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La Citadelle se situait sur une zone de non-lieu, à l'intersection de tous les sanctuaires.
Tel un bras surgit de terre, la tour de pierre s'élançait dans les airs jusqu'à embrasser les nuages opaques. À chaque étage, des barreaux édentés jaillissaient de la roche monolithe, à l'aplomb de fines meurtrières. Le toit quant à lui était composé d'une verrière, au-dessus de laquelle une orbe similaire à celle qu'Éris avait observé à Ventemer, trônait sur une structure métallique.
Contrairement à ce qu'Éris s'était imaginé, la Citadelle ne possédait pas vraiment les attributs de forteresse impénétrable qu'on lui vantait. Des rumeurs disaient que les créatures les plus effroyables protégeaient les lieux, et que les douves de la tour crachaient une lave plus ardente encore que le feu de l'Abysse.
En réalité, la Citadelle n'était cerclée que par une juxtaposition ordonnée de colonnes ornées de différents cristaux. S'ils ne s'agissaient pas de puissantes barrières magiques, Éris aurait peut-être moins déploré la situation.
Les talons des sorciers qui l'escortaient claquaient sur le pavé blanc, et donnaient au silence ambiant un rythme fort déplaisant. La cadence n'était même pas accordée aux battements du cœur d'Éris. Comment en était-elle arrivé là ? Depuis son arrivée dans le cercle des Gardiens, la seule chose qu'elle avait souhaité avait été de faire le bien. Comment avec une intention pareille, elle avait pu tout ruiner ? La réponse sembla évidente lorsqu'elle rembobina toutes les paroles que ses parents n'avaient eu de cesse de lui répéter.
Tu es une disgrâce.
Le constat lui perça la poitrine. La douleur était telle qu'elle en ignorait presque celle que lui instillait l'étau autour de ses poignets. Sous la pression de la Grande Prêtresse, Roshan avait été forcé de sceller ses mains — et a fortiori ses pouvoirs. Ou peut-être que le Gardien de Goldcrest l'avait fait de son plein gré. Éris n'oubliait pas le regard qu'il lui avait lancé après qu'elle lui révèle la vérité sur l'Ordre.
Lorsqu'elle pénétra la Citadelle, Éris fut surprise d'apercevoir une rangée de miroir, qui s'allongeaient jusqu'au centre de la tour — là où débutaient les cellules. Une bile amère se déploya dans sa gorge à la vue de la mèche blanche qui coupait son visage.
Comment avait-elle pu ignorer la vérité alors qu'elle apparaissait clairement sur ses cheveux ?
Elle ne comprenait rien à la magie. À son fonctionnement. Pas de doute qu'elle ait tout empiré. Si elle s'était renseignée ne serait-ce qu'un peu sur la sorcellerie astrale, elle aurait su que pactiser avec un feu follet était la pire chose qu'elle aurait pu faire. Désormais, tous ses espoirs de stopper l'horrible tragédie qui planait sur le monde magique s'effondraient à mesure qu'elle plantait ses pas sur le linoléum brillant.
