Chapitre 21

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- Salut maman, c'est... hum... c'est moi, Léna. Tu dois sûrement être au boulot à cette heure alors... essaye de me rappeler dès que t'en as l'occasion, ok ? C'est important. Code noir, ajouta-t-elle dans un murmure comme pour souligner l'urgence de cet appel.

Caroline n'était que trop peu joignable, compte tenu de ses innombrables déplacements et de son responsable, à tout le moins, pointilleux. Détenir son portable en main ne serait-ce que trois malheureuses secondes, hors des pauses accordées, pouvait être passible d'un licenciement immédiat. Autant dire que conserver cet emploi revenait à longer un fil étroit suspendu au vide, sans point d'appui pour amortir la chute. C'est pourquoi les deux jeunes femmes s'étaient imposées l'usage de codes couleur pour évaluer à distance la gravité d'une situation.

Le vert désignait une importance minime. Le bleu, une urgence aux conséquences peu recommandables auxquelles s'ajouteraient éventuels problèmes de cœur, comme le disait Léna. Puis le code noir. Ce fameux code qui signifiait un danger relatif à leur monde à elles, en d'autres termes, aux suites alarmantes et probablement dramatiques. Il serait donc désespéré de croire que l'absence de Caroline perdurerait.

D'ici quelques minutes, sa mère la recontacterait pour apprendre que sa fille fut victime la veille d'une morsure de métamorphe mais surtout, que les Holfmann étaient maintenant démasquées.

En proie à une nervosité indéfectible, elle accomplit une suite de pas engourdis au centre du salon. Cette longue nuitée n'eut ni suffit à raréfier ses habituels réveils, ni à apaiser ses tourments. Bien qu'ils se faisaient moins nombreux en cette période, cela devait faire des mois qu'elle ne sommeillait plus de manière ininterrompue. Les poches sous ses yeux témoignaient eux même de sa fatigue, autant que la pâleur ivoirine de son teint et la mollesse de ses gestes. Raison pour laquelle elle se trouvait encore vêtue de sa veste cotonneuse ornées d'oreilles de panda et d'un pantalon large de pyjama.

À défaut d'atteindre ainsi l'apogée de la sexytude, elle disposait d'un confort dont elle ne se priverait pour rien au monde.

Afin de ne pas importuner le sommeil déjà fragile de son amie, Alix avait déserté dans le plus grand silence au beau milieu de la matinée. Elle avait même pris la peine de lui rédiger une note réconfortante, minutieusement repliée et larguée sur sa table de cuisine en bois vernis. Une attention qu'elle ne réservait qu'à Léna, sans grand étonnement.

"N'hésite pas à m'appeler si besoin. Je me chargerais de prendre tes cours cet aprem. Repose toi et MANGE surtout.

Ps : Quel est le point commun entre le film Avatar et Titanic ? J'te laisse deux heures."

Un gloussement traversa les lèvres de la divinatrice.

Quelle idiote.

Alix restait bien la seule personne en mesure de lui soutirer aussi aisément un sourire, même suite à de graves représailles. Cela dit, elle n'avait pour une fois, pas réponse à cette blague qu'elle savait d'ores et déjà ridicule.

Elle prit alors le temps de réfléchir quelques secondes en plissant les yeux puis se résigna, textotant à son intention :

"Réponse à la blague ?"

À l'immédiate réception du message attendu, elle éclata d'un rire franc qui manqua d'agiter le reptile à ses pieds.

Le Sang DéfenduWhere stories live. Discover now