Chapitre 33

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Après quelques heures dans sa cellule, elle n'avait plus vu la créature depuis leur dernière discussion, ce qui était une bonne chose. Elle n'avait pas envie de savoir s'il y avait une signification du fait qu'elle avait pris l'apparence de Kieran. La reine décida de ne pas lui en parler quand ils se reverraient. Ils avaient d'autres choses à penser.

Une ombre semblait se détacher du fond de la prison. Il y avait un grand couloir jusqu'à la porte qui menait au château. Le roi marcha jusqu'à elle d'un pas nullement pressée. Il s'arrêta devant elle alors que Zora fulminait. Elle était redoutable. Quand le visage du roi se dessina devant ses yeux, elle lui cracha au visage.

— Je peux vous jurer sur ma propre vie que si vous osez toucher Kieran, je réduirai votre royaume en cendre, pesta-t-elle.

Elle comptait déjà le faire, mais une menace ne faisait rien de mal. Le roi fut pris au dépourvu. Il recula d'un pas et essuya son visage avec dégoût à l'aide de la manche de sa veste. Le regard que Zora posa sur le roi était tempétueux.

— Est-il si important pour toi ?

La question du roi avait pour unique but de la provoquer. Il croisa les bras derrière son dos, attendant une réponse. Zora ignora sa remarque. Il se fichait complètement d'elle, elle en était consciente.

— Pourquoi ne pas l'avoir amené ici ?

— Il te rejoindra plus tard, je voulais te parler en tête à tête.

Zora recula dans sa cellule et croisa les bras sur sa poitrine. Ses longs cheveux tombaient le long de son dos. Le roi fit l'inverse et s'approcha des barreaux. A ses risques et périls, pensa Zora. Le vieil homme posa un regard plein de férocité sur la jeune femme.

— Je veux savoir la réelle raison de votre venue ici, dit-il en la pointant du doigt.

Il avait attendu trop longtemps pour leur demander des comptes. Le roi savait qu'ils étaient ici pour une raison bien précise. Leur comportement à eux deux les avaient trahis. De son côté, Nya n'avait pas dit un mot sur leur altercation de l'autre soir. Elle n'avait rien dénoncé, car elle savait que sa demi-sœur n'était pas là pour jouer. Elle était ici pour un but précis. La façon dont elle l'avait traité l'avait dissuadé de dire quoi que ce soit.

Zora l'affronta du regard. Ils étaient condamnés à mort dans ce royaume. Que le roi sache son identité ou non, cela ne changerait rien. Elle pouvait très bien révéler son identité.

— C'est la reine qui vous envoie ? Je veux lui parler.

Zora se tint droite et leva le menton. La prestance qu'elle dégageait à ce moment précis n'égalait à personne d'autre. Elle avait l'essence d'une reine quand elle lui répondit.

— Vous le faites déjà.

Le roi tituba, ne s'y attendant pas. Il en resta bouche bée pendant un instant. La femme devant elle était la reine du royaume d'Orris ? Cela ne pouvait être vrai.

— Qu'est-ce qui me dit que tu dis la vérité ? La reine est-elle morte ?

— Je peux vous montrer sa tête, ou son corps, à votre guise.

La folie dans les yeux de Zora grandissait à mesure qu'elle révélait la vérité. Elle avait envie de clamer haut et fort l'acte qu'elle avait fait. Elle crut voir un voile d'affolement dans le regard du roi. Celui-ci reprit vite contenance. En y repensant, la jeune femme qu'il avait devant lui avait les même traits de sa mère.

— Tu n'as donc pas honte d'avoir tué ta propre mère ?

— Pas plus qu'elle n'en a éprouvé quand elle a envoyé mon père mourir entre vos mains.

Le visage de Zora était dur. Le roi laissa échapper un sourire.

— C'est donc ça, dit-il d'une voix amusée. Tu es venue venger ton père, j'ai raison ?

— Vous l'avez tué par pur caprice. Vous n'êtes qu'une sale ordure, cracha-t-elle alors qu'elle s'avança plus près des barreaux.

— Il fut un temps où ton père s'est interposé entre moi et ta mère, je n'ai fait que rétablir l'ordre des choses.

Il semblait parfaitement sûr de lui face à ses propos, comme si son acte avait été légitime.

— Mon père avait tous les droits, grogna Zora.

— Ton père était un pauvre imbécile. Il était trop bon. Il n'avait aucune autorité, aucune aptitude à régner sur un royaume !

Avec un élan de pure rage, Zora essaya d'attraper son bras, mais le roi la devança et prit ses distances à temps. Ce n'était pas vrai, son père était complètement légitime au trône.

— Je vous interdit de proférer des choses pareilles ! hurla Zora à plein poumons.

Ses larmes menaçaient de couler. Elle agrippa les barreaux avec tellement de force que les jointures de ses mains devinrent blanches.

— La mort de ton père n'est pas une si grande perte. Par contre, en ayant assassiné ta mère, tu mènes ton peuple tout droit vers la chute.

Les yeux de Zora étaient injectés de sang, sa mâchoire crispée. Le cœur de la jeune femme battait plus vite que la normale.

— Je vous tuerai de mes propres mains ! jura-t-elle dans le silence de la prison alors que le roi s'éloigna.

Il était déjà arrivé au fond du couloir quand Zora frappa son pied avec hargne contre le mur.

𝑳𝒂 𝒓𝒆𝒊𝒏𝒆 𝒓𝒐𝒖𝒈𝒆Where stories live. Discover now