voulait de m'avoir volé Nathaniel, tout comme Rosalya et Violette, et pour finir, Nora et Véra ne paraissaient pas du tout porter un quelconque intérêt envers cette dernière. En bref, elle ne faisait pas spécialement l'unanimité. Elle me fit presque de la peine, au fond, elle n'était pas méchante, les circonstances jouaient surtout en sa défaveur. Mes amis voulaient me protéger, et à la fois récupérer leur ami qui les avait délaissés
De nouveau, Nathaniel me coula un regard lourd de sens. Je le connaissais assez bien pour savoir qu'il allait bientôt venir me faire la morale, et j'étais prête à parier qu'il n'attendrait pas la fin de la soirée pour ça.  

Et Dieu créa Mélodie... entre deux pauses pipiحيث تعيش القصص. اكتشف الآن