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Elle avait de longs cheveux argentés.
Ils scintillaient comme des cristaux, et s'échouaient en cascade sur une robe blanche, presque immaculée. Elle était splendide. Parée de dorures comme une déesse, la peau douce et laiteuse comme celle d'un nourrisson. Elle était semblable à un mirage. Si proche et pourtant si loin d'Éris.
Où était-elle d'ailleurs ? D'un coup de tête, Éris reconnut les couloirs sombres de son manoir. Les orbes blanchâtres qui les éclairaient laissaient entrevoir toute une fresque d'ombres difformes. Elles dansaient tout autour d'Éris, comme pour chercher à l'envoûter. La sorcière fut traversée d'un long frisson.
Mais lorsque son regard médusé se posa à nouveau sur la femme, Éris réalisa que cette dernière avait disparu. Envahie par une étrange panique, elle se mit aussitôt à courir.
— Attends !
Mais le tapis se plia sournoisement sous ses pieds et la fille trébucha. Son nez claqua le sol à l'impact, et bientôt, des perles rouges s'égrainèrent sur le sol. Éris grimaça de douleur. Puis ses yeux s'écarquillèrent devant les tâches pourpres de la tapisserie. Elle devait les effacer. Coûte que coûte. Alors elle traça un losange avec ses doigts, et récita, avec obstination :
— Huy K'ma. Huy K'ma. Huy K'ma...
Mais sa voix était déjà engourdie par les sanglots. Le manoir ricanait. Le vent lui soufflait dans les cheveux.
— Cessez tous les deux, résonna une voix claire.
Éris renifla et redressa sa tête. La femme était là et même de près, ses traits lui paraissaient flous. On pourrait la confondre avec un halo de lumière, ceux dans lesquels Éris pourrait se blottir, comme dans le ventre d'une mère.
— Je suis désolée, murmura la femme, c'est juste que nous n'avons pas assez de temps.
— Pas assez de temps ? s'étonna Éris.
La femme acquiesça, tout en l'aidant à se relever. Elle n'eut à peine besoin de ciller pour effacer le sang séché du tapis.
— Mais qui êtes-vous ? souffla Éris d'une voix presque inaudible.
La femme esquissa un sourire peiné.
— Il est déjà trop tard.
Éris s'éveilla en sursaut, éblouie par l'éclat opaque de l'orbe bleue pâle qui trônait dans le coin de sa chambre. Son corps ruisselait de sueur, ce qui n'était pas étonnant au vu des litres de couettes qui l'ensevelissaient. C'était sans compter la cape de l'Ordre qu'elle portait toujours par-dessus sa tunique noire et son pantalon en velours. Quel avait été cet étrange rêve ? Était-il normal d'apercevoir deux fois la même inconnue dans un songe ?
