Chapitre 31

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Deux semaines. Deux semaines s'étaient écoulées depuis l'enterrement, et notre quotidien était redevenu tout aussi joyeux que d'habitude. Par le journal, nous avions appris l'hommage de Luffy à Marineford, hommage servant à dissimuler un message que Shanks avait en premier compris : le Chapeau de Paille allait faire une pause de deux ans. Le soir de cette nouvelle, nous avions fait la fête.

Nous nous étions amarré à une île hivernale du Nouveau Monde : Yukiryu, une île que l'équipage appréciait. Elle était déserte, enfouie sous la neige, mais pas pour autant dénuée d'attraits.

Après avoir accompli mes corvées du jour et fait changer mes bandages par le médecin de bord, je m'étais un peu éloignée des autres. J'aimais bien me retrouver seule de temps en temps pour réfléchir, et j'avais matière à quoi en ce moment.
En tant que nakama d'un Yonko, je n'avais pas trop à m'inquiéter de ce qui allait se passer dans cette toute  nouvelle ère, mais je ne pouvais pas m'en empêcher. Comment allait évoluer le futur, avec la Marine et le Gouvernement Mondial ? Qu'est ce que Barbe Noire, le nouvel Empereur, allait faire à présent ? Des questions sérieuses à mes yeux, mais auxquelles je ne trouvais aucune réponse.

Essayons plus facile. Pourquoi le Shichibukai Doflamingo voulait ma mort ? Était-ce un ordre donné par le Gouvernement Mondial, une initiative, ou cela venait-il d'une autre personne ? Comment le saï que j'avais laissé au G-5 était arrivé entre les mains du roi de Dressrosa ? Je ne trouvais pas plus de réponses à ces interrogations qu'aux précédentes, hormis que Vergo était sûrement un espion. Je soupirai. Je ne pensai pas joyeux et cela influençait mon humeur. Évitons que je me torture l'esprit maintenant, j'aurai tout le loisir de le faire plus tard.

Je commençai à rebrousser chemin et je pris la direction pour retourner au navire. Au passage, je m'amusai avec la neige qui recouvrait le sentier. Je n'avais pas froid et au contraire, j'avais presque chaud. J'étais beaucoup moins sujette au froid que la plupart des personnes, mais je supportais moins les grosses chaleurs. Un avantage ou un handicap en fonction des températures, mais actuellement il s'agissait d'un avantage.
Je rejoignis rapidement le Red Force. Il n'y avait personne sur le pont, et un boucan infernal retentissait depuis la salle à manger, éveillant ma curiosité. Ils fêtaient quelque chose ? Je me hâtai et j'eus à peine le temps d'ouvrir la porte qu'on me poussa parmi les convives en me donnant une choppe remplie à ras bord.

- Ah, la voilà !
- Et pour Aouso, hourra !

Ils éclatèrent tous de rire et burent un coup. J'haussai les sourcils, de plus en plus surprise. Aouso ? Un seul homme m'appelait comme ça et cet homme ne faisait pas partie de l'équipage, bien au contraire. Mes nakamas discutaient et riaient, et face à leurs encouragements je bus entièrement ma choppe. Je ne comprenais toujours pas pourquoi ils agissaient comme cela.

- On peut m'expliquer ce qu'il se passe ?
- T'es pas au courant ?

Shanks se distingua parmi les fêtards. Ceux-ci firent silence. Le capitaine but au goulot de sa bouteille, puis la jeta à terre pour farfouiller dans sa poche et lever bien haut une feuille. C'était un avis de recherche, tout neuf apparemment, et sur lequel ma photo figurait. Je portai une main à ma bouche en ouvrant les yeux ronds. Shanks se racla la gorge et prit un air solennel.

- Aouso, recherchée morte ou vive pour une prime de 450 millions de berrys !

Un tonnerre d'applaudissements et d'acclamations retentit tandis que je restai sans voix. Wao. Je ne m'attendais pas à ça. Plutôt énorme pour une première prime, d'ailleurs. J'en étais très étonnée, la Marine devait me surestimer. Shanks répondit sans le savoir à mon étonnement en lisant le journal accompagnant l'avis de recherche.

- "Ayant trahi la Marine pour rejoindre l'équipage du Yonko Shanks le Roux et sympathiser avec l'armée révolutionnaire, il va sans dire qu'il s'agit d'une menace que le monde ne peut ignorer" !

Le tonnerre devint un ouragan de félicitations et je ne pus m'empêcher de me tenir droite, fière. 

La fête battit bientôt son plein. L'alcool et la nourriture coulaient à flots, la mélodie entraînante des musiciens résonnait et les rires de mes camarades ponctuaient le tout. Avec cet avis de recherche et une telle prime, j'entrai dans la cour des grands, je devenais officiellement une pirate aux yeux du Gouvernement Mondial et c'était cette entrée que l'on fêtait aussi joyeusement et bruyamment. Il en fallait très peu aux pirates du Roux pour faire la fête.

Malgré l'ambiance enivrante et festive, je me sentais à l'étroit. Ils étaient tous adorables, mais de plus en plus incontrôlables et je n'avais pas envie de finir saoûle comme eux. En refusant les choppes qu'on me tendait et les mains m'invitant à danser, je me frayai un chemin et sortis sur le pont du navire.

Le soleil s'était couché et contrairement à l'intérieur, le calme régnait. Je vins m'appuyer au bord du bateau. La neige tombait doucement, la mer était calme. C'était une nuit paisible, sans accroc.

J'eus un rire nerveux et posai ma tête dans ma main en fermant brièvement les yeux. J'avais l'impression qu'un poids disparaissait de mes épaules. Je me sentais heureuse, et fière. Fière d'être leur camarade, leur amie. Fière de pouvoir suivre mes convictions loin de la pression de la Marine. Cela voulait dire quelque part que j'étais fière d'être une criminelle, mais j'étais plutôt fière de devenir libre par ce statut.
Une main se posa sur mon épaule. Surprise, je relevai la tête. Beckmann se trouvait à côté de moi.

- Salut championne.
- Yo. Qu'est ce que tu viens faire ici ?
- Avoir un peu la paix. Ça devenait étouffant.
- Ah, toi aussi ?

Nous eûmes un rapide sourire complice. Il me lâcha l'épaule pour s'appuyer au rebord. Son briquet craqua plusieurs fois, puis une flamme en jaillit, éclairant son visage un court moment. L'instant d'après, il tirait sur sa cigarette en poussant un grognement de satisfaction.

- Alors, contente ?
- Ouais ! C'est plutôt satisfaisant pour une première prime.

Je fronçai le nez et me redressai pour éviter la fumée de la cigarette. En voyant ma réaction, le pirate eut un ricanement et se retourna, déplaçant la traînée de fumée par la même occasion.

- Te reposes pas sur tes lauriers, gamine. Demain après-midi, on reprend l'entraînement.
- À vos ordres, le vieux.
- "Le vieux" ? Tu vas morfler.
- J'demande à voir.

Son rire s'amplifiait, mon sourire malicieux s'agrandissait. J'adorais ces moments avec mon mentor où l'on s'envoyait des petites piques taquines. C'était toujours divertissant, d'autant plus que comme moi il avait du répondant.

- Tu me laisseras jamais avoir le dernier mot, hein ?
- Si t'es sage, peut être.
- Isis ?

Entendre Shanks m'interpeller alors que je taquinais mon mentor fit faire un bond de surprise à mon coeur. Je me détournai et m'avançai dans la direction de mon capitaine en souriant.

- Shanks ! Qu'est ce que tu viens faire ici ?
- Une certaine invitée d'honneur manque à l'appel.

Il vint me prendre la main et m'entraîna avec lui. Je jetai un regard derrière moi en direction de Beckmann. Il roula les yeux et haussa les épaules. J'eus un rire silencieux et le salua de la main en laissant le rouquin me ramener parmi les fêtards. On me remit de l'alcool dans les mains, je mangeai quelques morceaux de viande, puis je dansais avec Rockstar, Yasopp, Shanks, ce dernier étant plutôt très bon danseur pour un manchot. On riait, on chantait, et bientôt mon esprit fut enivré par la fête.

- T'es jolie quand tu souris. Tu voudrais pas retirer tes bandages, que j'admire toute ta beauté ?
- T'as trop bu, Akagami.

J'éclatai de rire et repris la main que Shanks me tendait pour le laisser m'entraîner dans une nouvelle danse. Profiter du présent et de la joie, l'alcool, la danse, la nourriture était tout simplement divin. La totale liberté régnait, je me sentais chez moi. Et c'était officiellement devenu mon univers, après tout !

Une Question de Justice [One Piece]Where stories live. Discover now