Chapitre 27

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Le spectacle était l'un des plus épouvantables que l'on puisse voir. Des cris et des pleurs retentissaient, les pirates de Barbe Blanche et les marines s'entretuaient, et parmi toute cette macabre agitation et ces corps tombés, le corps d'un jeune homme au torse troué et celui debout d'un vieillard à la moustache en croissant de lune étaient visibles.
Barbe Blanche et Ace aux Poings Ardents étaient morts.

Face à cela, les visages de l'équipage se firent livides et fermés. Mais il n'y avait pas que ça. Un équipage pirate faisait face à Sengoku et Garp, et les amiraux tentaient d'empêcher un homme-poisson et un jeune garçon que j'identifiai comme étant le Grand Corsaire Jinbei et Mugiwara no Luffy de fuir. Akainu, surtout, semblait très déterminé, au point qu'il se servait sans ménagement de son Fruit du Démon pour forcer le passage. Ce champ de bataille était plus sauvage que tout, partout régnait une haine folle et sanguinaire. Je restai sans voix, en laissant une colère noire me consumer peu à peu. Était-ce donc cela, la Justice de la Marine ? Atteindre ses buts mais continuer à s'acharner sans se soucier des vies perdues pour rien ?

- ÇA SUFFIT !!

Ce cri autoritaire retentit dans la bataille au point de tout stopper, et un garçon aux cheveux roses se dressa devant Akainu. Mon sang ne fit qu'un tour. Kobby, qu'est ce que tu fais ?! Ma colère laissa place à une grande crainte, tandis que j'écoutais le discours du marine. Le geste de Kobby  était beau et admirable, mais Akainu n'allait faire qu'une bouchée de lui. Je m'étais toujours demandé si cet homme était humain tant il était strict, extrêmiste. En le voyant lever son poing de magma, je retins mon souffle et plaçai mes mains devant ma bouche. Mes yeux se remplirent de larmes alors qu'Akainu abattait son poing... Puis je crus faire un arrêt cardiaque de soulagement en voyant Shanks parer le coup avec Griffon, son sabre. Kobby s'écroula, visiblement assomé par tant d'émotions.

Je n'attendis pas plus longtemps et descendis du Red Force sans prêter attention aux désapprobations de mes nakamas. Je courus vers mon ami et me laissai tomber auprès de lui.

- Kobby...

Je retirai rapidement l'un de mes gants avec mes dents et posai deux doigts sur le haut de son cou. Le pouls battait toujours. L'apaisement que je ressentis m'arracha un soupir.
Je relevai la tête, et croisa le regard du Chien Rouge. Son regard surpris mais empreint d'un profond dégoût me fit frémir. Je ne pus ni bouger, ni détourner les yeux face à une pareille fureur, et c'est à peine si j'entendai mon capitaine parler avec une sorte de clown à la voix stridente.

- Traîtresse.

Ces paroles me firent l'effet d'une gifle. Je fronçai les sourcils et pris soin de regarder l'amiral droit dans les yeux. Lui, qui avait tenté de tuer l'un de ses propres soldats, osait me dire une telle chose ?

- Je préfère être une traîtresse au grand coeur qu'une marine privée d'un tel organe.

J'avais veillé à garder un ton calme, mais mon ton avait débordé d'insolence malgré moi. Je n'avais jamais osé lui parler comme ça, et je n'aurai sûrement jamais osé si il n'avait pas agi d'une telle façon. Je soutins son regard brûlant avec détermination. Cet homme ne m'avait jamais inspiré du respect et au contraire, il m'avait toujours intimidé. À présent, je ne ressentai que du mépris à son égard et même si je savais pertinemment que je n'avais aucune chance contre lui en combat singulier, je n'avais pas peur de son courroux.
Du coin de l'œil, je vis son poing s'embraser, il esquissa un pas vers moi.

- N'y pense même pas.

Un déclic se fit entendre et une main se posa sur mon épaule. Je levai les yeux, délaissant l'amiral de magma, et au signe de tête donné par Beckmann, je me levai. Mon mentor ne quitta pas Sakazuki des yeux, jusqu'à ce que celui-ci aie redonné à son poing une apparence normale, puis il abaissa son pistolet et me fit signe. J'acquiesçai et quittai Kobby pour rejoindre mes nakamas descendus de notre navire. Tous ensemble, nous nous rapprochions de notre capitaine et avancions vers les forces opposantes sans l'ombre d'une hésitation.

- Si vous continuez de vous battre, les deux camps subiront plus de pertes inutiles. Si quelqu'un veut encore se battre...

Nous nous stoppions à l'instar de Shanks. Le Roux dégaina Griffon. L'un de mes nakamas dégaina lui aussi, Lucky Roo restait à manger, Yasopp croisa les bras et Beckmann tira sur sa cigarette. Je posai une main sur la poignée d'un de mes saï.

- Alors venez ! Nous serons vos adversaires !

Face à une telle conviction, nous fûmes trois à sourire. Les marines semblèrent surpris et ne bougèrent pas, je compris vite que ce ne serait pas eux qui nous poseront le plus de soucis, mais bien l'équipage de Barbe Noire.
Le possible combat n'eut cependant pas lieu. Barbe Noire partit sans demander son reste, et la Marine, grâce à Sengoku, accéda à nos demandes : la récupération des corps des deux légendes tombées et la fin de la guerre.

La Guerre au Sommet était officiellement finie, grâce à l'intervention de Shanks, grâce à notre intervention. Face à cette proclamation, je n'attendis pas plus pour rejoindre Kobby. Avec l'aide d'Hermep, nous l'amenâmes à l'endroit indiqué par les médecins. J'aurai voulu rester plus longtemps et être assurée de sa stabilité, mais je ne pouvais pas. J'étais une pirate et comme l'avait si bien dit Sakazuki, une traîtresse. Après avoir échangé quelques paroles avec Hermep, je le quittai et tout en restant à une certaine distance des marines qui affluaient, je partis pour rejoindre mon équipage.

- C'est le bal des oiseaux, aujourd'hui ?

Je me stoppai net en entendant cette voix lente qui allongeait ses phrases. Je fis volte-face et me tournai vers son propriétaire. Kizaru n'avait pas changé, depuis notre dernière rencontre. Toujours aussi détendu, toujours aussi nonchalant. Je ne pus réprimer un léger sourire.

- Borsa... Je veux dire, Amiral Kizaru.

Voici le plus dur lorsqu'on changeait de camp : devoir se comporter comme des ennemis avec ceux qu'on avait toujours apprécié. Je ravalai toute ma sympathie pour le Singe Jaune. Un jour, si cela se trouvait, nous allions devoir nous affronter et je ne pourrai pas laisser ma sympathie pour lui obstruer mes convictions. Je perdis mon sourire et me fis plus sérieuse. Kizaru, quant à lui, avait mis ses mains dans ses poches de pantalon et me dévisageai des pieds à la tête.

- Les jeunes sont flippants de nos jours... Envoles-toi avant que ta chance ne tourne, Aouso*.

Il fit volte-face et continua sa marche. J'haussai les sourcils, une expression d'incompréhension sur le visage. Avait-il lui aussi du mal à nous voir comme des ennemis pour m'appeler encore par le surnom qu'il m'avait attribué enfant ?

Je poursuivis mon chemin, non sans écopper des regards noirs ou déçus de la part de mes ex-collègues mais certains, comme Smoker ou Hina, me dévisageaient rapidement et sans aucune émotion. Je n'y accordai pas trop d'importance.
J'étais à présent seule parmi les décombres du QG, essayant de me frayer un chemin parmi tous ces débris. Mon équipage devait sûrement avoir embarqué depuis le temps, je ferai mieux de me dépêcher.

- Tiens tiens... On ne se serait pas perdu ?

Un rire méprisant et surtout malsain arriva à mes oreilles. Je vis une boule de plumes roses, puis je fus projetée contre un mur en ruine. Mon crâne percuta avait violence la pierre et rapidement, en plus de la douleur aigüe, je sentis un liquide chaud couler le long de ma nuque. Prise par surprise, j'hoquetai, tout en ouvrant des yeux ronds sur un Don Quichotte Doflamingo riant tout son soûl.

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*Aouso (青嘘 ou 青鷽) : Ao 青 "bleu", Uso 嘘 "mensonge" ou 鷽 "bouvreuil" (en fonction de la prononciation).

Une Question de Justice [One Piece]Where stories live. Discover now