Chapitre 4 - Partie 1

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Le vent était d'un froid mordant. Je regrettai de ne pas avoir pris de bonnet avec moi. Il soufflait fort, fouettait mon visage de ses lames de glace, giflant ma peau qui rougissait sous ses assauts gelés. Mes cheveux, que j'avais si longuement travaillé – qui étaient la cause de mon manque de bonnet – étaient revenus à leur état d'origine : intenables. Ils partaient dans tous les sens, sans se soucier ni de la gravité ni de l'humainement possible. Un véritable capharnaüm dans lequel j'essayais tant bien que mal – quoi que plus mal que bien – de remettre de l'ordre.

Le bout de mes doigts étaient aussi congelés que mes oreilles que je ne sentais même plus. J'avais enfilé des mitaines noires, qu'en dise Lily. Elle voulait que je ne mette rien, mais nous étions proche du zéro degré Celsius, avec un ressentit négatif. Je n'avais pas envie de mourir glacé alors que les prémices de mes rêves les plus fous étaient en train de se réaliser. Je resserrai mon manteau contre moi, jetant un rapide coup d'œil à ma montre. Il était 20h15, Earl devrait être là.

J'eus à peine le temps de le penser que je le sentis. Comment ? Je n'avais aucune explication mais je savais qu'il était là, quelque part, non loin. Je me retournai et aperçu une silhouette longue, élancée, accompagnée d'une démarche qui m'était familière. Il n'avait, pour une fois, pas mis ses cheveux en arrière, ce qui le rendait encore plus beau. Ses cheveux sombres bigarraient son visage, dont les yeux bleus ressortaient comme deux saphirs sur une statuette égyptienne.

Magnifique.

Lorsqu'il arriva à ma hauteur, il me sourit et je crus mourir.

— Bonsoir Soan. Tu as trouvé facilement ?

— Bonsoir. Oui, même si je ne sais pas où vous comptez m'emmener.

Un sourire en coin étira la commissure de ses lèvres, me donnant chaud d'un coup.

— C'est un endroit secret.

Il passa devant sans me donner plus de détails, un air rieur sur le visage. Je le talonnai et me mis à sa hauteur. Il portait un élégant manteau noir de bonne facture. Ses mains cachées sous des gants tout aussi noirs, il n'y avait que ses yeux bleus comme couleur. Une couleur que j'affectionnais, en partie grâce à lui.

Voyant qu'il ne comptait pas commencer la conversation, je le fis en premier :

— Vous ne comptez pas m'emmener chez vous tout de même ?!

— Tu es du genre à faire ça dès le premier soir ?

Sa réplique, accompagné de son regard vif, me coupèrent le sifflet. Bon sang, était-il autorisé qu'un prof parle comme ça à son élève ? Non, nous n'étions actuellement plus élève et professeur. Il était Owen Earl, et j'étais Soan Berett. Il m'avait donné rendez-vous en tant que tel, il avait donc le droit de me parler ainsi. Tout comme j'en avais le droit aussi.

Il s'arrêta devant une porte usée d'un tout petit restaurant au moins aussi vieux que l'enseigne branlante, qui tenait par miracle au dessus de la porte. Je n'avais aucune confiance quant à rester en dessous. Un geste trop violent contre cette porte, et pour sûr, l'enseigne nous tombait sur la tête !

Il ouvrit la porte alors que je répliquai enfin :

— Tout dépend avec qui. Mais généralement, non.

Il me regarda par-dessus son épaule, sans rien dire, puis entra en me tenant la porte. Je la refermai avec précaution et balayai le restaurant – si l'on pouvait l'appeler ainsi – du regard. C'était minuscule. Tout de bois vêtu. Les murs étaient lambrissés, tout comme le sol possédait un vieux parquet dévernis. Le comptoir était un vieux tronc d'arbre à peine travaillé, tout comme les chaises dont seule l'assise damassée semblait faite d'autre chose que de bois. Ça sentait la cire et la bouffe des restos pour routiers. Le plafond aussi était recouvert de lambris et les chandelles, ici et là, avaient cette même couleur de bois, rendant l'endroit dorée mais aussi assez étroit. Je ne trouvais pas ça ultra romantique pour un premier rendez-vous. Même pour un second. Ça ressemblait plus à une adresse qui se transmettait seulement via le bouche à oreille, et rien d'autre.

Miracles In December (Le Droit de Nous Aimer)Where stories live. Discover now