Chapitre 23 - Partie 2

1.8K 199 25
                                    

Je terminai ma part de tarte bakewell, et bus de suite un grand verre d'eau. J'adorais cette tarte, mais il y avait tellement de sucre dedans que j'avais à chaque fois l'impression de sentir toute l'eau de mon corps se faire aspirer à chaque bouchée. À côté de moi, Dan s'enfonça dans le dossier de sa chaise, soufflant en se frottant le ventre comme un vieux qui aurait sa bedaine totalement pleine.

— Ouah, mon ventre va éclater.

— C'est vrai que t'as du ventre, vieux, se moqua Vince.

Dan tapota dessus et je me penchai, un rictus aux lèvres :

— Dis-donc, c'est pour quand l'accouchement ?

— Dan ! Tu nous as caché que t'étais enceinte !

— Mais vous êtes des grands malades !!! J'suis pas enceinte ! C'est même pas possible en plus ! s'insurgea-t-il en se redressant sur sa chaise.

— Quand on voit ton ventre rond, on se demande.

Vince rit à gorge déployée et je le suivis. Dan s'efforça à démentir nos moqueries, et Lily s'offusqua gentiment qu'on attire ainsi l'attention des autres clients dans le restaurant. Je refusai un thé ou un café, et seule Lily prit une boisson chaude.

Remit de ses émotions, Dan babillait avec Vince de rugby. Je les écoutai distraitement, souriant face à Lily qui, malgré elle, commençait à comprendre leur jargon – bien qu'elle soutenait le contraire. Je sentis mon téléphone vibrer dans ma poche et l'en tirai. Je levai les yeux vers Lily qui aperçu mon expression. Je décrochai et portai l'appareil à mon oreille :

— Allo ?

Soan, je te dérange ?

— Non, c'est bon.

Il eut un silence à l'autre bout du fil, et étrangement, un aussi à table. Je fis comme si je ne remarquai pas le regard de Dan et de Vince, croisant à peine celui de Lily. Elle avait compris. Elle comprenait toujours très vite pour ce genre de chose. Je ne baissai pourtant pas la tête et poursuivis ma conversation téléphonique :

Je voulais savoir si ce soir, tu voulais passer à l'appartement ?

— Le tien ? demandai-je en connaissant déjà la réponse.

Non.

Bien sûr. Il n'y avait toujours eu qu'un appartement. Et ce n'était pas le sien.

Les jumelles ont dit qu'elles ne rentreraient pas ce soir. Une soirée ou quelque chose comme ça.

Elles avaient tout prévu, elles aussi, bien sûr. Tout ça, c'était d'une évidence qui me rendait un peu nauséeux. Je me frottai une tempe, faisant attention à n'accrocher aucun regard.

— Et Owen ?

Il est sous la douche. J'ai fait à manger.

— Je viens de dîner.

Ce n'est pas grave.

Du coin de l'œil, je vis Dan se pencher sur la table. Il savait très bien qui j'avais au téléphone. Et s'il en doutait encore, je le lui confirmai :

— D'accord. Je serais là. À plus tard, Ach'.

Je raccrochai et levai les yeux, prêt à affronter mes meilleurs amis. S'il y avait bien une chose qui avait changé en deux ans et demi, c'était ça. C'était l'étendue de notre relation. C'étai l'exposition qu'on s'autorisait, que je m'autorisais. Ce n'était plus un amour enfermé dans un appartement. Nous n'étions plus ces ombres qui se cherchaient en silence, à l'affut du moindre regard qui pourrait nous surprendre. Je n'en voulais plus. Et j'étais parti pour que cet amour sorte des murs de l'appartement sans que personne ne puisse rien y redire. S'aimer au grand jour. S'aimer partout. Mais bien sûr, il y avait toujours à redire.

Miracles In December (Le Droit de Nous Aimer)Where stories live. Discover now