𝐒𝐇𝐎𝐍𝐆𝐈 - T1

03. La bête aux échecs

Ezra

Ruby et moi étions assis dans un café du coin tranquillement avec quelques dossiers sur la table. Par chance, je n'avais pas eu besoin de bouger bien loin de Manhattan pour rencontrer les personnes qui venaient d'entrer à leurs tours. 

Sa mauvaise idée, de créer cette alliance avait suscité en moi, un désir pour faire souffrir un peu plus mon père. S'il mourait d'une mort naturelle causée par une crise cardiaque, on ne me reprocherait pas de m'être vengé pour avoir attendu des années une place qui me reviens. 

Ce n'était pas comme si mon petit frère le portait aussi dans son cœur. D'ailleurs, il l'appelait toujours Hector au lieu de papa. 

Malgré ma fatigue, seul le café noir allait me forcer à rester les yeux ouverts. Je trouvais déjà cette situation assez ennuyeuse. Je détestais certaines fois le travail pour ce genre de merde. 

Les ennemis, les alliances, et le fait de ne pas profiter de la vie comme les autres. Sortir en boîte demandait à récupérer vingt-quatre heures de travail pour s'être amusé.

Ruby et moi entendîmes l'attrape-rêve au-dessus de la porte faire du bruit. Celle-ci s'ouvra sur un homme brun assez grand et musclé était accompagné d'une femme qui lui ressemblait vachement, mais avec une plus petite taille. 

Alors voilà mon nouveau souffre-douleur. 

Intéressant...

Celle-ci semblait surprise de la décoration du café dont elle dévorait des yeux. D'après ce que j'avais entendu, mademoiselle Hayes ne s'était jamais déplacée en dehors de Los Angeles. Comment arrivait-elle alors à rencontrer les présidents avec qui elle travaillait ? 

Son cousin devait sûrement faire le boulot pendant qu'elle se prélassait sur sa terrasse, un verre de jus à la main. A sa tête angélique, je me doutais bien qu'elle n'eût jamais touché à une goutte d'alcool. Ruby et moi, nous levions pour leur montrer notre présence et vînmes s'asseoir en face de nous. 

Une odeur de gérance traînait dans l'air.

- Salut Caleb, dit ma collègue en lui souriant.

Il lui rendit son sourire et lui serra la main qu'elle tendait. Le fameux Caleb s'asseyait en face d'elle tandis que la femme, en face à moi. Je regardais mes doigts croisés sur la table me demandant dans quel bourbier ma meilleure amie, ma fausse sœur, ma collègue, ma conseillère, bref... m'avait fourré.

À nous voir comme ça, on aurait plutôt dit un rendez-vous arrangé, qu'un rendez-vous de travail. Comme si chacun de nous avait oublié la place qu'il occupait dans la vie réelle. Comme si je n'étais pas en face du chef de Shongi et qu'elle était en face du chef de The Beast. 

Mon petit frère trouverait sûrement cette situation amusante, et se foutrait de ma gueule s'il en était tenu au courant. Penser à lui, me rappelait que dans quelques jours, son anniversaire approchait. 

Et que le seul cadeau qu'il allait me demander désespérément... 

C'était ma présence et celle de Ruby. Bien qu'il ne soit pas vraiment proche de mon père, il l'était davantage avec ses frères et sœurs.

Je décidais enfin de lever mon visage de mes chevalières qui décoraient mes doigts, pour regarder la femme devant moi, fronçant les sourcils devant le menu. C'est pourtant simple de commander un café. Comme si on allait rester plusieurs années à l'attendre. 

Si nous avions convenu de ce rendez-vous à travers nos conseillers, c'était surtout pour les clauses de notre contrat. Et sa signature. Pas pour manger