Partie un

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Tu verras, les âmes se retrouvent toujours quelque part.

Proche d'un hublot couvert d'une bonne couche de poussière, il est l'heure de partir en direction de New-York. J'ai rêvé de ce moment-là un nombre incalculable de fois et je touche enfin mon but du bout des doigts.

— Mademoiselle ?

J'ouvre les yeux en m'acclimatant difficilement à la lumière et me rappelle soudainement que je ne suis pas toute seule dans ce maudit avion. Je n'aime pas la compagnie, je tombe souvent dessus les pires compagnons de voyage. Ceux qui respirent forts et ceux qui bavent en dormant.

— Oui, la place est libre.

Le somnifère est redoutable, merci maman de vouloir me droguait. Je cligne plusieurs fois des cils, le steward ne semble pas être du même avis. Il se tient debout, talkie-walkie en main en me souriant.

— Nous sommes bientôt à New-York, veuillez attacher votre ceinture.

Je le remercie en regardant à travers le hublot. Nous sommes encore dans les nuages, les oiseaux volent haut dans le ciel, c'est tout bonnement merveilleux. Je suis surexcitée en sentant mes oreilles qui se débouchent en descendant progressivement dans les airs. Je respire bruyamment, sourire aux lèvres sous les regards interloqués de mes voisins. Oui j'aime la vie, ça pose un problème trou de..

— Madame, Monsieur, nous abordons notre descente vers l'aéroport international John F. Kennedy. Nous vous invitons à regagner votre siège et vous assurer que vos bagages à mains sont situés sous le siège devant vous ou dans les coffres à bagages.

Je m'agrippe à mon siège à la dernière descente. Mon rêve est enfin là, juste derrière ses portes. Je récupère ma petite valise dans la soute après une attente interminable et retrouve enfin la sortie. Je respire enfin depuis ses douze dernières heures enfermée dans cette sorte de grande boîte volante.

— June, regarde derrière-toi !

Je me retourne en trouvant instinctivement ma sœur dans une belle coccinelle rouge. Elle est incroyable dans cette robe blanche, Angelina a toujours été celle de nous deux qu'on remarque le plus facilement. Certainement la plus insouciante de toute notre famille, je vois en elle tout ce que je ne suis pas.

— Mais qui êtes-vous ? Demandai-je en faisant mine de ne pas la reconnaître. Ah mais oui, je vous reconnais maintenant, vous êtes ma très très très vielle sœur ?

Elle me balance un petit coup de la paume de sa main en me prenant finalement dans ses bras.

— Et bien ton ancêtre doit te dire quelque petits trucs en ce qui concerne New-York, ma grande.

— Oh non, pitié..

Elle porte ma valise jusqu'à la voiture avant de me faire silencieusement un signe de la main pour la rejoindre. Je ne sais pas pourquoi mais j'arrive facilement à croire que notre trajet jusqu'à la maison va être très long.

— Premièrement, ignore ceux qui te demandent quelque chose dans la rue, Manhattan ce n'est pas comme à Paris. Il y a beaucoup de trafics dans le coin.

— Comme partout, non ?

Elle sourit depuis son siège en s'insérant dans la circulation peu fluide. Nous n'avons même pas fait un kilomètre que nous sommes déjà dans les bouchons.

— Deuxièmement, tu dois toujours me dire avant de partir de la maison, maman me tuerait si elle savait que je te laisse toute seule.

— On est pas dans un voyage scolaire, Angelina. Soupirai-je en me renfrognant dans le cuir du siège. Je dois prendre mes marques, tu te souviens ?

— Je le sais bien, mais il faut que je te protège aussi.

Moins insouciante la frangine tout d'un coup, ça promet déjà des bons coups de gueule a n'en plus voir la fin. Le silence revient dans l'habitacle jusqu'à notre adresse, un joli lotissement où les propriétés sont toutes les unes plus belles que les autres.

— Prête ? Me demande-t-elle en appuyant sur le bouton du portail. Bienvenue chez nous, Juno.

Le portail s'ouvre lentement en me laissant à la vue d'une gigantesque façade beige aux volets noirs. Je me sens déjà comme chez moi en regardant la petite piscine enterrée, les fleurs partout qui recouvrent l'herbe mais surtout cette vue.

— Ne me dit pas que ton mec est le président de la république.

— Il travaille dans la finance mais je te garantie qu'avec ton nouveau travail, tu auras rapidement tout ce que tu voudras.

Je ne suis pas totalement maître de mon destin. Je ne me plains pas mais tout m'est déjà dû alors que je n'ai pas encore fait mes preuves.

— En revanche, on ne compte pas nos heures de travail et on s'investit au maximum. Ne te laisse pas distraire, June.

— Non, maman.

Je lève les yeux haut dans les nuages en rentrant dans la demeure. Un îlot en marbre au centre de la cuisine contemporaine, deux grands divans beige devant une télévision plus grande qu'une taille ordinaire à Paris. Tout est démesuré, c'est flippant.

— Ne fait pas cette tête, Julian adore les matchs de base-ball, c'est à cause de lui.

Je glousse en fixant son doigt vernis de rouge qui pointe une porte close à l'autre bout du hall. Je la talonne jusqu'à ce qui ressemble à une chambre.

— J'ai déjà acheté le minimum mais tu as carte blanche.

Un lit double trône dans un angle de la pièce en face d'une petite télévision et d'un bureau comme neuf. J'ai de la chance d'être aussi bien loti mais je ne suis pas certaine de me faire rapidement à ce changement aussi soudain. Jusque-là, nous vivions avec maman dans une minuscule maison où il fallait faire rapidement une petite douche avant nos éternels coupure d'eau chaude.

— Merci beaucoup, c'est vraiment parfait.

— Pas de quoi, si tu veux on pourra faire les magasins demain. Le centre commerciale est incroyable.

Je suis déjà pauvre avant même de remplir ma garde robe, ça risque d'être compliqué. Je ne la retiens pas plus longtemps en me glissant dans le lit moelleux. Une couverture en satin ? Non mais franchement. Je fais abstraction de toute cette richesse qui me brûle les yeux avant de prendre mon téléphone pour écrire un message à ma mère.

Je suis bien arrivée, je t'envoie un autre message demain. Je t'aime.

My only one Où les histoires vivent. Découvrez maintenant