Chapitre 2

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— Eh eh, calme toi...! tenta-t-elle en vain.

Aucune évolution. L'animal maintenait obstinément les hostilités en poursuivant ses grondements inquiétants. Elle espérait de tout coeur ne pas avoir à faire appel à sa magie, au risque de blesser cette pauvre bête qui à son sens, ne méritait un tel châtiment. Elle avait bien plus d'estime pour les animaux que pour les êtres humains, qu'elle jugeait comme étant la pire des espèces. C'est pourquoi elle se résigna à faire preuve de patience en cessant toute gestuelle à son intention. Dans l'attente qu'il prenne maintenant conscience qu'il ne devait en rien, la craindre. Elle ne restait qu'une jeune sorcière en début d'apprentissage après tout. Si l'envie le tenaillait, il lui suffisait d'un simple coup de mâchoire pour ne faire qu'une bouchée d'elle. Autant s'estimer heureuse qu'il ne lui ait pas déjà bondit dessus pour la lacérer de ses crocs.

La magicienne fit le choix de s'accroupir après quelques secondes pour lui offrir un sentiment de supériorité. Ses babines tressautèrent à plusieurs reprises mais il ne bougea toujours pas d'un iota. Il semblait même, au fil des minutes, gagner un simulacre de confiance à son égard. De quoi ravir la jeune femme qui craignait malgré tout son impulsivité, même si elle n'en laissait rien paraître. Timidement, le loup tenta un premier pas.

Elle observa sa lente démarche avec une admiration peu contrôlée, persuadée que ce regard ambré la sondait. Ses prunelles dégageaient tellement d'émotions qu'il lui était difficile d'en trouver les mots adéquats. Quelque chose d'à la fois si sombre et sauvage sans pour autant manifester une seule marque d'agressivité. Mais elle en venait tout de même à se questionner si cette bestiole n'était pas consciente de la magie qui grondait autour d'elle. Peut-être était-ce cela qui le rebutait.

Dès lors que le sommet de son museau effleura ses doigts, un sourire indétachable ourla ses lèvres entrouvertes. Elle le laissa l'inspecter et s'imprégner de son parfum à sa guise tandis qu'elle détaillait la carrure sculpturale de son inspecteur touffu. Il était évident que ce loup ne disposait en rien, de tout ce qu'il y avait de plus normal. Sur ses pattes, il devait nettement la dépasser. Un mètre soixante-cinq pour un prédateur censé être de la taille d'un gros chien, cela représentait beaucoup. Mieux valait ne pas révéler l'existence de cet magnifique bête. Son petit doigt lui affirmait que cette information serait fort mal acceptée auprès des habitants.

Inhalant l'effluve qui enrobait la main de son interlocutrice, l'animal s'attela maintenant à effleurer sa chevelure de son museau. Elle grimaça au contact de cette truffe fraîche qui lui chatouillait l'épiderme alors qu'il la contourna pour approfondir sa connaissance. Elle s'était toujours montrée patiente et pleine de compassion à l'égard des animaux, cela devait certainement se faire ressentir. Auquel cas, comment pouvait-il ne pas se montrer sauvage ? Elle profita de cette vague de confiance pour tenter une énième caresse par-dessus son crâne. Si jusqu'à maintenant les hostilités étaient lancées, elle eut la surprise de constater que ce chien se laissait maintenant choyer, sans y émettre la moindre opposition. Son pelage était sec, raboteux mais doté d'une certaine chaleur qui lui rendait toute chose. Mais elle constata très vite que cette fourrure aux nuances terre d'ombre dissimulait plusieurs blessures qui selon elle, se révélaient perfides.

Derrière l'oreille gauche, se dévoilait une écorchure qu'elle jugea très profonde. Le côté droit de son ventre dégorgeait lui aussi d'hémoglobines, visiblement causées par une entaille pernicieuse. Et pourtant, l'animal ne s'en plaignait pas. Ses prunelles rousses s'élargirent.

— T'es blessé ? prononça-t-elle avec effarement en jetant un œil aux dites blessures.

Mais le loup n'approuva pas cette tentative. Il grogna très vite son immédiate désapprobation et elle retira la main, comme si son pelage la brûlait à vif. Ce regard meurtrier qui lui fut soudain dédié manqua de lui faire regretter cette initiative. Il était si expressif, qu'elle devinait chacune des humeurs défilantes.

Le Sang DéfenduOù les histoires vivent. Découvrez maintenant