Chapitre 12

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Deux jours plus tard, ce fut par l'intermédiaire d'une nuit difficile que Léna cahota par dessus le matelas. Cauchemars, sursauts, cris, agitation. Voilà à quoi s'étaient résumées ses dernières nuitées, en tout point, horrifiques. Les assassinats de Misty-Field n'eurent guère cessé de la hanter durant ses songes. L'idée qu'elle puisse être l'origine de toute cette barbarie la rendait malade, tant et si bien qu'elle dut se lever à deux reprises pour ne pas se noyer dans sa transpiration. L'appel d'une heure avec ses parents la veille eut, en prime, amplifié son inquiétude. Son père, évidemment angoissé et sa mère, fort peu rassurée par la menace qui rôdait à proximité de sa fille, priaient pour qu'elle se décide à revenir au sein de leur domicile. Mais il en était hors de question. Elle avait tout donné pour obtenir son indépendance et enfin construire sa vie, loin de la Floride, où ses douloureux souvenirs la dépouillaient de toute tranquillité. L'amour et le soutien de ses parents ne lui suffisaient malheureusement plus pour s'attarder là-bas quelques jours supplémentaires.


À en juger par ses séquelles, elle se déplacerait à l'université de préférénce le lendemain. D'ici là, en se fiant à l'évolution de son état, elle ne crapahuterait plus tel un nourrisson en apprentissage de ses premiers pas. Cela dit, elle était vivement tentée par l'idée d'une petite marche au coeur de la forêt pour réhausser un tant soit peu son moral. Elle en avait grandement besoin pour ne pas dire qu'il s'agissait d'une nécessité.

Hors de question de sombrer.

Fuir ces murs imbibés de ces perpétuelles ondes négatives ne lui procurerait que le plus grand bien. Du moins, si le courage se décidait cette fois à se ranger de son côté.

Elle ne put toutefois réprimer cette vague de déception à l'idée de manquer le cours du professeur Bayle. La succession des derniers événements la rendait monstrueusement curieuse à son sujet. Comment allait-elle parvenir à ignorer leur discussion hors de l'université ? Elle s'était tout de même retrouvée chez lui par inadvertance. Comment passer outre cet échange, au sein de l'établissement ? Sans évoquer cette nuée impétueuse d'épines qui lui traversait le ventre, chaque fois que son regard heurtait le sien. Car telle était l'immanquable vérité : les iris de ce loup la frappaient, la percutaient et la martelaient jusqu'à ce qu'elle ne daigne s'en détacher et l'ignore pour de bon. Divine et merveilleuse torture.

Le maintien de son secret, ces meurtres, en prime des propos de Bayle, tout cela représentait beaucoup pour elle. Au point même que ses pouvoirs se manifestent une seconde fois la veille, par le biais de brutaux claquements de portes et de grésillement d'ampoules.

Mais s'il y avait bien une chose en mesure de pouvoir la rassurer un tantinet, c'était l'état plus serein et dynamique d'Emeraude. Son reptile vagabondait de nouveau et rampait avec sa grâce habituelle, slalonant entre chaque objet échoué au sol. 

Soupirant par ce début de journée tout du moins barbant, elle se saisit de son portable pour identifier le destinataire de toutes ces vibrations.

"Tu reviens demain ?"

" Putain Léna, je m'ennuie là. Parle moi !"

"T'es là ? Réponds !"

"Trois heures merdiques. On se voit ce soir ? :("

"Tu fais quoi ?"

"Quelle est la différence entre un juif et une pizza ?"

Le Sang DéfenduWhere stories live. Discover now